MAX JACOB
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MAX JACOB
by MARIA GREEN
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COLLOQUES - III. LES OEUVRES DE MAX JACOB
ART POETIQUE
AP.Emile-Paul frères, 1922. 61-62. «L’Art chrétien.» «L’art officiel est un art romantique; l’art romantique est anti-chrétien puisqu’il prône la passion que le christianisme réprouve. Un art nouveau doit être une réaction contre l’homme. On n’entend pas par art chrétien un art gémissant & plaintif, mais au contraire l’art de la tenue & qui fait gagner à la charité ce qu’il gagne à se pencher au-dessus d’elle, qui connaît mieux l’humanité parce qu’il la voit de plus haut sans lui permettre de le souiller; c’est l’attitude de l’artiste classique.»
L’ART GEMISSSANT-ROMANTISME. A Doucet 21 fév. 1917. Corr. I, 138-39. Cité aussi par Rousselot, op. cit. 149. «[…]nous n’avons plus le droit d’être romantiques. L’admiration pour les filles, les pauvres, les criminels & les faubourgs, c’est le culte du difforme. Le culte du difforme, est un héritage du romantisme & le romantisme est le culte de la nature (nature est synonyme de difforme, comme art est synonyme de forme) & non pas comme on le prétend chrétien & sentimental. – Je n’entends pas par art chrétien l’art gémissant, mais au contraire l’art du choix, de l’examen, de la composition; cela est l’art classique, qui a fleuri dans les époques de foi. L’art classique c’est le carême de l’artiste. Le chrétien est l’anti-naturel & l’art par conséquent. Vous allez penser aux russes, mais les russes de la grande époque russe, sont des extases romantiques & leurs successeurs les ont imités. La religion n’aime pas le bafouillage de Doestoïewski. Elle enseigne à se taire comme l’a fait Racine, le poète de la France, cette fille aînée de l’église.»
---. L’ART CHRETIEN – L’ART NOUVEAU. Au même. 138-39. «Un art nouveau ne peut être qu’un art chrétien, car il n’y a pas à dire dans une ère chrétienne, il faut être avec ou contre: il n’y a pas de milieu réfléchissez-y! Comment serons-nous ‘pour’ après un siècle de ‘contre’ sinon par un art retenu à tendances rationnelles, un art de réaction contre l’homme. […]. 139. Mais le chrétien ne hait pas l’humanité, il l’aime. Il se penche sur elle; il la met à sa place dans la nature & dans l’univers; il la voit comme une nuée d’insectes dont chacun porte une petite cocarde qui le différencie du voisin. C’est ainsi qu’il la prend en pitié de loin sans permettre que son contact le souille. Voilà l’attitude de l’artiste classique, attitude qui sera celle de l’époque qui vient.»
MAX JACOB A PROPOS DE SON AP. A Cadou Esth. 56. «L’AP était utile ou agréable en 1921 – c’étaient bien là nos curiosités & la poésie de 18, le coin-coin du vers à plusieurs sens diversifiés & unifiés, l’art gratuit sans support, le grain de surprise, le bourrage de crâne hamlétique (question de oui ou de non), la camelote cubiste transposée en poésie, c’est-à-dire une composition à la Edgar Poë (voir le Corbeau composition d ‘un poème). Plus les conversions au catholicisme.»
PFAU OP. CIT. 205 A PROPOS DE L’ART POETIQUE DE M.J. Ce n’est pas une théorie développée d’une manière cohérente, mais plutôt des pensées en forme d’aphorismes à propos de la poésie, allant plus loin que la littérature proprement dite. Il y exprime ses idées d’une manière plus concentrée & employant plus d’images que dans les l. à ses amis. La demande centrale est: le poète doit participer avec passion dans son œuvre, ce qui ne veut pas dire de déverser ses sentiments, mais en les transposant en poésie, en formulation stricte. [Rés. M.G.]. ‘La poésie est un cri, mais c’est un cri habillé.’ – Cadou. Esth. 30.
BALLADES
CLAUDE ROY Préf. B, Gallimard, 1970. 7-8. «Lui, il a voulu seulement être humblement le Pitre, tout se permettre, & même derrière les crépitements de rires, à l’abri du masque de fards violents, d’être invisible en étant voyant, d’être l’invu clairvoyant, baladin & prophète, moine-guignol.»
LEJ, 21 fév. 38. 70. «On va m’éditer 5 ou 6 ballades mi-prose, mi-vers. Je ne suis pas fâché de faire connaître cette face de mon individu.»
LML, 76. 5 janv. 1939. «J’ai beaucoup délaissé la poésie, bien que la petite brochure de ballades ait reçu des compliments nouveaux pour moi, & encourageant »; VM, 247. Debresse lui demandait un vol. de vers. «Max se sentait alors ignoré, oublié. Il n’attendait plus rien de Gallimard […] il lui proposait ‘des p. en prose correspondant à 250 vers.’ ‘Vous n’y perdrez rien: C’est ce que je réussis de mieux.’ Ce furent les Ballades […] [qui] s’ouvrait sur la ‘Ballade de la visite nocturne’, admirable poème d’amour, c’est la ‘chanson du mal-aimé’, sans facilité ni faiblesse, de MJ.» - P. Andreu a pu consulter chez M. Béalu le prem. ms. du poème,’ il porte en haut à droite de la prem. page les noms des deux êtres S… & B… qui lui avaient inspiré cette passion & la folie de la visite nocturne.’ [Remarque de M.G. René Dulsou, que M.J. aimait avec passion, a écrit, sous le pseud. de Sinclair, un c.r. de VM in Arcadie (mai 1982): 316 dans lequel il signale que Andreu a été dupé par les fausses précisions du poète, tout en laissant croire que c’était lui qui avait inspiré la ballade] ; 248. Le 20 oct. 1943, il écrira à Bronislav Horowitz qui lui avait dit combien il admirait cette Ballade: ‘J’aime tellement cela que je ne puis m’assurer que ce soit de moi.’
NOTES DE FRANCOIS GARNIER AUX BALLADES, Debresse, 1954. 7. «Face au prem. texte, ‘Ballade de la visite nocturne’, la plus célèbre, dit-il, il écrivit ‘Cette histoire n’est pas absolument véridique. J’ai seulement pensé à le faire & raconté au complice que je l’avais fait. Cependant il me plaît qu’on l’a croie vraie. Quant à la folie calme hélas! la remarque est exacte’.»
---. 8. A propos de ‘Berthe la servante’, ‘Cela est un de mes exercices coutumiers dans le genre folklore.’ «Le mot ‘folklore’ caractérise en effet, d’après M.J., certaines pièces des OB. 1912.» - ‘Genre nouveau alors’, ajoute-t-il, & qu’il fut peut-être le prem. à utiliser.»
---. 10. Note de M.J. au ‘Le cercueil qui salue’. «Pure invention: le luxe d’écrire un roman feuilleton en 50 lignes.»
ROUSSELOT. OP. CIT. 144. «Les plus beaux poèmes de Max, selon ses propres dires, ne sont-ils pas les plus émus? A tous, il préferait la ‘Ballade de la visite nocturne’& il nous dit pourquoi: un fort sentiment est au centre & tout rayonne à partir de lui.»
BOURGEOIS DE FRANCE & D’AILLEURS. TABLEAU DE LA BOURGEOISIE
DV, 54. Envoi à Béalu. «Ce livre de botanique systématique fleuri ça & là de quelques exemples. Tout cela assez manqué…» Bibliographie de M.J., 128,
FOLIO, no. spéc. R. Riese Hubert. «M.J.’s bourgeois voices.» 39. «M.J. frequently makes excuses to his readers & informs them of his future plans: ‘I shall develop this in another section’. ‘This does nos belong here’. Needless to say, the writer as often as not fails to carry out his old promises or to make amends for his ‘failures’. By this method M.J. attracts the reader’s attention to the writer’s art of digression as well as his inalienable freedom.»- 40. «Each family proudly insists on its name, but the bourgeoisie appears like a vast collection of bottles bearing different labels but all too similar & familiar contents. – […] although the vast array of names offers a bewildering range of possibilities, the acquisitive nature of the middle-class belongs to all segments where the least successful are named the deprived & humiliated. – The word ‘family’ also relates to classifications used in the biological sciences. Even in this pseudo-scientific context, the world assumes a double fonction. The humor is provided by the parallel between the human families & animal species, their common patterns of behavior. Jacob parodies to a certain extent the Balzacian system of classification which aims to give a coherent & accessible record of manners, habits & mores. Animals, big or small, mammals or insects, are introduced sometimes […] to reveal deep-seated aggressions. In his illustrations, Jacob has made ample use of the animal theme. He alternatively represents human gatherings of recongnizable social events & animal portraits of a stupid, brutal appearance. These alternating series, apparently unrelated, reveal complementary, bourgeois traits & practices. By means of drawing showing an animal devouring man, Jacob suggests the bourgeois’ self-destructive side & the hidden dangers of controlled social manners.- 41. All bourgeois are prone to paradoxical demeaneor: to contradictions between words & gestures, but such traits barely separate one group from the next. […]. The poet repeatedly introduces characters by a descriptive method beginning with appearance, moving rapidly to gesture & behaviour. […]. The interest […] lies mainly in relating awkward behaviour or rather verbal performance & expression to disguise. As the bourgeois is basically devoid of ideology, he utters words which correspond neither to thought nor to belief. Words under the cloak of impersonality impress others & can serve as weapons in constant, yet often undeclared belligerency, so characteristic of the bourgeois who is even too cowardly to pledge allegiance to his own ‘bourgeoisisme’. If questioned, he would single out honor, wisdom & prestige as the values for which a bourgeois should strive, values scarcely anyone pursues with persistence. […]. Under that régime [the Third Republic], according to Jacob’s appraisal, key activities take the form of lawsuits where contentions, moral issues can be endlessly verbalized. Such verbal prowess guarantees safety & satisfaction to the speaker, for he reduces to an implicit position of weakness his opponent by the imposition of a court ordered silence. Jacob subtly reveals that the bourgeois is an eternal parrot & a poor imitator at that. - […] he deflates by means of seemingly unchecked abundance of words, by applying in an overtly unsuitable manner borrowed patterns. & by these linguistic devices, Jacob focuses on the most important bourgeois activity: speech. – 42. Corneille’s heroes dwell eternally in the bourgeois mind which will always find ways of translating a commonplace or even sordid event into a spectacular deed.»
«NOTA BENE. – Nota bene très important pour toute la suite du Tab.B. Ce livre n’est pas un recueil d’historiettes. Ce livre est le spicilège des espèces bougeoises. Dans ce livre il n’y a pas de photographies encadrées avec ressemblance garantie, il y a des races figurées par la particularités de la race.»
LE CABINET NOIR
AGUEDAL no. spéc. (1939): 130. Daniel Rops. «Souvenirs napolitains.» «Le CN m’a toujours paru une mine énorme de faits, de notations, de ces vices & de ces médiocrités qui sont la trame ordinaire de vies humaines; ceux-là seuls n’y voient qu’ironie qui croient aussi que Daumier est seulement un ironiste.»
BEGUIN, ALBERT. Poésie de la présence. Seuil, 1957. 282. «Ce don qu’il avait de saisir le langage des hommes & d’en reproduire avec un comique souvent inquiétant, les banalités, les manies & les aveux inconscients, n’était nullement un talent accessoire. Jusque dans ses ‘Conseils’ […] on le voit justifier ces exercices d’imitation verbale & ce souci d’observation quotidienne. ‘Ne méprisez pas du tout les cancans – les récits sur les actions d’autrui. Ecoutez-les comme un juge d’instruction ou un commissaire de police… Il est essentiel de connaître les hommes – c’est une bonne manière de lutter contre l’esprit mathématique, cet esprit anti-chrétien & anti-intelligent.»
BELAVAL. C’était il y a 30 ans. 17. «Les dévoreurs de magazines, de télévision, de politique souveraine comprendront-ils un esprit qui brillait au temps des revues, de la vision proche, de la littérature souveraine? Si l’uniformité triomphe, s’intéressera-t-on à la diversité des petites gens, des guinguettes, du marchand de bois, des ‘caractères’ de la ‘belle époque’? Comment lire les lettres du CN quand on ne s’écrira plus de lettres? »
A BEALU ENVOI. DV. 54. «Le résumé de mon expérience de l’humanité en 1921 » ; MJ dans ses livres. Op. cit. 32 no 66; Bibliographie de M.J., 128.
BLACK, MOISHE. «Mothers & Sons by M.J.» «Full of sympathetic but unsentimental insights into human behavior, Jacob’s prose is witty, whimsical, wise & worthwhile. One of his favorite themes is the interference by mothers in their sons’ marriages – before, during & after! That theme links my two selections from Jacob’s Le Cabinet Noir – The Dark Room, a book comprised of fictional letters followed in some cases by narrator’s comments. Since letters are normally written in the first person, Jacob has a chance to display his special strength: the ability to get into the skin of each fictional character & express the world from that person’s point of view, in that person’s tone & language. Each correspondent in turn claims our awareness, & even our acceptance, because each is being utterly himself or herself, & yet not one is admirable . Jacob intuitively understands, damningly reveals and – surprisingly – does not comdemn.» The French American Review 64 :1 (Spring, 1993): 22-32 [22].
CADOU. «La Vie du poème.» Op. cit. 143. «Max connaissait tout le monde, […] non pas de l’extérieur, mais du dedans, & davantage par sympathie que par effraction.» M.J. écrivit à Cadou le 28 janv. 1941: ‘[…] le C & CN sont uniquement des études de caractères qui se tracent eux-mêmes par les mots qu’ils emploient. Uniquement.’ – P. 144. «M.J. ne s’intéressait qu’aux sentiments humains, aux tics de la face, aux gestes non équivoques, risibles sans doute, mais tellement pleins de vérité sous le masque. [Dans le CN], lettres inventées, […] mais vraies, terriblement plus vraies que les vraies lettres, avec cette ironie si proche des larmes. […]. » 145. M.J. écrit à Cadou le 11 fév. 1941. ‘je suis dans la mère Gagelin & il est bien possible qu’elle soit extériorisée, plusieurs en parlent comme d’une dame existante.’
A CADOU. GERMAIN, ALAIN. «R.G. Cadou ‘en liaison avec Max’.» Coll. de Quimper. 289. ‘Je conclus que l’émotion artistique est l’effet d’une activité pensante vers une activité pensée’, « écrit Max, mais nuance à la p. suivante.» ‘Je me sers du mot ‘pensante’ à regret car je suis conavaincu que l’émotion artistique cesse où l’analyse & la pensée interviennent. ‘- A Cadou 15 mars 1940. ‘n’aie pas peur de perdre l’émotion. L’émotion est en nous: elle se trahit toujours.’
CASSOU. «M.J. & la parole.» C’était il y a 30 ans. 21. «Dans les lettres du CN il y a des mots à vous faire mourir de rire, d’autres à vous déchirer le cœur.»
GARNIER, FRANCOIS. Europe no. spéc. 40. «M.J. s’était astreint à la collecte des idées, des sentiments, des vocabulaires, en fonction des types astrologiques de leurs sujets. Il classait les l. qu’il recevait d’après la date de naissance de leur auteur. Des constantes de pensée & d’expression s’inscrivaient dans les épais dossiers. Il y avait là une source de types humains & des styles qui leur conviennent. Quiconque a connu M.J. a pu voir, jusque sur les murs de sa chambre, en hautes colonnes d’une écriture serrée, des adjectifs, des substantifs, des verbes qui correspondent sans doute aux mots qu’emploient de préférence certains êtres en vertu du signe sous lequel ils sont nés. – 41. Cette technique particulière [dictionnaire astrologique] mise au service du réalisme psychologique se retrouvera dans la construction & le style de l’opéra-bouffe (Isabelle & Pantalon).»
GARREAU, ALBERT. Op. cit. 113. «Le meilleur recueil de caractères ou de portraits de Max, petites gens & bourgeois poussés à la caricature, sauf pour les Bretons, auxquelles il voue sa tendresse & qu’il peint avec leur langage, leurs naïvetés, leur religion, avec ce don de mimétisme clownesque & attendri qui est sa note la plus personnelle. ‘J’ai toujours eu la conviction qu’il n’y a d’autres vérités des caractères humains que les vérités astrologiques.’ […] il établit un dictionnaire de 36 caractères, avec les mots, le vocabulaire que chacun emploie. Heureusement, dès que la verve, l’inspiration, le poussent, il oublie sa théorie. Railler le faux sérieux, les comédies des gens sans cœur, l’érudition absurde & même la petite fleur bleue des petites gens. N’est-ce pas salutaire? »
GERARD, FRANCIS. C.r. du CN rééd. in Soc. d’étude du XXe s. L’Œuf dur. J.-M. Place, 1975. Cite M.J. in no. 2, 1979. ‘Quand Alphonse Daudet nous parle avec rondeur & jovialité, il veut se mettre à notre niveau: c’est vexant d’être pris pour un imbécile.’ «Au contraire, Anna Bourdin, Mme Veuve Gagelin, Octave Loiseau, parlent comme ils sont. M.J. n’apparaît pas, il les élève en liberté. On le sent simplement, au-dessus du théâtre, versant sur eux, qui nous amusent, sa douleur & sa pitié.»
LJRB, I. 145. 9 déc. 1912. «Les ‘Mémoires apocryphes’ [prem. titre] […] montrés à Fasquelle par le ‘Tailleur discret’ [Poiret]… est refusé par lui comme n’étant pas au niveau du public, ils ont été gardés par le généreux Mécène qui parle de les éditer lui-même & qui, je l’espère, les mettra en vente à côté des soieries. J’ai rendez-vous avec lui à ce sujet à Paris en janv. Il est nécessaire que ce ms. me fasse vivre en 1913… »
LTB, à MORICAND. 3 avr. 1941. 122. «[…] tu as tort de donner des explications au client. Il n’y comprend goutte & ça affaiblit tes données. Dis-leur, vous êtes ceci, vous êtes cela. On conseille aux médecins de ne diminuer leur autorité en donnant des tuyaux scientifiques au malade.»
MAX JACOB MIME LES LETTRES DU CN. (du23 mars au 13 avr. 1936) au Théâtre des Noctambules. Voir VM, 229.
PERARD. Op. cit. 71. ‘L’erreur seule est féconde ‘ - Pérard cite M.J. Elle fait ‘éclater la vérité, & l’erreur se refute d’elle-même. ‘ [Par l’art de l’ironiste ses paradoxes font éclater la vérité].
PFAU, op. cit. 34-38. L’expérience veut jouer le rôle de l’intelligence & révèle le prix payé pour l’expérience de la part de la personne qui offre son conseil. Quel est le prix ? Une vue étroite de la personne & sa résignation cynique. C’est évident surtout dans la ‘Lettre d’un employé’. – 41-43. ‘Conseils d’un médecin à un jeune confrère’ montre qu’un individu ne peut se servir de ses propres idées quand il veut résoudre un problème, car il faut qu’il accepte les solutions de la profession & assumer le rôle qu’il est forcé de jouer. On voit que la justification de l’individu donne l’impression d’une idéologie ce qui rend la pression exercée par la société plus acceptable. Il n’y a plus de rapports personnels authentiques, il faut tout le temps jouer un rôle. [Résumé M.G.].
POREL, JACQUES. C.r. du CN. Feuilles libres 4:28 (août-sept. 1922): 295. «L’ironie de M.J. est enthousiaste. Elle se mêle aux personnages, épouse leur existence, les orne sans les châtier, ‘marche à fond’, en leur faveur. La moquerie du CN recouvre une grande tendresse, celle d’un poète, une charité foncière, celle du catholicisme.»
CANDIDA QUI EST DEVENU CONSEILS A UN JEUNE POETE
BEALU. CJP. «Circonstances.» 9. Le 5 juill. 1941 M.J. écrit à Béalu. ‘Je ne sais ce que valent les conseils à J.E. [Jacques Evrard]. […] Je les ai écrits de tout cœur… Ils seront utiles à d’autres peut-être. C’est tout ce que je souhaite.’ Et treize jours plus tard: ‘Manoll veut imprimer le ‘texte à J.E.’ Je n’y consens qu’à demi & sans joie. C’est trop élémentaire pour les raffinés & trop raffiné pour les élémentaires.’ M. ‘Manoll avait voulu publier dans une coll. Des Poètes du Pain blanc, titre de la revue qui avait 2 numéros avant la guerre.’ (VM, 272, 273). Le prem. titre est Candida ‘ou, plus jacobien: Candida à un candidat. Léon-Paul Fargue écrira après la guerre […] ‘C’est dans ces pages que se trouve le sel.’»
LEJ, 56. St.-B. 8 mars 1937. TRAVAILLER SUR SOI-MEME. «Le seul travail qui compte est le travail sur SOI-MEME! Etablir avec fidélité un carnet de correspondance entre soi & l’objet extérieur (ou les gens) ah! voilà le vrai chaud travail. Tout travail qui n’est pas cela ou le résultat de cela est nul & non avenu. Temps perdu…’
LMM. 105. 7 mars 1942. «[…] je ne suis pas ennemi de la publication de Candida même sans signature, car ces quelques pages peuvent éclairer des lecteurs sur ce qui est la poésie [..].»
CHEMIN DE CROIX INFERNAL
Dessin de J.-M. Prassinos. Paris : G.L.M. 1936. Paru dans la coll. Repères dont il ne fut tiré que 70 ex. numérotés sur Normandy Vellum.
CHRONIQUE DES TEMPS HEROIQUES
CAT. MJ & P voir les détails à propos de la publication & beaucoup d’extr. Voir aussi LJF, 262. 10 juin 1936. «Ne me demande pas d’illustrer mon livre Gauillaume. Les ill. contraignent désagréablement l’imagination du lecteur & je me suis donné assez de peine pour lui laisser la corde ou la bride sur le col.»
LTB, A Moricand, 62. 5 déc. 1936. «J’ai à peu près fini le livre de Paul Guillaume. [Chron. des Temps Héroïques] il contient au moins une belle analyse de la couleur ‘signe d’eau’ de l’art des 30 dern. années; cubisme, Coctau, Modigliani, Chirico, scrutés comme époque d’art, rapidité, brièveté amour du trait, mystère.» Ibid à Briant 66. 26 janv. 1937. Cette préf. j’ai mis plus d’un an à la sculpter.»
LRV, 75. St.-B. 9 fév. 1937. «Je croyais t’avoir mis au courant de la question P. Guillaume. La veuve de ce marchand veut édifier à la mémoire de son époux un recueil d’appréciations sur les mérites de celui-ci lequel a beaucoup fait pour l’Art Nègre. […]. On a reconnu qu’il fallait à ce recueil une préf. sur l’époque 1905-1930 & on me l’a demandée. J’ai mis plus de 12 mois à la fignoler, mêlant des anecdotes à des considérations générales.»
«LE TIERS TRANSPORTE»
C’était la description légale de M.J. quand il a fait procès contre l’assurance pour une indemnité [après son accident survenu en 1919].
---. «Dans la vie, je suis le tiers transporté, disait M.J. J. Rousselot. «M.J.» Revue des Lettres (janv.-mars 1974): 38.
CINEMATOMA
ENVOI A BEALU. DV, 54 ; nlle éd. 88 ; M.J. dans ses livres. 25 no 40 ; Biblliographie de M.J., 129. «Exercice d’astrologie comparée avec la correspondance du vocabulaire & des astres. Etude dont je suis l’inventeur & l’unique exerciste. […]. J’avais trouvé depuis longtemps dans l’astrologie (ce que j’ai toujours pratiquée) les bases d’une classification des types humains… Je collectionnais – depuis longtemps – les lettres de mes amis dont je connaissais la date de naissance. Je les classais dans des dossiers, chacune sous son signe astrologique: & je m’astreignais à ne faire parler les héros du Cinématoma que strictement le langage de leur caractère astrologique.»
ENVOI A R.TOULOUSE. Rousselot, op. cit. 155 ; du même Mort ou survie du langage, op. cit. 151 ; Bibliographie de M.J., 129-30. «M’étant occupé du Zodiaque & des caractères des prédestinés astraux, m’étant persuadé que chacun des mots que nous employons révèle notre caractère, je fis une collection en 12 dossiers du vocabulaire des humains: je conservai les lettres des gens dont je connaissais la date de naissance, alors commença un travail géant qui consistait à ne mettre dans la bouche d’un personnage que les mots du dossier qui lui revenait.Voici le résultat de ce labeur! La-dessus on a déclaré que j’avais un don de mimétisme, de singe & d’acteur.»
EMIE. D. Nlle éd. 32. «Pour déceler le véritable visage du prosateur […], il suffit de lire incontinent C, son livre préféré, - son chef-d’œuvre avec le CN. Le prodigieux mimétisme qu’il avait hérité de sa race confère à ces deux ouvrages un accent quasi épique. Au surplus, l’écrivain possédait au suprême degré le don de la parodie, du pastiche & du l’humour. […] M.J. met en scène la faune innombrable & si étrangement burlesque de la Bourgeoisie française avec ses dynasties familiales qui vont du gros industriel au petit fonctionnaire besogneux. [Son] réalisme verbal […] consiste à situer & à faire revivre un personnage grâce à son langage, son vocabulaire, son lexique, son écriture, ses tics.»
LNF, 175. 5 août, 1940. «Le C ? – tiens! il y a donc encore quelque part un livre de moi? – un titre de moi? On dirait que tout cela n’a jamais existé [...].»
MJ/JC, 269. 30 avr. 1925. «Ma propre chère mère m’a dit froidement que Mme Gagelin était son portrait & celui d’une de nos parents. Elle m’a pardonné en silence comme les mères pardonnent » ; 270, n. 14. « Personnage de M.J. dans C (type de bourgeoise dure & sarcastique qui avait ‘la beauté du diable’.»
PJ, 232. «Une heure avec… » par F. Lefèvre. « […] mon livre préféré est le C où j’ai entrevu pour la prem. fois la division […] & où j’ai essayé le système de la révélation du caractère par le vocabulaire.»
LA COMPILATION DES COMPILATIONS DANS «LE PORTRAIT D’UN GRAND HOMME»
M.J. se moque de ceux qui n’ont aucune idée originale & produisent une compilation des compilations. Il en donne plusieurs ex. dans son œuvre.
ARAGON, LOUIS. «C. Max Jacob. Le Phanérogame.» Sic 4:40-41 (28 fév.- 15 mars 1919): «Un peu plus tard nous le retrouvons le professeur, qui professe le plus profond respect des idées générales d’autrui.»
«BIOGRAPHIE DU GRAND HOMME.» Prem. publ. Vogue (avr. 1948) ; Romanesques. Cahiers M.J. des Amis de M.J. 4. 1954-55. [Il s’agit de Charles Durand, l’auteur de la «Compilation des Compilations»].
TAB.B., 81. «On attribue au député Ballan-Goujard cet aphorisme: ‘Un orateur ne sait ce qu’il va dire, ce qu’il dit ni ce qu’il a dit.’»
UN ACADEMICIEN, UN ANCIEN MINISTRE M. Charles Durand a imprimé cette phrase dans le livre intitulé «La Compilation des Compilations.» Tab.B. 27-28. ‘Il y a des héros obscurs!’ S’il y en a, des héros obscurs! monsieur le ministre! dites qu’il y a dans la bourgeoisie 25 héros obscurs pour cent obscurs non héros. Il y a tant que je ne sais les faire remarquer! Il y en a de quoi remplir la mémoire de Dieu.»
LE CORNET A DES
ANDREU. «M.J. premiers poèmes.» Points & Contrepoints 110 (mars-avr. 1974): 39. L’opinion d’Apollinaire: «[…] dans ses conf. publiques, dans le combat qu’il mène, dans les années 1908-1910, pour l’Art Nouveau, Apollinaire le place, chaque fois, au prem. rang de la jeune poésie.»
AUTEUR DU CD seulement. Dunoyer. Monde no. spéc. 1976. «Max subit le sort des écrivains polyvalents dont un livre plus singulier occulte les autres. L’éclat du CD risque de faire oublier que son auteur a excellé dans pas mal d’autres genres. M.J. l’universel Joseph Pérard intitule ainsi son essai.»
---. RENE LACOTE pose la même question. Des années trente à quarante «M.J. était tenu à l’écart par les puissances du monde litt., il faut le dire parce que cela s’est oublié dans sa gloire posthume. […] des années trente à quarante M.J. n’était-il que l’auteur du CD, chef-d’œuvre trop récusé, pour pouvoir être tout à fait récusé & dont nous avons tous acheté en solde sur les quais la petite éd. Stock à 20 sous! »
---. ROGER LANNES. «Max Jacob.» Arts, op. cit. «Enfin M.J. était purement & simplement oublié pendant sept ans. […] les zones littéraires de la capitale l’avaient toutes unanimement rangé parmi les ombres. Avant même la parution de AP, Stock aurait dû sortir une éd. très abrégée du CD […]par F. Fels qui dirigeait la petite coll. des Contemporains, Gabory avait écrit une charmante préf. […] cette éd. ne comptait que 29 p. […]. Elle comportait 2 p., figurant dans le CD de 1917: ‘Le facteur de Van Gogh’ & ‘Indifférence de la nature’ que nous ne retrouverons pas dans l’éd. de 1923 & 6 p. nouv., pas des meilleurs – ‘Médecine’, ‘Préexistence des formes’, ‘Réconciliation’, ‘A la porte de l’hôtel’, ‘Adolescences’, ‘Education laïque’ – que M.J. supprimera également […] en 1923. Rapidement Stock remplacera cette éd. par l’éd. définitive [...].» VM, 150.
«AVEC PLUS D’HUMOUR QU’IRONIE – car l’ironie vous dessèche & dessèche la victime – M.J. aime donner la parole aux autres. Dans le CD, tout le monde parle: le chef des cuisines, la maîtresse du roi, le père & la mère du poète, la femme du dompteur, Hippolyte Taine, un enfant en costume marin, un prof. de grec, etc. Des phrases détachées des conversations quotidiennes & replacées dans un contexte inattendu, des assemblages plus ou moins baroques de propos divers ou le conventionnel se mêle au débridé contribuant à dépayser le lecteur sans lui faire perdre contact avec la terre.» Rev. de l’Assoc. Corp. Intersyndicale de la librairie & d’Ed. du Corps Enseignants 66 (sept.-oct. 1976): 20.
BELAVAL. Op. cit. 109. «[…] il a écrit le CD aussi loin de l’adolescence que du lourd démon de midi: de 30 à 40 ans. – D’où cet autre trait dominant de la poésie jacobienne: l’humour.»
---. 82-83. «L’HUMOUR IMPLIQUE INCOHERENCE parce qu’il disproportionne le ton à l’importance du sujet, met au prem. plan l’accessoire, fait attendre ce qui ne vient pas & venir ce qu’on n’attend pas. – L’incohérence – prosaïque, bien entendu – ne commence guère qu’avec le récit-feuilleton. Encore faut-il prendre garde: elle tient moins à l’ordonnance du récit qu’à l’isolement d’une scène. Ces personnages, qui sont-ils, & d’où viennent-ils? A nous de deviner! C’est la page arrachée du livre.» [Selon Belaval d’effets poétiques extraordinaires peuvent être tirés de cet isolement. Technique: 1. longueur, 2. isolement, 3. l’humour].
---. «[…] LA POESIE ETAIT EN TOUT, & principalement dans les histoires de concierge: mais il fallait l’en retirer.»
---. «’L’ENFANT, L’EFANT, éléphant, la grenouille & la pomme sautée’ que Belaval a reproduite dans Recherche de la poésie (Gallimard). Il choisit un p. dépourvu de sens manifeste & l’analyse d’une manière créative & nous convainc que sous l’aspect de l’incohérence, sous l’allure du coq-à-l’âne, se regroupent & s’harmonisent les éléments du poème. – S’il n’y avait point de logique, il n’y aurait pas de poésie.» - 42. M.J. répond: «Bravo pour l’analyse qui est excellente. Je n’avais pas pensé à tout cela, mais mon inconscient y avait pensé pour toi, pour moi… »
---. 80. LA LONGUEUR DES POEMES. «Certains tiennent en une ligne; d’autres emplissent une page. Aucun n’atteint les dimensions d’une Ode de Claudel ou d’un texte surréaliste. – 81. il s’agit pour lui d’une Forme, aussi immédiate que possible, qui n’ait pas à se structurer dans le recul de la mémoire. […]. Fidèle à sa méthode de la Forme simple qui force le prem. regard.»
---. IMAGES. 96. Belaval analyse les images litt. du CD qui portent trace de l’effort de comparaison ou, du moins, de la complaisance à la comparaison. ‘Mur de briques, bibliothèque!’ – 100. «Il remarque les images lorsque le peintre en M.J. inspire le poète. Ses p. se présentent souvent comme descriptions de tableaux: ‘en haut… en bas… à droite… à gauche.’ Les grandeurs sont notées… & les couleurs précisées avec soin ‘un mouchoir couleur d’orange mûre… »
---. 108. «Le CD est fidèle à la sensibilité & le décor de son époque. Son style sait tirer parti de l’atmosphère du journal, sa composition évoque parfois les collages de Picasso ou préfigure les montages de Max Ernst, les gags de cinéma, les images de l’Age d’Or.»
Belaval. PREF. LC. 26. «Dans le CD, le p. est en prose, bref, ramassé sur une image, un mot, une anecdote. (Les Fantômas, Le Bazar de la Charité, etc.) – bien que, contre Aloysius Bertrand on ait voulu bannir le sujet & le descriptif pittoresque pour se préoccuper uniquement de l’unité de ton & de l’emploi poétique du langage. (AP, 66) – &, dirions-nous pour résumer, c’est un hieroglyphe verbal.»
---. 27-28. «IL PREFERE QU’ON LE RAPPROCHE DE LAFORGUE, de Verlaine, de Tristan Corbière surtout: «Je vais te confier une chose: c’est le seul qui m’ait réellement influencé.» (B. p. 80). On le place souvent dans la lignée des ‘fantaisistes’. Pourquoi pas? Fantaisistes? - : ceux qui refusent de forcer le ton, qui ont assez d’humour, de modestie, de sérieux, de respect de la poésie pour ne pas l’enfler de pathos. […]. Par suite, M.J. situe toute la litt.- & la sienne – dans l’ensemble de notre vie. Il apprécie le littérateur & l’artiste: mais il y a aussi l’avocat, l’abbé, le concierge, la demoiselle prof. au lycée […], le conseiller municipal, le policier, le marin, le maroquinier, l’employé de l’entrepôt Voltaire, tous les personnages de ses romans, du C, du CN.»
BENS, JACQUES. «La poésie saisie par le revers.» Op. cit. 7. Bens affirme qu’il y a une «ambiguïté que M.J. affirme & contrôle entre le coup de dès & la préexistence (soigneusement établie) du dé dont il se sert. La poésie n’est […] ni tout à fait du hasard, ni tout à fait du calcul, mais un mélange bien particulier, dont les proportions définissent chaque poète.»
CABANNE. LE SIECLE DE PICASSO. Op. cit. 204. «M.J.[…] reçoit chez lui, 7 rue Ravignan – un galetas misérable au fond d’une cour, avec une minuscule fenêtre, & un sommier surélevé par 4 briques en guise de lit – le lundi. Cette modeste ouverture n’éclairant pas la pièce, il faut que, toute la journée, une énorme lampe à pétrole, comme celle dont on se sert dans les gares, demeure allumée. Max peint des gouaches, des sépias, & écrit des poèmes ‘ivre de jeûne, de méditation & de fatigue’.»
CALAS, ANDRE. «Les deux visages de M.J.»36. «Le CD est rempli de ces trouvailles: ‘Un incendie est une rose sur la queue ouverte d’un paon.’ ‘Elle est si lasse que les paupières des renoncules se ferment sur son chapeau’.» [Publié où?].
CASSOU, JEAN. «M.J. & la liberté.» Op. cit. 459-60. «[…] il s’agit d’un enivrement aussi puissant que celui du sublime & qu’on pourrait appeler l’enivrement de l’universelle niaiserie […]. Cette simplicité est un charme de plus, & tout ceci fait de M.J. le Picasso de la poésie. […]. Il y a un plaisir physique à manier un petit livre tel que le CD comme on caresserait la crosse d’un revolver » ; cette dern. phrase citée in Cadou. «La Vie du poème.» Op. cit. 137. 136. «En 1917, Matorel, Saint-Matorel, redevenu M.J, & pour toujours, renversa sur le marbre d’un petit imprimeur de province tout le contenu d’un CD.»
«CD que je devais éditer à dix mille exemplaires, vendu 20 sous, petit livre de poche vite épuisé.» L’article de F. Fels. Belles-Lettres 92 :2 (1967): 4.
CD. Préf. de 1916. Gallimard, 13e éd. 1945. 13-18.
CD CONCERNE ENCORE AUJOURD’HUI LES POETES. Bens, op. cit. 7. «Si le CD nous concerne toujours, c’est parce qu’il agite, avant d’en révéler un aspect inattendu, les petits osselets du dénommé M.J. […]. J’avais le sentiment, quand je le lisais adolescent, que M.J. prenait la réalité à revers. J’aimerais mieux dire aujourd’hui: par les revers… la réalité n’y manque pas.»
CD DANS LE ROMAN DE QUENEAU. LJF, 266. «Encouragé par les pages 103, 104 & 105 du roman des Derniers Jours de Queneau où celui-ci monte le Cornet sur un trône. Ce que voyant le sabotier du pays mon ami a dit: ‘Y s’fout de toi ton copain, tu vois pas ?’»
CD, ŒUVRE CUBISTE. Maurice Mourier. «Max joue aux cubes.» Op. cit. 92. «C’est un ensemble du plus bel effet cubiste, à bien des égards, que le CD, à condition que l’on accepte d’appliquer d’abord à son déchiffrement les critères élémentaires […] que nous nous sommes essayés à définir: l’œil cubiste constate que le monde a désormais perdu son galbe, ses lignes fluides, sa cohérence, qu’il est peu ou prou pulvérisé. – 97. M.J. s’éloigne irrésistiblement du cubisme, toujours ouvert sur la lumière, celle du ciel moins souvent que la clarté pure qui emplit le monde des idées.»
CD SE VEND CHER EN 1943.A Moricand. LTB, 142. 18 août 1943. «En ce moment les libraires-bibliophiles vendent 700 francs le CD & 1500 francs tel autres exemplaires.»
COURNOT, MICHEL. «La pensée créatrice dans le CD.» Fontaine (1945): 744. «Nous n’avons rien compris, mais dans le secret d’un univers clos, respirant une atmosphère indéfinissable, secoués par les conflagrations de la pensée créatrice, nous avons vécu, ne fût-ce qu’un instant, l’acte esthétique pur.»
DECAUDIN, M. «Trois poètes…». Op. cit. 227. «Chacun de ces courts p. suscite un petit monde de fantaisie refermé sur lui-même & fascinant par sa seule existence, pur, du moins en apparence, de toute rhétorique & de tout artifice dans sa concision qui cerne le mot ou l’image. Se référant à l’anecdote & au support de réalité qu’on y trouve toujours, M. Béalu les a joliment définis comme des romans-gouttes. [In Pour en revenir…] par opposition aux romans-fleuves – gouttes qu’on dirait de mercure, à la fois compactes & insaisissables. […] M.J. est paysage animé, tout en mouvement & en incitations. […]. Le CD représente un point d’équilibre dans les jeux de l’écriture & de l’imaginaire, & M.J. ne cessera d’écrire des p. en prose de ce genre. Mais les deux qualités par lesquelles il définit l’œuvre d’art, le style & la ‘situation’, c’est-à-dire l’émotion, prennent souvent ailleurs plus de couleur & de relief. De ses prem. ouvrages, publiés en 1911 & 1912, on dégage sans peine déjà les sollicitations profondes, tant morales qu’esthétiques qui animeront sa poésie.»
DEFORMATION DE L’ŒUVRE PAR L’ETUDE PARTIELLE. M. Cournot. Fontaine (1955): 744. «M.J. a dit: ‘Je veux que vous le lisiez non pas longtemps, mais souvent.’ […]. L’ensemble de sa nature & de son œuvre se trouve nécessairement déformé par une étude aussi partielle.» [C’est-à-dire en étudiant seulement le CD].
DUNOYER. Monde, no. spéc. 1976. 11. «J. de Palacio inscrit à l’actif du CD, ‘vaste entreprise de démystification’,dans la RLM 1973 (série M.J. 1) consacrée sous sa dir. à l’approfondissement analytique de cet ouvrage capital.»
GABORY, G. Op. cit. 26. «Après la sortie du CD la foule des jeunes poètes avait envahi la rue Gabrielle. Les nouveaux étaient nombreux. La petite chambre de la rue Gabrielle devenait le Grand Central Poétique du siècle ou du moment, le rendez-vous de toute une génération qui cherchait ‘le lieu & la formule’. Où ai-je rencontré Radiguet, Artaud, Malraux, P. Pia, […] F. Fels & Tutti Quanti ce qui ne convient guère à oublier Aragon.» VM, 114
--- a dit qu’il [CD] était: «le plus riche écrin de sensations curieuses, d’images neuves, d’impressions inconnues, une des plus singulières & des plus belles expressions poétiques de ce temps.» Cité par Villard. «M.J. à Quimper : Hist. d’une classe de lycée.» Op. cit. 86.
GUICHARD-MEILI, JEAN. «M.J. devin de lui-même.» NRF 283 (juill. 1976): 82. M.J. prédit la guerre. ‘Les boulevards extérieurs, la nuit, sont pleins de neige.’ «Evidence de cette phrase liminaire du CD, naguère (jadis) pour un j. homme de 20-22 ans. Evidence comparable à celle, par ex : de ‘A la fin tu es las de ce monde ancien’ […] quelque 30 ans plus tard, l’évidence demeure. Cette nuit qui transcende tout hiver & ne se soucie pas plus de ‘périphériques’ ou des fortifs de la Belle Epoque situe d’emblée l’angoisse fondamentale dans les ténèbres humaines & le cauchemar éternel. Ce texte s’intitule […] ‘La Guerre’ & l’auteur vient de prévenir, en un avis laconique au seuil du livre: ‘Les poèmes qui font allusion à la guerre ont été écrits vers 1909 & peuvent être dits prophétiques. Il n’ont pas l’accent que nos douleurs [...].»
GUIETTE. Op. cit. 130. L’ART DE LA DECEPTION. «Les p. en prose sont nés de tous les exercices de l’esprit & de la sensibilité qui amenèrent le poète à ce qu’il y a d’essentiel dans son œuvre lyrique. […]. Il a découvert l’utilisation poétique du calembour, du coq-à-l’âne & de la contrepèterie. Son inquiétude, son imagination, sa gaieté lui ont fait tout naturellement introduire dans les lettres ce qu’on pourrait appeler l’émotion drôle, une certaine nuance d’humour qui n’est que de la poésie. L’une des formes de cet humour est ‘l’art de déception’. Max le définit: ‘L’art de la déception. Lisez le CD! On commençait une histoire qu’on laissait inachevée, on menait le lecteur de glissements en glissements jusqu’au néant: On paraissait ne donner aucun sens aux poèmes, on accumulait des mots sans suite, on débutait gravement pour tourner dans un calembour, on simulait de hautes vues sur le Cosmos avec un éclat de rire dans la bouche. L’art de la déception était celui du glissando, de l’abroutissement des autres, de la gratuité, de la légèreté, l’art de laisser l’intelligence en panne comme m’écrit un jeune homme de seize ans.»
HUMEAU, EDMOND. «Un autre regard sur le CD. » Pour en revenir à M.J. 38. «On ne s‘étonnera point […] que M.J. ne se reconnaisse comme devancier qu’Aloysius Bertrand & Marcel Schwob, avec de nombreuses réticences d’ailleurs.» - 39. Humeau parle d’une dimension qu’il trouve étonnante dans le CD & qu’il appelleune ‘opération nucléante sur le langage’. «Précisant toutefois que cette opération ne porte point sur les mots mais bien sur le langage qui associe des fragments de phrase en une certaine syntaxe, la nucléisation se présente comme l’exercice naturel d’une libération d’énergie à travers les structures du discours & je dis que cette soudaine libération s’accomplit à la manière d’une mutation qui fait, d’une partie de cartes, le signe universel d’un salut; d’un quatre-cent-vingt-et-un sur le comptoir, le roulement des dés de l’histoire; de la banalité, un bien précieux; de l’abstrait un figuré, la divine apparition & de l’ordure quotidienne & lassante, un fameux bijou forcément indiscret.»
LACHGAR, LINA. Op. cit. 19. MISS HASTINGS & LE TITRE DU CD. «Oh! quel titre! disait miss Hastings, […] en Angleterre, vous le savez, on vous le volerait avant la parution du livre!»
LEAUTAUD, PAUL. LE PORTR. DE F. FELS & STOCK. Journal litt. IV. 1957. 27 déc. 1922. 105. «La Librairie Stock publie une petite collection à 1 franc Les Contemporains, œuvres & portr. du XXe s. p. – 111. 6 janv. 1923. «La conversation, [de F. Fels], le jeu de la physionomie, le ton, l’abandon mis dans les paroles, il est au contraire fort sympathique & paraît fort intelligent. Il s’occupe beaucoup d’art, surtout d’art, je crois, ouvrages d’art avec des reproductions & expo. de peintres fr. en Allemagne. Il me dit être le petit-fils de Thédore Duret, qui a écrit des ouvrages sur Manet. Il est très lié avec Suarès.»
LEFEVRE F. «Un entretien avec M.J…. » Op. cit. COCTEAU A PROPOS DU CD. «Avec le CD on touche une bête: la poésie. Avant on l’apprivoisait, on l’approchait, on ne la touchait pas encore.»
LEIRIS, MICHEL. Poèmes écrits dans le CD, ce n’est pas de la poésie orale. «Saint Matorel, romancier & moraliste.» Cahs. Litt. 7:2 (11-24 oct. 1968): 28-29. « […] M.J. [y] réunissait des p. en prose, genre qu’il a porté à son plus haut point de perfection & qui apparaît, dans l’ensemble de son oeuvre, comme le type même de la poésie écrite, distincte des formes très variées de poésie orale qu’il a pratiquées par ailleurs, & dans laquelle sont laissées de côté les ressources sonores diverses qui tendant à faire du poème un chant.»
L. INED. A ANDRE SALMON. Coll. Adéma. «J’ai accepté l’offre de Fels pour une éd. bon marché de Morceaux choisis du Cornet. C’est intéressant! comme on dit dans les affaires.»
LJRB. II. 143. 29 sept. [1914], 19 mars 1918. «Je t’envoie mon livre le CD qui a eu un certain succès financier. […]. Je lis beaucoup de vers & je m’aperçois que je me croyais poète à tort. J’ai recopié étiquetté, collationné mes ms., travail assez considérable que j’ai mené à Enghien dans les jardins du Casino & chez les amis où j’étais en pension au milieu des légumes de leur enclos & des cris de leurs enfants. [300 poèmes]»; 150. [mars 1919]. «Tant que je n’aurai pas ma photo dans les magazines & les illustrés. Je ne serai pas heureux. Le CD est une œuvre charmante & je t’enverrai Phanérogame. Mais je voudrais mes longs cheveux, ma Lavallière à pois & mon binocle dans l’Illustration à la p. des jeunes écrivains entre Pierre Benoist & Duhamel. Je trouverai bien une photo de moi à 20 ans chez une de mes bonnes amies de l’époque! »
L. A LEONARDI, 11 juill. 1923. Rev. Des Belles Lettres 92:2 (1967): 15. «J’ai reçu une l. de Fels, il s’agit de republier un vieux livre de moi: c’est quelque cent francs qui vont rentrer: bravo! »
LRV, 13. CAH. DES MAXIMES SOURCE DU CD. «Le ‘Cah. des Maximes’ […] a été surtout la source première d’où a jailli ce fameux CD.»
LITTLE, ROGER. Order & Adventure in Post-romantic French Poetry. Op. cit. 246. «M.J. finds one of his word paintings so real that he dashes to the rescue of a child in imminent danger, a willing fool of his own illusion » ; note 7. p. 254. «CD.‘Le fond du tableau.’ «Etienne Souriau recalls a very similar Chinese anecdote & discusses Segalen’s Peintures in this vein in La Poésie fr. & la peinture. »London, 1966. 42-43.
MAURIAC, CLAUDE. LE CD :LIVRE MOTEUR. «Les vies parallèles de M.J.» Preuves 4135 (janv. 1954): 82. «G. Gabory avait pu y voir un des livres moteurs de notre temps.»
PALACIO. «Post mortem.» C’était il y a 30 ans. No spéc. 51. «L’enterrement avait déjà eu lieu la veille mais il fallut le recommencer pour une erreur de parcours.» Ainsi débute un p. du CD.» [C’est presque ce qui est arrivé à l’enterrement de M.J.].
---. RESUME DES SOURCES DU CD. RLM no. spéc. 1. Liminaire. 5. Palacio y envisage «l’art du p. en prose à partir de modèles illustres, avoués ou récusés, Aloysius Bertrand & Ch. Baudelaire.»
---. ---. LES SOURCES DES P. EN PROSE DE M.J. «La postérité du Gaspard… » 162-63. «Mais si les procédés d’écriture du CD - ‘toucher terre partout avec les mots concrets & aussi par l’Esprit’ (Note 14) semblent proprement jacobiens, la présence dans le recueil des deux grands précurseurs n’en demeure pas moins évidente malgré tous les déguisements & les métamorphoses. Il faut en effet préciser que, alors même qu’il les dénigre & qu’il les parodie, M.J., pour reprendre un de ses vocables de prédilection, se situe par rapport à Bertrand & à Baudelaire: la Préf. de 1916, la conclusion de AP le prouvent assez. – 163. La plupart du temps […] M.J. transpose ou masque ses ‘emprunts’ de telle façon qu’ils deviennent quasiment méconnaissables, rendant toujours fragiles les indices que l’on serait tenté de relever.» Et Palacio confronte les p. en prose de 3 auteurs. – 170. «Le CD pourrait être considéré […] comme un anti-Gaspard de la Nuit. Lorsque M.J. reprend les thèmes, les titres & jusqu’aux tournures de son prédécesseur, il entend du même coup donner sa propre version, & une version moderne, de sujets en apparence déjà éprouvés. Puisque la modernité baudelairienne n’était que le masque de la tradition, & que celle du Gaspard se réduisait somme toute à ce que M.J dénommait avec dédain, dans une l. inéd. à Carco: ‘des lyres? des vasques & tout le décrochez moi ça des brocanteurs de muses ?’, la modernité jacobienne devait être autre chose, ‘une primeur’, confiait-il à A. Messiaen, ‘un mariage de l’anecdote réaliste humaine avec plusieurs sous-garde du haut lyrisme.’ (Note 30). – 157. C’est le destin ingrat du Gaspard de la Nuit d’être trop fréquemment invoqué presque à contre cœur par les écrivains qui, de près ou de loin, vinrent dans son sillage. De Baudelaire à M.J., tous se sont généralement montrés soucieux de prendre leur distance par rapport à ‘cet Aloysius Bertrand’ […]. 182. M.J. a beau protesté qu’il écrit au hasard, rien de plus concerté que le p. en prose du CD, & la syntaxe narrative, pour être illogique, n’en est pas moins rigoureuse. C’est ce caractère qui distingue M.J. de Dada, dont il semble parfois si proche, & du poème-découpage dont Tzara avait donné la recette & l’exemple. Le CD peut être à la fois du côté de la gratuité & de l’ordre.» [Voir aussi Pelletier. «Le ms. du CD », Cadou & Rousselot à propos du CD].- 183. «L’apparent paradoxe du p. en prose jacobien, c’est que, tout en se proclamant ‘séparé du vrai’ (note 60), il opte du même coup pour le parti pris des choses. – 184. Ces formes, ’il n’était pas suffisant de les chercher autour de soi, dans la vie de tous les jours & non dans un pays de Cocagne: il fallait encore ‘communier avec les objets, les faits, la vulgarité & la cuisine’ mais non à la façon de Baudelaire,’ ‘comme une splendide orfèvrerie, comme une bijouterie bariolée’; cuisine celle-ci, ‘éclairée au gaz’ , ayant devant sa table, ‘un évêque en surplis de dentelles, pouvant recéler un monceau d’ustensiles mal cachés par un drap sale’ & dont le chef , enfin, se nomme Fantômas’.»
PELLETIER, CH. «Le ms. du CD.» Information Litt. 5 (nov.-déc. 1974): 228 Après avoir soigneusement examiné le ms du CD, lu les pièces supprimées, les vers rayés, & toutes les corrections relevées sur le ms., Pelletier conclut que «M.J. n’est pas seulement un jongleur du verbe & un acrobate du langage. Il utilise les ressources du style au service de l’expression de la réalité (en ce qu’elle a de plus prosaïquement quotidien ou individuel). – La considération du ms du CD révèle sans discussion possible les hésitations, les remords, les renoncements qui assaillirent le poète. Il sait élaguer, modifier, imposant par là même à ses textes le masque de l’art. C’est pourquoi il est subversif tout en demeurant jovial, ludique & en même temps réaliste. – Une note explicative de la main du poète révèle la transfiguration de la réalité dans ses p. en prose. Par ex.où le poète n’arrive pas à se faire imprimer, il écrit dans ‘Véritable poème’ (p. 197) ‘Et moi je restai comme un petit enfant, mes fleurs dans les mains sur les marches de l’escalier qui se perd.’ Le p. ‘suggère de délicates scènes d’enfance’ qui deviennent ‘l’écho transfiguré de ses difficultés littéraires’, puisqu’il ajoute une note explicative sur le ms: ‘Ce poème signifie que je ne trouve pas d’éditeur.’ – 226-27. «Les p. du CD furent écrits entre 1905-16 par un Jacob vivant intensément une période de bohème parisienne. Il ne datait pas souvent ses textes, jetés sur des bouts de mauvais papier entassé au fur & à mesure dans une vieille malle qui le suivait dans ses nombreux logements successifs. Jacob réunit enfin ses liasses & le CD, publié à compte d’auteur paraît à la fin de 1917. – La BLJD possède des textes, malheureusement non datés, dont on apprend qu’ils furent adressés à G. Apollinaire. Certains constituent une prem. version des pièces du recueil. […]. Ces documents ne permettent guère de dater plus précisément les p., mais il révèlent que J. ne se contentait pas de la fugitive inspiration de l’instant, de l’apport du rêve ou de la vision hypnagogique à l’état brut, mais qu’il travaillait beaucoup ses textes certains étant remaniés pendant de longs mois.»
---. «UN ECRIVAIN SANS PURGATOIRE.» Monde no spéc. 12. M.J. N’EST PAS SEULEMENT UN JONGLEUR DU VERBE & UN ACROBATE DU LANGAGE. «Il sait voir & écouter. Il puise son inspiration dans ce que la vie a de plus authentique & en retour, il nous livre souvent celle-ci au sein même d’une invention ludique.»
---. ---. LE REEL DANS LA POESIE DE M.J. IL EST UN FUNAMBULE AU RAS DU SOL. «Son système poétique ne l’éloigne qu’en apparence du réel. (Cf. la critique d’Emile Henriot) dans la mesure même où il nous livre la nature profonde de celui-ci. Si M.J. fut un funambule, il fut sans conteste un funambule au ras du sol. C’est cela qui est remarquable.» [Cf. Hélène Henry. «M.J. & Quimper», elle cite cette expression de Henry Hertz].
PERARD. Op. cit.. 11. LA REVOLUTION DE PALAIS DE M.J. Il le cite. «Ce que j’ai fait ne me plaît plus, je m’ennuie à répéter la même chose.» Il lui disait encore: «nous ne valons que par nos révolutions de palais.»
PEYRE, op. cit. 43. SELON R. SECRETAIN, LE CD «constitue un bréviaire esthétique. 44. Son esth. consciente & volontaire était une rupture avec la litt. solennelle. A cet égard, M.J. était un révolutionnaire & un iconoclaste. Il désacadémisait tout: la littérature & la vie. Mais sa complexité même le rend difficile à cerner.»
PUDLOWSKI, GILLES. «Un maître en poésie.» Quotidien de Paris (25 oct. 1976): 16. «C’est dans le CD (rééd. en poche chez Gallimard) qu’on retrouve sa quintessence poétique. Les portraits y côtoient les bribes échappées à la mémoire. Les calembours, les formules à tiroir, le coq-à-l’âne y font bon ménage avec les états d’âme, les descriptions brumeuses ou la réalité la plus plate aussitôt contestée. On devine assez que les surréalistes puisèrent dans ce livre fourre-tout où Max écrivit par ex. ‘Un incendie est une rose sur la queue ouverte d’un paon.’ – S’ils y trouvèrent riche pâture, si Prévert, Queneau & d’autres se souvinrent de ce prince de la dérision publiant à compte d’auteur en 1917 son œuvre majeure, ils ne furent pas les seuls. Nombreux furent […] les poètes qui revinrent aux sources pluriformes du grand Max.»
ROUSSELOT. VIE & LANGAGE. Article II. (sept. 1974): 483. «En vérité, dans tous les p. de M.J., il y a le concours d’une foule de vocations: l’humoristique, l’acrobatique, la mélodique, la macaronique, la lyrique, sans oublier la folklorique, qui nourrira les p. de la Côte.» - 485-87. «L’unité de la méthode jacobienne est tout à fait évidente quand on met en regard tels p.du CD ou du LC bourrés d’éléments narratifs quand ils ne sont pas des romans miniaturisés [cf. Béalu: romans-gouttes], & tels passages de ses romans, bourrés de poésie, de poésie familière, baroque ou délirante. Ce qui change, c’est le rythme &, pourrait-on dire, le ‘grain’ de la diction. Le principe reste le même: ne jamais donner l’impression que l’on écrit, mais celle que l’on parle & que l’on invente en parlant.»
---. Article I. (août 1974): 439. «Le CD […] une réponse optimiste, sinon un défi, au Coup de dés de Mallarmé: le langage dans la main du poète, n’est qu’in cornet d’où jailliront, suivant la façon dont il est secoué, d’innombrables combinaisons dont les hasards sont le fait d’une organisation humaine qui se trouve donc avoir ‘aboli’ le Hasard.»
---. Mort ou survie du langage. «M.J. & la situation des mots.» Op. cit. 154. «En définitive, nous quittons, avec l’œuvre de M.J., l’ordre des perspectives dimensionnelles pour entrer dans celui des perspectives spirituelles, où l’analogie règne en maîtresse, […] l’idée, la signification, est créée par son vocable. Au commencement était le verbe. Il a suffi à Dieu de parler pour créer. – 149. Dans la Préf. du CD: «Le p. est un objet construit, & non la devanture d’un bijoutier, ce n’est pas le bijou: le p. en prose est un bijou.’ Il y revient dans son AP : ‘le sujet n’y a pas d’importance & le poète non plus. On n’y est préoccupé que du p. lui-même, c’est-à-dire de l’accord des mots, des images & de leur appel mutuel & constant… ; 148, On sait qu’il a, non pas ressuscité, mais codifié & ennobli celui-ci. [Le p. en prose]. Comme le remarquait B. Crémieux (Disque Vert no. spéc.), ‘M.J. est profondément pénétré de la distinction indispensable à introduire entre ceux qui ont fait du p. en prose sans le savoir: Pascal dans sa Nuit (‘joie, joie, pleure de joie !’), La Bruyère dans certains portraits, Chateaubriand à certaines pages des Martyrs & des Mémoires, Renan (‘le linceul de pourpre où dorment les dieux morts’), ceux qui ont fait du p. en prose en le sachant – Bertrand, Baudelaire, Mallarmé -, enfin ceux qui ont cru faire du p. en pr. & n’en ont pas fait, comme Banville dans sa Lanterne magique. M.J. se rattache […] à la 2e catégorie, […] à Bertrand, qui est visuel & à Baudelaire, ‘pour l’effet de surprise’.»
SAINT THOMAS. Thèse. Op. cit. 11-12 «Deux formes situent le comique sur le plan intellectuel. La prem. consiste en art de rapprocher deux idées qui, au prem. regard, semblent n’avoir aucun rapport entre elles. Ce rapprochement provoque la surprise chez le lecteur qui réagit par le rire. (CD). L’esprit jacobien défini par le mot de Montesquieu consiste à reconnaître des choses diverses & la diff. des choses semblables.» Cette reconnaissance des ressemblances & des différences, soudaine & claire définirait assez bien, dans le cadre de l’expression poétique, l’esprit jacobien. – La 2e source du comique ce ‘laisser-aller’ du langage. Il fait usage de figures de mots qui s’expriment par des antiphrases, des figures de pensées qui s’expriment par de réduction à l’absurde, par des sonorités cocasses, par des parodies énormes.»
---. 95. PARODIE DANS LE CD COMME TREMPLIN. «Dans le CD, M.J. se sert de la parodie pour définir sa position face à un monde litt. devenu trop sophistiqué. La parodie est pour lui le moyen de rejeter, & les formes conventionnelles & les styles inacceptables. St. Thomas appelle cela une ‘situation négative’ car [résumé de M.G.] M.J. a la volonté de créer quelque chose de nouveau. - P. 96. Le poète ironise ‘l’aventure spirituelle’ des Romantiques, d’une part, &, d’autre part, ‘l’aventure poétique’ des Symbolistes. Le CD était une expérience vers une nlle créativité. L’offensive contre les ‘écoles’ s’annoncent par des pastiches qui s’intitulent: ‘Poème dans un goût qui n’est pas le mien.’ – 104. La parodie sert de ‘tremplin’ par lequel le poète atteindra la véritable invention qui sera sa contribution magnifique à la poésie moderne.»
---. 106. EVOLUTION DANS LE CD CONFLAGRATI0N POETIQUE. «Il se produit à travers le CD, une évolution. La parodie des formes litt. change de but, le poète abandonne peu à peu l’imitation de ces formes: il ne cherche désormais que l’assouplissement de l’expression poétique. Le procédé sert à libérer le langage à produire un moment du contact avec l’imagination créatrice, une ‘conflagration poétique’ [l’expression est des CJP, 17]. – 107. La virtuosité se transforme en invention.»
LE OU LES CORNET A DES
MAX JACOB & LES ECRIVAINS REMOIS. Cat. Op. cit. 33, 34. «Ce titre a été suggéré dans le Bibliophile rémois (no 28, oct. 1992) par Claude Bourdois & A.J.J. Colligo [pseud. du dr. Alain Ségal] qui abordaient les diverses éditions du CD en vrais bibliophiles, pour qui le contenu d’un ouvrage reste l’essentiel! […]. L’étude des diverses éditions du CD révèle assurément qu’il convient d’avoir l’ensemble des ouvrages imprimés pour englober réellement ces poèmes. – Dans l’éd. de 1945 (N.R.F.) se trouve un préambule reprenant une l. explicative au maquettiste P. Bonet qui apporte 26 ans après non seulement un ‘petit historique du CD ‘ avec des allusions cinglantes à l’attitude de P. Reverdy mais aussi un reflet indirect sur le fait que M.J. continua toujours de créer des p. en prose, sorte de suite inlassable du Cornet à dés II où le choix des p. a été réalisé par l’ami de toujours A. Salmon & c’est dans la célèbre malle qu’il puisa avec bonheur car il aurait été dommage de perdre entre autres poèmes ce ‘Marcel Proust’.» [Voir aussi Poèmes épars Le Cornet à dés II (Une suite). Choix & présentation par Claude Michel Cluny. Orphée La Différence, 1994].
LA COTE
A ANDRE LEFEVRE. «Vous me parlez de ‘La Côte’. Quel bonheur que vous aimiez ce livre! Pour lequel je donnerais tous les autres.» L. inéd. s.d. Bibl. A.L. 4e partie, 1968, lot 789. Citée in Palacio. «Précurseur inattendu… » 191 ; Bibliographie M.J. 131.«Si ce livre » - ajoute Palacio à son article «pesait si lourd dans la balance, c’est qu’il semble en effet plus que les autres correspondre au fond de sa nature: humour & la parodie. Comment pourrait-il en être autrement d’un ouvrage qui se plaçait d’emblée sous la double invocation de Byron & du ‘grand Cervantes‘ ? »
ASPECTS DE LA France (8 juill. 1976): 12. par Jean-Baptiste Morvan. Dans l’inspiration celtique Morvan voit un certain aspect de parodie par un effort d’approche analogue « par certains côtés au style des peintres de Pont-Aven. Le désir de préserver la naïveté des impressions dominantes conduit à une certaine acceptation […] du cliché & du poncif; l’artiste ressent cependant les inconvénients de la situation & réagit par l’humour bizarre.» – Morvan parle ainsi de l’inspiration ‘celtique’ de M.J. & trouve qu’au commencement du 20e il n’est peut-être aucune école artistique ou littéraire soucieuse d’exploiter le folklore, dont les éléments échappent totalement au reproche de schématisation superficielle. «D’ailleurs les arts du terroir, même dans les formes anciennes comme les sculptures d’églises & de calvaire bas-breton, ne s’interdisent pas une certaine espièglerie dans l’interprétation des épisodes bibliques.»
BILLET INED. S.D. A CAMILLE BLOCH [PROBABLEMENT] accompagnant un ex. de l’ouvrage. «La Côte est un livre très spécial dans mon œuvre. C’est une œuvre ironique pour me moquer de la litt. populaire & de ses admirateurs; peu de gens ont compris cela: ils l’ont goûtée comme œuvre lyrique alors que c’est une BLAGUE très soignée mais blague tout de même.» Cat. Drouot 28-29 fév. & 1er mars 1968, lot 530 ; Bibliographie de M.J. 131.
BONET. Cat., no 258. Op. cit . L. 15 janv. 1944. «La plupart des chants de La Côte sont de moi & j’ai fait mettre un peu de breton par un camarade bretonnant. La préf. est une plaisanterie & ne dit rien. Je te mettrai comme d’habitude des topos vrais – pour toi! Je te ferai des dessins bretons. J’ai la Bretagne dans les doigts, dans l’œil & dans le cœur. C’est là que vous vous rencontrerez tous les deux, la Bretagne & toi. »
CADOU. «La Vie du poème.» 150. «Le poète illustre lui-même ses ouvrages: des gouaches pour les Chants bretons de La Côte. (1911) […].»
DECAUDIN. «Trois poètes.» Op. cit. 227. «C’est d’abord l’âme natale» [voir la fin de la l. à Bonet]. En 1911, présentant les ‘poèmes bretons’ de La Côte, il écrit: ‘Ne voyez en moi qu’un aède qui répète en balbutiant les mélodies dont on a bercé son enfance [… ]. J’entendais les voix des ouvriers brodeurs de mon père & celle de ta bonne, ma chère grand-mère'. [...] dans ce recueil, comme dans les pièces d’inspiration bretonne éparses dans son œuvre ou dans celles qu’il signe Morven le Gaélique, il accommode au caprice de son esprit vieilles légendes & scènes de mœurs. – […]. De ses prem. ouvrages, publiés en 1911 & 1912, on dégage sans peine déjà les sollicitations profondes, tant morales qu’esthétiques, qui animeront sa poésie.»
GARREAU, op. cit. 96. «Dans la préf. de La Côte, ‘recueil de chants celtiques anciens inéd., texte breton revu par M. Julien Tanguy, employé au métro’ (1911) Max confesse: ‘En même temps que je retenais les théories de Bergson copiées sur un cahier rose, j’entendais les voix des ouvriers brodeurs de mon père & celle de la bonne de ma chère grand-mère. Jours fortunés de mon enfance! Quelques bribes de gwerz introuvables, voilà toute ma science: elle me vient de ces vieux amis‘.»
GUIETTE. Op. cit.. 127. M.J. raconte: «Vers 1913, nous étions tous très modernes. B. Cendrars était arrivé à Paris apportant un sang tout frais de l’Amérique. Il avait peut-être été directement ou indirectement la cause des changements d’Apollinaire… On attendait de moi un livre très révolutionnaire. Je mis une espèce de coquetterie à écrire le livre le plus pâle du monde: La Côte. Apollinaire me dit tout bas que c’était un livre charmant […]. J’avais lu les Barzaz-Breiz de la Villemarqué, dont on disait dans mon pays que c’était un chef-d’œuvre en même temps qu’une imposture. Je voulais marcher sur ses brisées. J’avais l’intention de faire une imposture-chef-d’oeuvre. On remarqua surtout la préf., qui fit dire à M. Jules Romains que j’étais né chroniqueur [...]. – 129. La Côte que j’avais fait imprimer moi-même & que je vendais dans les cafés, les dîners, les soirées, de la main à la main, m’avait fait vivre assez confortablement pendant plusieurs années. Je voulus recommencer l’expérience.»
HELENE HENRY. «M.J. & Quimper.» Op. cit. 131. «L’univers immédiat de l’enfant est une quintessence d’éléments bretons & purement quempérois: l’atelier d’abord, où les ouvriers tailleurs chantent en breton des sôniou & racontent des histoires interminables; le bric-à-brac magique où le flair de Jacob accumule d’authentiques trésors: lits-clos, vaisseliers, coffre sculptés sur lesquels Max découvre les chaînes de vie, les palmettes, les soleils, ces signes qu’il retrouvera plus tard dans le plus diabolique de tous les livres: ‘l’Agrippa’, terreur des vicaires de campagne.»
A KAHNWEILER. Corr. I, 51. 1910. «Ecoutez! Si vous vouliez me faire plaisir…vous m‘enverriez un des prospectus de l’Enchanteur: cela me servirait de tremplin pour le ton, car en ce moment je suis trop plein de musique bretonne &, si je cherche une phrase, c’est un vers qui vient sous ma plume.»
LUA, 40. 21 sept. 1924. «Que te dirai-je? que je suis un exilé breton? que mon cœur y est toujours dans ce pays, que je m’ennuie de lui & que je n’ai de ma vie jamais fusionné avec rien d’autre. J’ai écrit La Côte au plus fort de la crise cubiste & alors qu’on attendait de moi que j’écrivisse le Cornet lequel ne parut que cinq ans après.» – 37. 21 sept. 1924. «J’aimerais que tu aimasses cette Côte qui est l’expression la plus pure de ma vérité intérieure. Tu trouveras plus cossu comme Bretonnerie dans le Cinématoma p. 43 & suivantes où j’ai imité l’accent breton comme personne ne l’a fait encore avec la plume, j’ose le dire. Mais de plus prés de ma pauvre nature, il n ’y a rien dans mon fatras imprimé, rien qui le soit plus que la Côte, surtout les notes, la préf. & les contes de la fin qui sont d’inspiration & parmi ce à quoi je tiens. – 40. 2 oct. 1924. Cette Côte qui m’est si proche & qui est si vierge de ces objectivations qu’on appelle métier – il m’est doux qu’elle te soit précieuse.»
PERARD. 35. «Si la prem. partie du livre est un pastiche, le seconde est bien personnelle. L’auteur tenait aux derniers contes, à la préf. & aux notes ‘assez naïves’ & ‘d’inspiration’.»
PFAU. Op. cit. 247, n. 76. Elle cite [en allemand Banquet Years par R. Shattuck. 39] qui affirme que comme le romantisme & l’enfance & ses traits: spontanéité, ouverture d’esprit ont été contrastés par l’âge mûr, elle pense que c’est ce qui pourrait expliquer l’intérêt de M.J. dans la litt. naïve folklorique.
PLANTIER. «Au service de M.J» op. cit. 43. «Il y a une autre raison à la persistance des malentendus: c’est la rareté de certaines œuvres de M.J. Bien peu ont la possibilité d’aller à la Réserve de la B.N. ou de se rendre à Quimper ou même à Orléans. Cela fait que La Côte … est très rarement citée. […]. Dans l’attente d’une éd. complète qui tiendra compte des inéd. & des variantes, on doit se féliciter de cette patiente remise à jour de l’œuvre & du rassemblement de la majorité des titres [par Jean Denoël] chez un même éditeur.»
---. «M.J., LUZEL & LA BRETAGNE: ETUDE DES SOURCES DE LA COTE. » Cah. M.J. 1. 8. «Comment M.J. imite-t-il Luzel ? Comment fait-il le p. de La Côte, p. écrits en fr.? Comment, à partir de trad. faites par Luzel ou H. de la Villemarqué, manifeste-t-il ‘sa volonté de s’extérioriser’ ? […] Cf. la citation de M.J. concernant Luzel est: ‘Sache donc qu’elle est… sauf 2 ou 3 p. entièrement de moi, bien qu’écrits sous l’inspiration proche du livre de Luzel introuvable. Je te signalerai un jour les p. qui ne doivent rien à Luzel, mais je n’ai pas de mémoire.»
---. 7. Plantier cite un passage de l’article de H. Henry (Europe no. spéc. 11) & trouve que c’est là que commence peut être la colonisation bretonne. La citation de H. Henry: «Bref, en 1911, alors que Max menait le combat du haut du Bateau Lavoir parut La Côte recueil de chants celtiques d’inspiration purement bretonne. Le seul aspect cubiste de ce livre extraordinaire est qu’il est tout à la fois un canular grandiose, un pastiche réussi comme Ossian & du M.J., poète breton.» Plantier trouve que la réf. cubiste fait partie de ces jeux qui déplacent les problèmes au lieu de les poser dans leur cruelle simplicité, le texte de M.J. n’était ‘cubiste’ si l’on a bien lu, que par métaphore & le ‘cubisme littéraire’ n’existant que par un savant tour de passe-passe dont il serait utile à préciser les mouvements. – Plantier trouve que dans les déclarations suivantes du poète relèvent des confidences d’un écrivain plus que d’un Breton. ‘Cette Côte qui m’est si proche & qui est si vierge de ces objectivations qu’on appelle métier.’ (Corr. II, 327). – H. Henry s’attache à intégrer les p. de la Côte, écrits en fr., dans ‘le fr. parlé par des Bretons, qui pensent en breton’… Plantier, par contre, affirme que les traits linguistiques des p. sont caractéristiques d’un niveau de langue populaire en général plutôt que du français-breton, c.à.d. il affirme que linguistiquement parlant on reste sur un niveau de fr. populaire.
---. 29. «Il ne faut pas donc se fier aux déclarations de M.J. dans ses corr., le secret s’accommode peu de ces formules de connivence facile avec un ‘ami’ d’avant-garde, ou un ‘admirateur’, ‘jeune poète’ respectueux, les variations y sont telles que la fable y voisine avec le cri […]. Mieux vaudrait se souvenir de ces généralités soudain révélatrices dans le grand arbre à formules des écrits de Jacob: ‘Etre créateur, c’est avoir un besoin absolu de produire comme de manger ou de boire. On produit ce qu’on peut [ …] moi je ne suis guère artiste, je me crois créateur.’ (Note 66. L’Univers poétique de M.J. Chap. 1 & 2.). – La Côte est l’expression de ce besoin de consommer, c.à.d., de transformer. […]. Il s’agit de créer une autonomie à partir d’une référence. L’invention ne peut s’exercer à partir de rien. L’éloge du laconisme & de l’émotion, l’élimination des ‘explications’, la lutte contre le réalisme de copie conforme, autant d’exigences contenues dans la préf. du CD & qui sont dans l’écriture des p. de La Côte.»
---. 29. «En attendant que le texte soit enfin soumis à un large public, nous pouvons tirer quelques conclusions. Par rapport à l’œuvre entier de M.J., La Côte n’est pas du tout le brouillon à malhabile d’un futur grand homme. Les principes qui organisent l’écriture recoupent ceux du cycle de SMl, du CD, du LC & des DP en prose & en vers, pour ne citer que quelques titres. Les commentaires de SM sont de la même facture que ceux de La Côte. Mais tout lecteur de SM sait bien que l’on ne peut lire ces textes, p. ou proses, dans la seule dérision, dans le seul exercice de style narquois. En partant de la préf. & de quelques commentaires ‘érudits’ on a rapidement construit une lecture réductrice. La tendresse jacobienne se cache, l’émotion ou la ferveur se déploient en lecture profonde.»
---. MAX JACOB. Op. cit. 103. Beaucoup plus que la Kabbale, l’influence de la Bretagne nous apparaît primordiale dans l’évolution spirituelle du poète. […]. Le mysticisme & la spiritualité sont une existence ‘charnelle’ dans cette contrée que le poète appelle ‘le coin le plus catholique de France’ (‘Récit de ma conversion.’ DT, 289). Les processions, les rites extérieurs créent une sorte d’univers particulier. – 104. On cite trop rarement son prem. recueil La Côte, qui est plein de cette croyance populaire dans le mystère & le surnaturel. [L’inspiration bretonne] «est autre chose que l’amour du ‘folk-lore’ qui conduit M.J. à cette recherche. Il faut être en communion avec les êtres. La superstition ne révèle qu’une déformation du sens religieux. Le poète y perçoit le mystère.»
SAINT-THOMAS. THESE. Op. cit. 94. «M.J. a réuni dans La Côte plusieurs histoires pittoresques de la Bretagne, les présentant de façon plutôt personnelle que légendaire. Parmi les traits comiques de La Côte, un des plus saillants est la douce ironie qui se fait voir dès l’intr. M.J. avoue: ‘De plus près de ma pauvre nature, il n’y a rien dans mon fatras imprimé, rien qui le soit plus que La Côte, surtout les notes, la préf. & les contes de la fin qui sont d’inspiration & parmi ce à quoi je tiens.» [Note 1. LUA, 37. ] - Ce qui est évident dans la Préf. c’est l’ironie humoristique, qui n’y est pas du tout cruelle, mais présente sous la forme de parodie. Cette Préf. est une rare imitation de ces graves intr. qui présentent des livres sérieux.»
ROMAINS, JULES. «Max Jacob.» Revue des Deux Mondes (oct.-déc. 1970): 14-15. Un jour il me dit: «Je viens de trouver l’homme qu’il me faut. Depuis déjà longtemps, je rêvais d’écrire une suite de poèmes, en langue bretonne, ou au moins de la présenter comme tels. L’ennui est que je ne parle pas le breton… J’ai fait connaissance d’un employé du métro, à la station Pigalle. Il sait admirablement le breton. Il va me traduire mes poèmes. Je les publierais dans le texte breton sur la page de gauche, comme des originaux. Sur la page de droite je donnerai mon texte fr., comme soi-disant trad. Au fond, cela reviendra au même. Il n’y aura de changé que le sens dans lequel se fera la traduction. […]. – Au moment de publier La Côte, qui était imprimée en partie à compte d’auteur, Max fit appel aux souscriptions de ses amis, & à celle du fabricant de chaussures. Les amis se conduisirent assez bien. Le parent riche ne craignait point le ridicule de souscrire pour la somme de 5 fr. M.J. se vengea en faisant imprimer sur la p. de garde […]: ’L’auteur remercie les personnes dont la générosité a permis la publication de ce livre, & tout particulièrement Monsieur X…[Gompel] qui n’a pas hésité à souscrire pour la somme de cinq fr.»
‘LA COURONNE DE VULCAIN’
H. HENRY. «Le Roi de Béotie de M.J.» Europe (mai-juin 1972): 249. «[…] cela se décèle mieux encore (annonce SM & Le CD) dans cette ‘Couronne de Vulcain’ (que le lecteur chercherait d’ailleurs en pure perte sur la tête des personnages) tout à fait contemporaine de la conversion de M.J., donc de Matorel & de La Côte. A la fois conte breton par son style narratoire, & conte voltairien par ses personnages & son thème (la quête fabuleuse d’une révélation) il contient de merveilleux textes en prose poétique & une ‘chanson bretonne’ qui sera reprise en 1925 dans les PMR . Mais toute cette mythologie fantastique est essentiellement de pure création jacobienne.»
VOIR EN TRAD. ANG. «VULCAN’S CROWN. » The Story of King Kabul the First & Gauwain the Kitchen-Boy. Trans. Moishe Black. Ill. Roger Blachon. Lincoln/London: Nebraska U Press, 1994. 57-78.
«LA CLEF DES SONGES»
MORGENROTH SCHNEIDER, JUDITH. Op. cit. 52. «Inspiration […] came to poets & mystics by way of the Ciel des Images. Access to this visionary domain could be obtained only after a period of passive waiting. […] this conditional detachment was easily induced, not only by fever & drugs, but though dreams, which Jacob hardly distinguished from mystical vision.»
LE DOS D’ARLEQUIN
A R. MANUEL. 5 août 1921. Corr. II. 21. «Ton allusion au chœur du chocolat m’a rempli d’aise pour toute la matinée & je me le chante avec variations dans ma solitude (qui est 3/4 du jour absolue).»
DV. Envoi à M. Béalu «Le Dos d’Arlequin ou le vrai M.J., refoulé hélas !» Cette dédicace date de1937. Quelques années plus tard il dit à M. B, «Tu comprends, c’est un livre obscène… chaque fois que je le trouverai, je le détruirai… » [M.G. probablement parce que Don Juan est homosexuel].
FILIBUTH OU LA MONTRE EN OR
FILIBUTH. 19. LE DOUBLE. «Tout a été créé en séries dans la nature, même les hommes; aussi un homme est-il pareil à tous ceux de la même série. […] M. Dur & Mme Lafleur sont égaux comme nature, non pas comme perfectionnement. – Nous sommes tous à la fois gibier du Diable & ange de Dieu: tuons le gibier, l’ange vole. M. Dur c’est l’ange de Mme Lafleur, Mme Lafleur c’est la bête de M. Dur.» [Partie III, chap. II].
FILIBUTH, 18-19. LA MORT MORALE. «Un homme qui, par la volonté de se perfectionner, s’est transformé, a en lui deux personnes: celle qu’il était & celle qu’il est maintenant. La prem. recule, pour que l’autre remue, mais elle est toujours là.»
---. LA VIE A ST.-B. P. 211-29. 2e l. de M. Dur à l’auteur.
GUIETTE. Disque Vert no spéc. 52. «Notes pour un portrait.» «N’est-ce par son image, image savamment décentrée, qu’il nous montre dans Monsieur Dur & de Monsieur Dur dans Rose Lafleur sa concierge? »
HERTZ, H. «Avec M.J., en compagnie de la renommée.» Ibid. 22. «Dans F, l’intelligence est plus aux aguets d’elle-même. Elle s’acharne avec tristesse. Elle s’attise moins complaisamment à une féroce gaieté méprisante & pleine d’envol. Elle est plus studieuse. Elle souffre & elle se courbe.»
PFAU, UNA. «Le portait de l’artiste en dévôt.» Op. cit. 12. Elle cite F. ‘Il n’y a pas de rapport entre notre situation & notre caractère’ «qui montre clairement que c’est par catégories ‘humaines’ & non par cat. ‘sociologiques’ qu’il juge.»
FOND DE L’EAU
ENVOI A ALFRED OTTONI. «Plusieurs de ces poèmes furent médités sous les cèdres de ta maison tourangelle des Roziers, garde-les comme souvenir des beaux jours de ce dernier automne & de nos grandes joies.» St.-B., 1927.
D, EMIE. Nlle éd. 98. «Depuis quelque temps déjà, Max prophétisait la fin du dilettantisme, prônait le retour au pathétique & à l’humain.» ‘Tu liras ma plaquette de vers de l’Horloge dans quelques semaines & si tu es déçu ce sera un malheur pour moi […] » ; 235. «C’est avec FE que le tournant se précise, Jacob l’avait déjà annoncé notamment lorsqu’il composait les VI en 1921 & promettait à Kahnweiler un genre nouveau. Il y lançait l’anathème contre ceux qui l’avaient suivi dans la confusion des valeurs: ‘[…] je te prie de croire que mes oeuvres […] vont changer de caractère. […] malheur à mes disciples & à mes élèves! Je ne veux plus leur enseigner autre chose que l’horreur de l’insignifiance artistique & autre, & l’attitude du dégoût devant les immondices des mœurs modernes. En cela, je veux être un devancier aussi […].’ (Corr. II, 36).»
LMJ, 293. 11 mars 1927. «[…] j’irai te voir avec une plaquette parue à l’Horloge qui contiendra mes derniers vers, les seuls passables de ma vie » ; 299. S.d. «Tâche que Gide lise F » ; 301. 10 juin 1927. «Comme un dernier soupir j’envoie à Gide ‘mon’ exemplaire du fond de l’eau.»
LNF, 132, n. [5 avr.1927]. «Le recueil de Jacob qu’il préfère ; 138. [23 juin 1027]. «Tes bonnes paroles sur mon livre me vont au cœur. Il est écrit pour très peu de gens dont tu es. Quelle consolation! Travaille, cher ami: c’est tout dans la vie.»
MJ/JC, 530. L. de Cocteau. [avr. 1927]. «Comment peux-tu douter de moi? D’abord ce livre contient le poème sacré sur Raymond. Ensuite, chaque ligne est un bloc de grâce – un marbre parcouru de veines d’homme – une découverte sans en avoir l’air ; voilà le vrai sublime: ces arbres, ces animaux, ces formidables photographies de Dieu en magnésium. Tu es une merveille […]. Mon Max, je suis fier d’avoir mon nom en tête d’un p. de ce livre d’amour en tête du p. qui est un de nos secrets d’amour.»
PR, 372-73. «Ce que développe […] clairement les recueils de FE & de SI c’est le double mouvement d’une lamentation sur le sort maudit de l’âme exilée & esseulée & appel à une mort-délivrance, synonyme d’un retour au sein de Dieu, d’un retour à l’origine, car tu n’es pas d’ici, ta souche n’est pas d’ici dit […] le texte gnostique. La division intérieure qu’engendre l’exil terrestre rejoint les images obsessionnelles de dédoublement de la personne que véhiculent romans & poèmes. Chacun des héros jacobiens est affublé d’une figure déformée ou idéale de lui-même. […]. Car le poète […] est persuadé, chacun marche précédé de son double reflet. […] Aidez-moi à connaître mon double, toi! le vrai! pas l’autre hélas.»
--- . 558. FE, publié en 1927 consacre [une] évolution & apparaît aux yeux de l’auteur comme la manifestation d’un renouveau qui l’étonne lui-même. C’est un petit livre qui ne [lui] ressemble pas (LMJ, 274), les seuls passable de s(a) vie (LMJ, 293).»
---. 580. «Le travail du poète consiste en fait à substituer à l’amour humain l’amour divin de façon que l’objet unique de son attantion & de sa tendresse ne soit plus que le Christ, amant pur & parfait. Mais cette substitution ne s’accomplit pas sans un déchirement fondamental qui imprime à certains textes leur beauté pathétique: ‘J’ai peur que Tu ne t’offenses/ lorsque je mets en balance/ dans mon coeur & dans mes œuvres/ ton amour dont je me prive/ & l’autre amour dont je meure.’ (FE, 125).»
MADAME GAGELIN
A CADOU. «L’œuvre de M.J.» Cahs. du Nord no spéc. 190. 11 fév. 1941. «J’étais & je suis dans la mère Gagelin & il est bien possible qu’elle soit extériorisée, plusieurs en parlent comme d’une dame existante.»
DENOEL. Aguedal, no spéc. II. (1944): 104. «Mme Gagelin… c’est un personnage de mes livres qui est son portrait [de sa mère]. Ceci est un legs d’un remords. Terrible hélas! »
HENRY, H. LA MERE DE M.J. – MONDE MARATRE. «M.J. & Quimper.» Op. cit. 133. «Lorsqu’il peint ou décrit sa mère, c’est sous les traits d’une vieille Sibylle à la Rembrandt ou ceux peu engageants de Mme Gagelin: Comme elle ne pense qu’à l’argent & qu’à l’amour sexuel, sinon aux joies de la vanité satisfaite, elle se déclare elle-même une femme très intelligente; […]. Mme Prudence Jacob est née le 22 déc.1849. ‘Constance, obstination, orgueil, froideur, avarice, nature terrestre’, tel est le verdict de ce fils.»
HOROSCOPE de la mère de M.J. «Les dames du Capricorne.» 187-92. (1er décan) dans MA; Petite Astrologie. Le Bibliophile Rémois. 1989. 43-44.
LML, 66. 22 déc. 1937. «Ma pauvre mère sur son dernier lit a prononcé avec une amertume profonde le nom d’une de mes héroïnes qu’elle croyait être son portrait & qui l’était. Comme elle avait toute sa tête, je lui ai expliqué ce qu’est & ce que peut faire être, la production littéraire: je ne sais si elle m’a pardonné!! Elle m’a tenu la main longtemps! Je lui ai donné de formidables joies auxquelles elle était très sensible. Mais elle est partie avec l’idée que je serai de l’Académie. Ah! Quelle me connaissait peu!… Comme je multipliais mes attentons, elle m’a dit ‘Je n’aurais pas cru que tu serais si aimable.’ Elle voulait dire ‘affectueux, attentionné’. Voilà, hélas, comme nos parents nous méconnaissent. Ça ne fait rien. N’oublie jamais que leur affection est unique qu’elles que soient celles que tu rencontreras dans ta vie & dont tu es si digne.»
PFAU, op. cit. 167. «Il brosse le portrait de Mme Gagelin dans ses nouvelles & dans le MA. C’est une femme superficielle, dure, opiniâtre, sarcastique.»
----. Mme GAGELIN, présente dans les ouvrages de M.J., montre la déshumanisation des rapports humains. Les hommes doivent se conformer au rôle que la société attend d’un homme. Les femmes qui ne subissent pas la pression économique n’ont pas de profession & elles sont forcées à jouer un rôle au sein de la famille. Elles sont généralement de riches bourgeoises plutôt vieilles qui n’ont que de rapports conventionnels avec leurs maris & leurs enfants, elles sont attachées à leurs idoles ‘l’élégance’ & des relations dans le monde. [Trad. M.G.].
VM, 243. «La mère de M.J. lui a dit gravement ‘avec une amertume profonde’, «Mme Gagelin,’ Mme Veuve Gagelin, la terrible bourgeoise, sèche de cœur, exploitant, terrorisant & affamant les domestiques, ‘qu’elle croyait être son portrait & qui l’était.’»
L’HOMME DE CHAIR & L’HOMME REFLET
ENVOI A BEALU. «Au cher Marcel au nom de l’insondable à la recherche de la perle intérieure.» M.J. dans ses livres, 37. no 84.
PJ, 232. «Dans ce dernier livre, j’ai essayé d’adapter ce que j’avais acquis à l’étude d’une question sociale qui me semble brûlante. J’ai montré quelle éducation risque d’avoir un enfant sans mère. […]. L’enfant est livré à toutes sortes de hasards. A 16 ans il a tout ce qu’il faut poiur faire un aventurier sans scrupules, sans patrie, sans tradition; il risque d’être d’autant plus dangereux qu’ayant toutes les sensibilités, il a tous les besoins. Ces hommes sont extrêmement redoutables. La bâtardise est néfaste! Elle est le fruit de l’union libre & l’Eglise a cette fois encore raison.»
«HONNEUR DE LA SARDANE & DE LA TENORA»
BREUNIG, L.C. «M.J. & Picasso.» MF 331 (sept.-déc. 1957): 584. «Une petite excursion [l’été de 1913] en Catalogne inspire un des chefs-d’œuvres du poète […], dédié à Picasso.»
CHAMBOST. «Le Laboratoire central.» «M.J. & son œuvre.» Rfl (juin 1972): 36. [M.J. aime’ le type de l’image dynamique, qui évolue selon le mouvement circulaire d’une manière onirique’] mais «Honneur… » ‘n’a à l’origine, rien d’onirique. M.J. a réellement vu danser la sardane au cours d’un voyage en Catalogne en compagnie de Picasso.’ [Et nous voyons le beau mouvement circulaire de la danse].
HENRY, H. Europe no spéc. 113. «A Figueras, Max est ébloui par les danseurs de sardane & dédie à Picasso un de ses plus beaux poèmes.»
LOCKERBIE. Order & adventure…Op. cit. 158-59. [This p.] «has a place among the travel p. equivalent to that of ‘Printemps & cinématographe mêlés’ among the Parisian poems, in that it shows his sympathy with another environment at its fullest & most untroubled. It was inspired by a holiday in Catalonia, in the summer of 1913, in the company of Picasso, & evokes Spain & the Spanish way of life, particularly as it is revealed through the dance […]. – The p. is original in form, falling into 3 parts which are each diff. in style. The 1st part describes the Spanish scene in a mode of humorous reportage similar to that of the Parisian poems; the 2nd, evoking one of the instr. that accompany the dance, the tenora, is, suprisingly, in a controlled & careful prose; the 3rd, expressing the pleasure that the poet takes in the dance, assumes a more lyrical form, with humorous undertones. – While the poem moves in the direction of lyricism, the progression is carefully restrained & moderated by the contrasting styles of the earlier parts, & by the all-pervasive humour. The medley of styles is not intended to produce the effect either of a virtuoso exercise or a sudden lyric climax. On the contrary, it suggests an attentive involvement in the local scene, making itself felt through conscious variations in the tone, form & texture of the writing. Though stylistically more complex & wide ranging than other pieces, therefore ‘Honneur… ‘ is no less concerned than they with appreciation of external reality. It is certainly one of the major expressions of J’s delight in the world around him.»
PREDAL, DOMINIQUE. «HONNEUR DE M.J. DE LA SARDANE & DE LA TENORA.» Cat. Max Jacob & les écrivains rémois. Op. cit. 9, 10. Prédal cite M.J. ‘ … ; ce rythme est d’une solidité telle que je ne crois pas qu’on puisse souhaiter davantage: un rythme de polka coupé de silences brusques, de longues fioritures. Il y a dans la musique des sardanes, des embrasements qui font penser à la splendeur. La sardane se danse en rond, bras en girandoles & presque immobiles, sauf dans les moments d’embrasement.’ «Pas de fondu des thèmes (si l’on ose un parallèle avec le grand Mozart symphonique), mais chez M.J. un éclatement de l’objet sensuellement exposé. Pas du dense, de la danse. Le poète ne prend pas le temps d’approfondir. Il n’en a pas le tempérament. Sautiller, saut-iller encore – flamme incessante (priante). L’esquisse, l’épure suffisent à l’esthétisme de Max qui appréciait Mozart (‘L’enlèvement au Sérail’ parut, à Paris, dès 1898).»
ROUSSELOT. Présences contemp. «M.J. ou le sel dans la plaie.» Op. cit. 135-36. «P. de mode, sinon d’inspiration classique. […] mais cette fantaisie, qui brouille à plaisir les genres & ne s’accommode pas d’une représentation conventionnelle de l’univers, ne tarde pas à gauchir l’inflexion prem. de l’écriture & le poète est le prem. à donner un coup d’épaule à la belle construction harmonique qu’il a adressée: ‘Mer est la mer Egée…’ il s’amuse, il nous fait l’œil, il exhume Musset en se contorsionnant & force Coppée à danser la sardane ou bien il prend la voix nasillarde d’Yvette Guilbert, mais l’instant après, il risque un coq-à-l’âne […] a moins qu’il ne se laisse aller à filer sa note la moins contrôlée, la plus cordiale ou qu’il se donne en pur artiste, en parfait connaisseur des formes & de leur intelligence, le plaisir de transférer dans le langage une interprétation plastique de la musique: «Chaque instrument se tenait par la taille/ Et la tenora dans la musique faisait une entaille.»
INEDIT
«Terrifié par la multiplicité des visages qui sont lui sans lui ressembler, bourgeons d’un arbre de Jessé dont il est la tige & les branches, le poète se contemple immobile d’une muette paralysie.»
ITALIE
BOSCO, Henri. Aguedal no spéc. 128-29. «Le Vésuve fumait – Carte postale des plus banales! s’écriait la voix pétulante. Le golfe est un bol de lait bleu. La ville, carton rose. Tout ça c’est de la pose. Parlez-moi de Douarnenez, Concarneau, Audierne! Ici, décor. Pas de tendresse.»
IMAGE DU PARADIS – LA TOSCANE. N.C. Barney. Aventures de l’esprit. Op cit. 108. P.s. l. s.d. «Une fois j’ai traversé la Toscane par un crépuscule doré, quelque chose comme le paradis mais en beaucoup mieux.»
ISSOREL, Jacques. «M.J.: L. inéd. à Augustin Lazo.» Cah. M.J. 2 (1979): 55, n. 6. «Le Carnet de voyage» serait donc, non un carnet de route tenu au jour le jour & chronologiquement fidèle, mais l’élaboration litt. des notes prises sur le vif, de souvenirs & d’impressions recueillies lors de ce voyage en Italie. - 45. En se rendant en I., le poète répondait à l’invitation de J. Grenier, qui enseignait […] à l’Inst. fr. de Naples.»
LRR, 106, n. 64. «On peut remarquer que M.J., reviendra d’Italie avec un plus grand amour de la Bretagne: ‘Je me demande si on peut admirer autre chose que ce qui a formé notre cœur & si autre chose que la Bretagne peut me toucher’. » Pfau. «Carnet de voyage.» op. cit. 313.
L. A MOREMANS. Op. cit. 41. L. de 1927. «Depuis que j’ai vu l’Italie, je ne rêve plus que de mers bleues & de gens affectueux. La France, c’est la correction, l’Italie c’est la grandeur & le sentiment. Nous avons peur du ridicule; ils ne craignent que la sécheresse & le mesquin. Ils ne nous ménagent pas leur mépris! – Rome est une ville campagnarde: les maisons ont l’air en terre cuite & pétrie à la main, les rues sont traversées de vieux coins inattendus perchés sur des collines, la campagne arrive tout de suite & la ville reprend, pour s’arrêter à d’antiques remparts. Les faubourgs sont de vieux murs de province & en somme il n’y a pas de faubourgs, c’est la plaine où survivent quelque aqueduc & un pin parasol. J’aime cette ville à l’aise, les maisons airées, épaisses, fraîches. Les tramways y sont anormaux, les magasins modernes dépaysés: les autos ne l’entament pas dans sa noble graisse jaune. On aura beau couper les arbres des jardins, on ne lui ôtera pas son allure de paysanne riche & pauvre. Les autos ne l’empêcheront pas d’avoir surtout de landaus à deux chevaux qui lui conviennent & des princesses à gros cous blancs, à belles épaules qui n’ont pas envie d’être parisiennes mais plutôt d’avoir moins chaud. J’aime Rome d’avoir le pape, ce foyer de grâces, dans sa caserne & le roi dans une autre caserne, l’intimité de ses vieilles maisons au bout du Tibre qui en disent plus long sur le mariage du Latium avec N.S. que le Louvre n’en dit de l’orgueil de nos rois de France. Vive Rome qui sourit de nos mécaniques modernes: ‘J’en ai vu bien d’autres’ dit-elle.’
HISTOIRE DU ROI KABOUL PREM. & DU MARMITON GAUWAIN
ANDREU. MJ. Op. cit. 27-28. «Il écrit en quelques semaines un livre pour enfants […], livre depuis longtemps introuvable & que les Amis de M.J. ont eu, en 1951, la bonne idée de rééditer. ‘Quand il fut fini, je me souvins d’un camarade du collège employé chez Picard & Kahn. J’allai lui remettre mon ms. Et quelques semaines après, il voulut bien me déclarer que c’était encore ce qu’il avait de moins mauvais parmi tous les ms. qu’il lisait. On me donna 30 fr. en tout. On acceptait le ms. à cond. que je supprimerais tous les mots qui ne seraient pas absolument laïcs, par ex. on remplacerait ‘église’ par ‘hôtel de ville’, ‘paroisse’ par ‘mairie’, & ‘prêtre’ par ‘instituteur’. Avec mes 30 francs, j’achetai du pétrole pour ma lampe, du tabac; je payai la boulangère. Mon premier repas dans un restaurant me sembla le plus beau de ma vie.»
BULL. CRIT. DU LIVRE 317 (mai 1972): 579. «Nous ne cessons de découvrir M.J. Le Roi Kaboul est un conte merveilleux certes, mais moins marqué par la personnalité de M.J.»
CADOU. «La vie du poème.» Op. cit. 129. «M.J. débuta dans les Lettres en 1904 par un ouvrage intitulé: Le Roi Kaboul […]. Les bons élèves de1904 reçurent ce livre comme prix, parce que, à cette époque, les prix revenaient de droit aux enfants & non aux auteurs.» [Madeleine Follain reçut ce livre dans son enfance & offrit l’ouvrage introuvable à J. Denoël].
COMEDIE DE L’OUEST. KABOUL A LA TELEVISION 17 août 1974. Adaptation & mise en scène Jean Signe, avec Maurice Antoni, Géraud Dauzat, Olivier Proust, Michel Parent, Serge Feuillet, Christiane Vallon, Etienne Diraud. Décors Daniel Nadau, réalisation Paul-André Picton. Production de Rennes. «M.J. écrivit ce conte pour enfants en 1901, à l’âge de 25 ans, à une époque où il tentait de vivre de sa plume. C’est un conte assez traditionnel où l’on distingue assez mal l’écriture du poète du CD. C’est l’hist. d’un petit garçon, François Gauwain, marmiton de son état, qui réalise pour son roi une magnifique recette. Le roi est si heureux qu’il propose au garçon une récompense ce dernier veut la main de la princesse Julie. Le roi refuse. Le marmiton va à l’étranger devient généralissime & finit par avoir la main de Julie. Si ce n’était pas aussi anodin, on pourrait discuter du plan politique de la pièce, qui est assez ambigu (aux dern. p., François abandonne le pouvoir, ’se souvient de sa modeste origine’). Mais j’ai l’impression qu’il y avait plus de dérision dans l’esprit de M.J. que la lettre du conte pourrait le laisser supposer.» (S.G.)
DORGELES, ROLAND raconte ainsi la naissance de ce conte: « peintre méprisé des marchands de tableaux & écrivain ignoré des éditeurs, M.J. apprit qu’une maison d’édition recherchait des contes pour la jeunesse. Il se mit au travail & fignola ce Roi Kaboul. Il se dit vertement rebroussé par l’éd. car il parlait de curé, d’église & d’enfant de chœur… alors que ce livre était destiné aux distribution de prix des écoles laïques (en 1904, ce n’était pas rien dire). Jacob reprit son travail, remplaçant curé par instituteur, église par mairie, etc. Le Roi Kaboul fut jugé digne de la maison. A notre connaissance ce conte devenu introuvable n’avait jamais été réédité. Il est bien digne cependant de l’œuvre de l’éblouissant jongleur que fut M.J. malicieux, intelligent, chaleureux & mystérieux. K. Ier ou ‘Comment l’esprit vient aux chefs d’état.’.» Le Soir, 26 juill. 1972.
DUNOYER. «M.J. témoin d’un monde tel qu’il parle.» Monde 7464 11 janv. 1969 no spéc. «On réimprime M.J. Non seulement sa poésie […] mais des proses qu’on croyait oubliées, des romans & autres histoires qu’on supposait désuets parce qu’on ne les avait pas relus.» [Cf. Emile Henriot qui les trouve désuets & Y. Pelletier].
LES EXPLOITS DU MARMITON GAUWAIN (d’après Histoire du Roi Kabul 1er de Max Jacob). Théâtre Pour de Vrai. Texte & Mise en Scène de Yves-Jacques Bouin avec Catherine Sidoine & Dominique Dumont.. 16 rue de Cambrai 75019 Paris.
FICHES BIBLIOGRAPIQUES. 17, rue de Félicité par J. Le Brun. «Hist. du Roi Kaboul conte philosophique à la manière du 18e s. alerte & dépouillé & fort amusant. Les deux contes gardent après un demi-siècle toute leur jeunesse. Il n’est pas fréquent de rencontrer un auteur intelligent & spirituel, sensible & pudique comme l’était M.J.»
GATEAU, J.CH. Journal de Genève (6 janv. 1973): 32. «Trois générations de bohèmes. M.J. & son petit monde courtelinesque.» «Savoureux texte que sa prem. œuvre Hist. du Roi Kaboul conte pour enfants qui lui valut en 1903 30 francs & les félicitations de la maison Picart, déjà éclatent le goût des mots, l’amour des sonorités pour elles-mêmes: «Des glaces au marasquin, à la framboise, à la pistache, aux confitures & au jus de cerises, des capilotades de marrons du Pérou; déjà le regard juste: «Les coques chantaient & quelques paysannes entrouvraient les portes de fermes, des écuelles à la main pour le petit déjeuner des bêtes; déjà l’invention farfelue: ‘Cet escalier avait l’avantage d’être aussi un ventilateur, car les marches en tournant comme des palettes brassaient l’air de la salle; & le clin d’oeil aux adultes: ‘le lendemain on allait en cortège voir le Musée, le groupe scolaire & l’Hôtel de Ville; & la désinvolture poétique: ‘Le caribou est un animal à chair de poulet, on en tire des blancs-mangers que l’on prépare au lait d’ânesse,’ Grâce à Bridabatu XXIV, roi de Boulabasses, Gauwain le gâte-sauce épousera Julie, fille du K. Ier, roi des Baliriges & Empereur des Iles Vertes, & instaurera une République sans histoire. Presque tout le Max à venir est ici en germe, avec sa pirouettes & sa liberté.»
GRALL, Xavier. «Tribulations d’un funambule… » Op. cit. juill.1976. «[…] avec le TB, Le Roi Kaboul, les PMG, M.J. funambule & touche-à-tout de génie, a fait dans son oeuvre une large place à la Bretagne. […] Surtout son mysticisme oriental a rencontré le mysticisme breton. Il savait faire son bien de tout.»
GUIETTE, op. cit. 64. «Il faut manger pour écrire ce conte. Je descends dans une boulangerie, & je demande à la boulangère si elle veut m’envoyer une livre de pain tous les matins. Je paierai à la porteuse. Le lendemain matin, tout habillé, avec plusieurs paires de chaussettes aux pieds & tous mes vêtements sur le dos, car il fait très froid & je n’ai pas de feu, je guette la porteuse de pains. Elle frappe. Et je prends une voix lointaine comme si j’étais couché & incapable de me lever: ‘Qui est là ? C’est le pain, Monsieur. – Eh bien, laissez-le devant la porte. J’irai payer tantôt.’[…]. Je mangeai ma livre de pain & je commençai d’écrire un conte qui s’appelle Le roi Kaboul… Cela dura bien 6 semaines. Je n’ai jamais poli mon style & regratté les que, les qui & les virgules, comme je le fis pour ce conte que je voulais parfait.»
---. 115-16. «[…] un vol. de 60 p., livre de prix pour les écoles. Quel homme d’aujourd’hui, qui le lut enfant ou quelle ancienne petite fille pourrait nous dire quelles joies il lui causa? […]. Le roi Kabul demeura longtemps introuvable. L’auteur n’en possédait pas d’ex. La B.N. l’ignorait. Les Amis de M.J. sont enfin parvenus à le retrouver & en ont publié en 1951, le texte précédé d’une page inéd. de l’auteur: ‘Historique de ce livre (si on peut dire’.) On y relèvera, avec de nouveaux détails, les renseignements qu’il m’a donnés en 1928 & que j’ai réproduits plus haut. A. Salmon a signalé dans sa préf […].: «Max a sentimentalement maintenu entre les ‘Œuvres du même auteur’ Le Marmiton. […]. – M.J. m’en avait parlé comme d’un travail qui l’avait rendu heureux. ‘Il s’y était appliqué’, disait-il ‘avec autant d’allégresse qu’il en mettait à parler aux enfants, avec cette sorte d’émotion tendre & gaie qui les charmait. Jamais son style ne fut plus soigné, plus juste, ni mieux poli.’ Ce sont ses propres paroles.»
HENRY, H. C’était il y a 30 ans. No. spéc. 39. «M.J. n’a jamais cessé de ressentir & de manifester pour sa ‘vaste & variée & puissante Bretagne’, une profonde tendresse qu’on pourrait bien retrouver au-delà des sarcasmes; & qu’il y a dans toute son oeuvre, du Marmiton Gauwain aux DP, une ‘mythologie’ finistérienne extraordinaire dont certains thèmes obsessionnels (le château, le balcon, la falaise…) feront un jour le bonheur des exégètes psychanalystes par leur richesse mystérieuse. Amour profond, viscéral, possessif, pour ‘ma rivière’ sous mes arbres, ma chambre d’enfant, mon fleuve […] amour qui s’est voulu partagé […].»
---. «Le Roi de Béotie de M.J.» Europe (mai-juin 1972): 247. «Le RB, recueil de contes & de textes brefs publié en 1921 est récemment reparu en librairie par les soins de J. Denoël qui nous en donne une éd. définitive grossie de deux contes devenus introuvables: ‘L’Hist. du Roi Kaboul Ier, écrite en 1904 & ‘La Couronne de Vulcain’ publiée en 1910 dans la revue Pan puis en 1923 aux éd. de luxe de la Galerie Simon avec des ill. de Suzanne Roger. – 249. ‘Kaboul’ est un conte pour enfants, prem. œuvre du jeune M.J. encore tout plein de sa jeunesse quimpéroise & d’une érudition d’excellent lycéen, bon élève sage & fou de poésie, érudition qui mêle joyeusement au goût du conte philosophique ou fantastique, de Voltaire & de Hoffmann celui des contes populaires qu’Anatole Le Braz, professeur alors à Quimper, s’en allait recueillir de fermes en fermes, ou même des comptines qu’il inventait lui-même pour la joie de ses frères & sœurs.- ‘Kaboul’ doit beaucoup à Voltaire, y compris ce nom qui est dans ‘La Princesse de Babylone’, (celui de François Gauwain étant celui d’un authentique ami quimpérois) y compris cette passion du bien manger qui est un signe de civilisation avancée & que l’auteur de La Gourmandise ne se décidera jamais à considérer comme un péché mortel. Il y a beaucoup de Zadig en ce hardi François Gauwain, mais aussi des prémisses de p. en prose qui annoncent SM & Le CD. »
LE LYRISME DANS LES CONTES D’ENFANTS. Préf. Julien LANOE aux PMG. Gallimard, 1953, 1991. 12. «A la veille de sa mort, il dira, non sans quelque solennité: ‘Le lyrisme à l’état pur se trouve dans quelques romances populaires & dans les contes d’enfants… N’écris pas avec des mots, mais avec des objets & des sentiments…’.»
NOUVEL OBSERVATEUR. «A ne pas manquer cette semaine.» (31 janv.-6 fév. 1972): 8. «La rééd. des récits éblouissants, écrits avec un humour & une verve peu communs. Voilà où prendre des leçons de style.»
ORTF le 3 le jeudi 1972 le RB de M.J. Radio Montpellier par A. Miguel. «[…] le poète du CD, M.J.est aussi un prosateur plein de ressources un conteur qui jongle avec les mots & les images. Divertissements burlesques, historiettes qui ont la fraîcheur de l’eau de source…C’est le génie de M.J. d’être toujours lui-même d’une manière vive sous chacun de ses multiples déguisements.»
PERARD. Op cit. 62. «C’est par un conte pour enfants que M.J. entre en littérature. […] Lecteur de Mille & une nuits à l’âge de six ans, il aime le merveilleux, la distance franchie comme en rêve sur le tapis volant, la valeur personnelle renversant les obstacles. Ainsi le fils d’un maréchal-ferrant épouse la fille d’un roi & réunit les Balibriges & les Bouloulabasses, auparavant frères ennemis, d’abord en un royaume &, ensuite en une république heureuse.»
LA VOIX DU NORD (1972) par Paul Guth. «Roi Kaboul monde enfant d’apparence, mais tout un soubresaut de sanglante ironie de cruauté hautaine.»
THE STORY OF KING KABUL THE FIRST & GAWAIN THE KITCHEN-BOY. Translated by Moishe Black & Maria Green. Ill. by Roger Blachon. Lincoln/London: Nebraska U Press. 1994.
LE LABORATOIRE CENTRAL
ENVOI A MARCEL BEALU. «J’ai écrit le LC comme ça pour me reposer & beaucoup de gens ne me connaissent que par ce livre.» DV, 53 ; nlle éd. 87 ; Bibliographie de M.J., 134.
ENVOI A YVON BELAVAL. «J’ai essayé d’y donner toute ma mesure.Une mesure pour rien me souffle le diable.» Préf. du LC ; LRR, 101, n. 19 ; Bibliographie de M.J., 134.
MJ/JC, 67. [10 juin 1921]. ‘Le laboratoire n’a pas grand succès & les témoignages de sympathie devant le décès de ma poésie me font plaisir’ ; n. 2. «Les œuvres de Jacob n’ont jamais eu de succès de librairie, mais le LC n’eut pas non plus de succès auprès des critiques.» [Voir le c.r. de Roger Allard dans la NRF (déc. 1921): 743-44].
NORIYUKI NISHIYAMA. «Aspects de la nature & son dualisme dans Le LC.» Op. cit. 143. «[…] la nature dans sa totalité comme créature est en relation avec le Créateur: ‘La nature & la vie! Ce sont là vos présents/ Je les prends & m’applique à en faire bon usage,/ C’est-à-dire d’exercer pour devenir plus sage/ Ce que j’ai d’esprit, de sentiment & de cœur.’ (LC, 178). Ces vers nous révèlent que la nature est avant tout le don de Dieu & qu’il y a donc un bon usage de la nature que le poète choisit pour devenir ‘plus sage’. Cela suppose donc un mauvais usage de la nature quoiqu’elle soit donnée par son Créateur . En dehors de cet aspect de la nature en relation avec Dieu . M.J. développe & formule plus explicitement le rapport étroit entre le Créateur & son œuvre dans l’intimité du poète. Il note dans ses MR ,73 : ‘étudier la nature, […] c’est glorifier Dieu Créateur, car tout ici–bas & audessus de nous est le cahier de Dieu’ .»
IBID, 152. «[Par contre] la mer apparaît comme ‘condamnée par l’Enfer’ […] la mer fait penser à la mort. ‘Le poète fixait la mer comme une mort/ Car la mer en ce lieu poudrait le cap d’une anse/ Et la mer écaillait la peau des rocs immenses.’ » (LC, 165).
IBID.«L’image de l’arbre.» «En dehors de l’inspiration biblique, par exemple celle de l’arbre de Jessé, la forme de l’arbre fait sa valeur théologique. […]. L’arbre s’enracine dans l’horizontal & se nourrit de lui, mais il se dépasse dans le vide vertical: enracinement, élévation. Inséparable du temps & des saisons, l’arbre est prophétique. La sûreté de sa prophécie s’appuie sur les fleurs comme sur les fruits. Cette remarque si pertinente de Plantier nous permet de justifier le statut du poète comme arbre: celui dont les pieds s’enracinent dans la terre, réalité concrète, mais qui cherche à s’élever vers le Très-Haut, ce qui explique justement sa vocation poétique. Car il prend la poésie pour s’orienter vers le haut, vers le Très-Haut.» [Voir R. Plantier. «La métaphore mystique dans les poèmes de M.J.» RLM, no. spéc. 3. 85].
---. «DIEU DANS LE LC.» Op. cit. 162-63). ‘Trouvez votre cœur & changez-le en encrier. Le cœur c’est Dieu. Ceci n’est pas un mot littéraire mauvais. C’est une vérité. Dieu n’est pas à l’extérieur mais à l’intérieur de vous.’ (Cadou. Esth, 19). «En effet le chrétien baptisé dans le Christ, reçoit l’Esprit de Dieu, dès lors, Il habite en lui par la présence de l’Esprit Saint, du sacrement, & de l’acte de charité envers Dieu ainsi qu’envers le prochain. ‘Le Seigneur aux humains signifie sa lumière/ Chacun de nous du ciel a l’image en son cœur.’ (LC, 167).
PJ, 263, n.1. L. à Emié 8 mai 1926. «Il [Emié] composa plusieurs mélodies sur des p. de M.J., donc ‘Villonelle’ du LC.»
LE LIVRE DE L’AMI & DE L’AIME
LE LIVRE DE L’AMI & DE L’AIME du bienheureux Raymond Lulle, mis en fr. par Max Jacob, aux éds. Fata Morgana en 1987.
PR, «Constitué de 271 petits cantiques d’amour dialogués par lesquels l’entendement & la dévotion s’augmentent. R. Lulle, avant F. de Sales avait souligné la nécessité du colloque, le colloquium latin désignait le rapport du croyant avec Dieu. – Les colloques dans la poésie mystique de Jacob sont les moins didactiques & tiennent plus du duo amoureux que de l’exercice de dévotion. – In R. Lulle. L’arbre de philosophie d’amour, Le livre de l’ami & de l’aimé & choix de textes philosophiques & mystiques. Paris : Aubier- Montaigne, 1967. P. 35. Rééd. Fata Morgana 1987. PR, 673. ‘Dans l’essence de l’amour nul ne peut nommer l’ami & l’aimé s’ils ne sont véritablement différents.’ R. Lulle ne conçoit pas l’amour comme unifiant comme les mystiques affectives du ravissement de l’épouse, mais propose ‘une mystique de l’individu dans sa différence constitutive’. »
MEDITATION
AJAME, PIERRE. «Le machiniste du Bon Dieu.» Nouvel Observateur 428: 22-28 (janv. 1973): 60. «Vers l940, à St.-B,, M.J. se levait entre 6 h & 6:30, à jeun, dans le froid de sa chambre blanchie à la chaux, écrivait un feuillet recto-verso. Après quoi, il déjeunait, allait à la messe, désherbait, soignait un ongle incarné. Buvait un verre de vin, bref, vivait & se couchait tôt - dans l’attente, peut-être fébrile, de noircir une autre p. entre 6h & 6:30 le lendemain matin. – 61. […] il est d’une rare fraîcheur & d’une constante invention (méfions-nous de sa prétendue ’naïveté’) quand il lève le rideau sur la scène du Paradis: décors élégiaques de Claude Gellée ou de Watteau, figuration abondante d’angelots fessus, mise en scène écologique. – […]. Il a besoin de la description (& d’une description infiniment plus fouillée que dans l’Apocalypse, par ex.), de l’image forte, de la représentation précise, avec du relief, des couleurs & des formes fermement dessinées pour se faire une idée de l’autre monde. – Mais la peur n’explique pas tout. Cette vision gothique d’un enfer plein de boue putride, […] & de bourreaux lubrique, Max s’en sert aussi comme tremplin pour accéder à une vie sainte.»
THE BANQUET YEARS par Roger Shattuck. N.Y.: Doubleday, 1961, 39. Note. Rééd. revue Vintage Book Random house.Note, 38. «The Banquet Years began to search out a new canon of thought & a new structure of expression. Only one other equally far-reaching attempt to recast the operation of the human mind has been made within the central cultural trad. of the West at the beginning of the Counter Reformation, The Spritual Exercises (1548) of Ignatius Loyola gathered & restated in comprehensible form techniques of spiritual meditation which had been maturing since the Egyptians. Loyola’s means of raising one’s mind to God relies not at all on logic, but on a methodical alteration of attention between the degradation of man & the holiness of the Almighty. It is designed to release the mind into a state of spiritual suggestion, a free association of ideas & symbols leading to divine knowledge. […]. Discursive logic is linear & moves from point to point. Art of the modern era, like religious meditation, is circular & revolves around a point whose location is limitless.»
A BEALU, cité par A. Garreau, 122. «Pas de développements littéraires ou intellectuels, mais le développement du sentiment sans cesse: agrandir le sentiment comme un comédien sincère, ne pas craindre d’aller trop loin. ‘Incapable de prier pendant une heure, je suis obligé d’écrire fixer mon attention’.»
A BONET, cat. No 260. Op. cit.. «On dit que Dieu seul est bon cela signifie que l’homme qui est bon a Dieu en lui-même. C’est ce qui explique pourquoi St. Paul écrit: ‘Vous êtes des Dieux ‘ Oui nous sommes des Dieux quand nous avons Dieu en nous.»
CADOU. Esth. 65-66. «C’est assez cocasse!On vit Robinson Crusoë, ce livre admirable décidément. L’homme est obligé se rappeler qu’il est homme, c‘est à dire poussière & que le reste est illusion qu’un coup de vent éteint (je veux parler des pannes d’électricité). Une demoiselle de la messe quotidienne à qui je me plaignais du manque de luminaires, me dit: ‘Puisse ce manque nous obliger à l’oraison!’ L’oraison c’est l’entretien avec Dieu ou avec soi-même, entretien silencieux & sans paroles. La lampe Pigeon qui s’éteint est une leçon d’oraison.»
---. ---. 28. «La méd. qui agrandit est celle qui approfondit. Une seule idée simple! & la faire descendre! la faire descendre jusq’à l’affirmation, jusqu’à en hurler, jusqu’à en pleurer.»
CHEMIN DE CROIX EN TERMES CABALISTIQES. L. de V. Moremans. Op. cit. 43. «En ce jour de 1926, les attraits de Paris restent les plus forts & le comportement du poète sera pour V. Moremans une cause de stupeur. En effet M.J. entraîne d’abord son ami dans une promenade à travers Montmartre; à l’Eglise St-Pierre, le poète commente le chemin de croix en termes cabalistiques [… ].» (Souv. inéd. de V.M.).
DEFINITON DE LA MEDITATION. Conjuration, apporter la joie de la foi, le rapport avec Dieu & l’univers. Méditer sur le mystère, la joie, la gloire, la clarté de l’univers de Dieu. La méd. est une célébration. [Publié où?].
A DOUCET. 11 janv. 1917. Corr. I. 121-22. «J’ai aussi quelque chose de très important sur les Evangiles: c’est l’interprétation des principales scènes de l’Evangile à l’aide des sciences occultes & de la clef traditionnelle des symboles des religions orientales. Ce livre est hérétique.»
DUNOYER. «M.J. entre le diable & Dieu.» Monde mars 12 1973. P. 14.«Le thème matinal choisi était aussi le paradis &, comme dans ses modèles – L’imitation ou L’Intr. à la vie dévote,[…]mêlées à l’intimité de l’Anc.& du Nouv. Testament & de Saint Paul […] méd. rédigées dans le grelottant petit matin.»
«ENFER OU PARADIS.» POUR EN REVENIR A MAX JACOB. No. spéc.109-10. Texte inéd. «Toutes les fois que je m’immerge dans les sensualités je vais vers l’enfer, toutes les fois que je suis mes mauvais instincts d’homme, les paroles inconsidérées, les petites méchancetés, le besoin de primer, de me mettre en avant, les flatteries, les ambitions non légitimes, affermissent le pied du démon sur moi. Toutes les fois que je retiens la cavalerie de l’instinct je fais reculer les Erynnyes. Collaborons avec Dieu à chaque instant.»
«EXCELLENCE DES VERTUS.» Méd. Réalités secrètes VIII-IX (1960). N.p. «Chaque chose doit être faite avec précaution & à loisir.» (Imitation, I, IV). L’Imitation insiste fort sur ceci qu’il est plus avantageux de s’observer sur la sagesse & la vertu que d’acquérir la science. On ne nous demandera pas ce que nous avons lu mais ce que nous avons fait. Soyez parfaits, dit l’Evangile & il ne dit pas ‘Soyez savants’.»
FORAGE DE PUITS – ACTE DE MEDITATION. Rfl 30 (sept. 1981): 10-15. No. spéc. MJ ou les chemins de la conversion. Plantier. «La méd. ou le travail d’approche du Dieu.» Il définit l’acte de méd. par la représentation mystique du ‘forage du puits’. (p. 13 résumé M.G.). P. 15. «Ecrire rejoint le dire profond & encore faut-il ajouter à ces répétitions, les impératifs, les interrogations qui ramènent toujours au centre, à l’imitation du visage. Pour M.J. toute méd. est un exercice de ré-animation.» Hasquenoph. Op. cit. 159. Cite M.J. «Réflexion du matin. Creusement de mine. Forage de puits pour trouver l’eau de grâce.»
GARREAU. Op. cit. 103. ‘l’Intr. à la vie dévote indispensable pour connaître la vie & l’attitude du chrétien’ «lui dit une jeune fille qui lui avait donné le livre. C’est le cadeau qu’il fera plus tard à la plupart de ceux qu’il voudra convertir.»
LCB. [6]. 20 juill. 1942. «[…] la base de la Sainteté est d’être maître de son Moi, sans doute pour y renoncer & l’offrir à Dieu. Encore faut-il qu’il existe & vous ne savez pas où il est.» - [13]. 19 janv.1943. «Je fais tous les matins les deux méd. commandées par St. François de Sales & ma tête débile est obligée de s’appuyer sur un porte-plume. Gardez donc ce pieux fatras, ce sera un souvenir de moi quand je serai mort. Mettez vous-même mon nom dessus. Je ne travaille à rien; j’ai perdu tout courage, je griffonne sans ambition & peinturlure de même.» - [14] 12 mai 1943. «Quand je vous expédie des méd. ne me répondez pas par des compliments sur ma litt. Vous me faites penser à cette hist.de l’autre guerre italienne. Le capitaine (sabre en main): En avanti. Les soldats (immobiles): ‘bravo capitaine’. Et aussi aux gens sortant du sermon: ‘comme il a bien parlé!’ Si la poésie me vient sous les doigts, tant mieux, tant pis, tant mieux. J’envoie mes pauvres méd. aux amis parce qu’une bonne parole les change un peu d’atmosphère. Je n’y vois pas malice… Je veux dire vanités.»
LJC, 134.12 avr. 1927. «Ma l. est une succession de lieux communs. Les vérités religieuses n’en sont pas, par définition même, autre chose» ; MJ/JC, l. importante 526-29.
LML, 62. 16 août 1937. ‘La méd. est un examen fait pour exciter les émotions (j’entends la chrétienne). […] L’oraison est autre chose. Elle est aussi bien laïque que chrétienne. Elle consiste à fixer un objet ou un être jusqu’à le comprendre, je veux dire s’identifier avec lui.’ «La religion est vécue par le poète comme un exercice de perfectionnement de soi: ses méd. quotidiennes, sa poésie, sa peinture, son travail sur les Ecritures constituent l’approfondissement de sa vie intérieure.» On retrouvera sa conception de la méd. dans Belaval, op. cit. 122.
LRR, 99, n. 10.R. Plantier analyse la passion de l’unité mystique du poète par trois représentations privilégiées dont la plus importante est celle de l’arbre. «La métaphore mystique dans les p. de M.J.» RLM no spéc. 3. 85-93. M.J. écrit ‘Aujourd’hui j’ai mon Arbre’. «Alors le Christ était présent.» R.P. ‘La méditation ou le travail d’approche du Dieu.’ Rfl 30:119 (sept. 1981): 11.
M.J. SE REALISE QUAND IL ECRIT. ORTF – Emission vers l’étranger de langue fr. & les territoires d’outre-mer. Rédacteur en chef André Bayle critique litt. Guy Verdot. Il cite M.J. (à propos des M). «Il se demande ’Qu’est-ce que je fais devant le papier? Et de répondre aussitôt: ‘J’essaie de me réaliser moi-même’.»
RECONNAISSANCE A DIEU. Cadou. «La vie du poème.» Op. cit. 141-42; Nouv. Cah. de Jeunesse 5 (oct.-nov. 1957). Inéd. «Donc, il m’a donné la vie & non celle de l’herbivore. Mais la vie non servile de l’homme. Toi, raie! tracé particulier sur le grand plan divin! regarde-toi regarde ta personnelle bague! Qu’a-t-il fait de toi, le Dieu, que n’a-t-il pas fait pour toi ? – T’a-t-il calfeutré dans une difformité? une cécité, une anémie? T’a-t-il fait naître chez les nègres, les esquimaux ou dans une ferme de montagnards courbés ou dans la misérable banlieue d’ivrognes bourreaux d’enfants? Non, non! j’en témoigne: je me revois au foyer euphorique de parents appliqués, enfant fouilleur de livres, dans un écrin de douceurs, mangeant des poires mûres & jouant du piano. Plus tard /Les arts/lézard & d’un milieu à l’autre zigzaguant, de palanquin en palanquin le filleul des génies & non des pédagogues chez les savants, les peintres & chez les astrologues apprenant malgré soi & jamais orphelin. Juste assez de misère pour apprendre la faim. La décente pitié préparant un chrétien. Et me mener à Votre Seuil, le Méridien! Un jour, l’Ange du Mur! C’était donc pour cela qu’il était tant monté le cancre, cancrelas! Maintenant me voici un discret paroissien. Ah! non certes non pas tel que Vous me voulûtes! Mais, c’est égal, ayant accompli le volute. Je suis une bâtisse de vous & non de moi. Je reconnais Vos Mains à chacun de mes bois & quand je viens vers vous reconnais Votre Voix.»
«MENDIANTES PROFESSIONNELLES»
«M.J. ESQUISSE UN PORTR. CRUEL DE SOLA BRUGNON qui est devenue chef de bande de mendiantes qui utilisaient les noms & les adresses de leurs amis de jadis.» Georges Auric. Paris: Mesnil, 1949. «M.J. retrouvé»; rééd. Biblio 17:1 (janv. 1949): 7-9; Repris Cah. M.J. 8. 45-48.
MORCEAUX CHOISIS
VM, 224. «Le Comité rechignait devant les Morceaux Choisis. Ne seraient-ils pas ennuyeux, trop cath., invendables? »
MORVEN LE GAELIQUE
LJF, 233. Oxenhändler cite Le Roy. «Plus question de pastiche… Max s’y inscrit dans sa lignée. Ce luxuriant improvisateur, qui vivait au rythme de l’historiette & de la chansonnette, avait le don de la poésie populaire, la seule qui sans redevance lyrique, par de simples traits de nature, sans d’écrire, par le plus cursif des croquis, nous ouvre un monde d’amour & d’amitié. Il rejoignait la plus pure tradition; il réinventait la poésie de la Bretagne selon le génie de son peuple, & non sans rupture de style nous donnait, avec la plus jolie voix bretonne, la version fr. de Soniou inéd., de Soniou au goût du jour, mais qu’auraient cru reconnaître les ouvriers brodeurs de l’atelier paternel.»
LML, 77. St.-B. 13 juin 1939. «Bretagne de patience où la notion du temps s’écarte s‘ouvre & s’arrête.» [Extr. du texte de M. Levanti]’. Je ne savais pas, ajoute M.J. que la simple intelligence de l’intelligence d’un autre pourrait faire naître le sublime. Cette ligne est ‘du sublime’, car elle dépasse le créé, elle donne une notion précise & poétique & exacte de toute une race & en même temps enveloppe tous les Morwen.’
LLP, 82. 2 avr.. 1927. «[…] c’est un nom que j’ai pris pour abriter une veine celtique peu en union avec le cours du siècle surréaliste.»
LTB. A Moricand.25 mars 1941. 121. «Imagine que tu es toi-même un paysan, prends l’accent; ainsi faisais-je pour les Morven le Gaëlique, sans compter que cet exercice est très sain pour l’esprit qui descend plus bas.»
LUA, 70. Ploaré chez Pierre Colle, 31 août 1927. «Tu me fais bien plaisir en aimant Morven qui est mon mou de veau.»
ROUSSELOT. «M.J. LE GAELIQUE & MORVEN L’HEBREUX.» Nouv. Cah. de Jeunesse (oct.-nov. 1957): 4. «M.J. peut bien dire «Morven, c’est mon mou de veau! ou ‘je vais m’amuser à faire la carrière de Morven. Je le pousserais jusqu’aux décorations & qui sait jusqu à l’Académie. Quelle tête feront-ils quand ils verront que Morven n’est autre que l’enfant martyr.»
NE COUPEZ PAS MADEMOISELLE.
Ill. de 4 lithos hors-texte en couleurs par Juan Gris. 112 ex. numérotés. Tirage unique à 100 ex. sur Hollande van Gelder dont avec une suite tirée sur chine ancien & 12 hors com. Galerie Simon. 1921. Imprimerie Birault. Ed. orig. 32 p.
GARNIER. Europe, no spéc. 42. Publié sous l’appellation ‘conte philosophique’. «Mais la distribution des rôles, la forme du dialogue dans le burlesque & l’ironie, la satire psychologique & sociale, inclinent à dire que cette œuvre prend place dans les innombrables ‘portr. par le théâtre’qu’a écrit M.J. […]. L’intrigue est mince […]. Tout est dans le mot, le trait de caractère, la situation humaine, & leurs ombres aux contours ridicules.»
LE NOM
PERARD, 62-63. «Dans le genre ‘joli’:le Nom (1926). Saskia est le nom (russe? hollandais?) de la jument de course du baron Morfeuil. C’est aussi le nom de la propre fille du baron, descendante des Pizarre, élève au Couvent des Oiseaux, admiratrice de Tourgueniev & surtout d’un prince russe dont elle s’éprend. Il l’épouse & la ruine. Le prince communiste & communard abattu d’un coup de fusil, elle devient institutrice comme une cousine du tsar & devenue caissière: Mme Saskia langues étrangères, spécialité de russe.»
LRR, 4 oct. 1923. 103, n. 38. Publié en 1923 en Europe, en 1926 à la Lampe d’Aladdin (sic). 2e éd. 5-6. «Certes il est toujours pénible pour une mère pieuse de savoir à sa fille le nom d’une jument, mais quelle douleur quand on compte parmi ses ancêtres sainte Rose de Lima, car la baronne était péruvienne quoique blonde. […]. Qui ignorait que la jument victorieuse au Grand Prix de ce Printemps était de l’écurie Morfeuil & se nommait Saskia? Or le cruel baron sacrifiait à sa gloire tous les scrupules religieux & plusieurs autres; il dotait sa fille d’un nom qui n’est pas mentionné par les Bollandistes mais qui a fait durer le souvenir de son triomphe éphémère autant que la vie que nous allons conter. Pauvre baronne! prévoyiez-vous que ce nom de jument allait peser lourdement sur l’enfant que vous mettiez en ce monde? – 7. La baronne ne put retenir des larmes lentes quand le baron lui annonça l’horrible nouvelle. ‘Madame, lui dit-il, avec cette politesse dont il ne se départait jamais, votre fille s’appellera Saskia.’ La blonde accouchée devint blanche comme son lit qui était blanc comme son âme. – 10-11. Quand on eut résolu de confier au couvent des Oiseaux l’éducation de Saskia, la sœur préposée aux relatons extérieures, après avoir vérifié dans les Bollandistes qu’aucune sainte n’avait honoré ce vocable ‘Saskia’, fit observer qu’une maison bien tenue ne pouvait recevoir une pensionnaire que le calendrier ne protégeait pas. Mme la Supérieur prit en considération la fortune des Morfeuil, leur situation dans le monde, l’hôtel de la Chaussée D’Antin, le donjon du Bas Poitou & trouva un moyen terme.- On la nommera Marie des Anges pour éviter le scandale, dit-elle. N’est-ce pas mon enfant? Acceptez-vous d’être appelée Marie des Anges par vos compagnes? Je suis Saskia de Morfeuil! répondit la descendante des Pizarre, on ne me changera pas de nom comme on fait aux femmes de chambre. – 12. dix ans de couvent & dix ans de souffrances! Qui peut rien sur la méchanceté de chères petites compagnes de classe? ‘C’est la jument de votre père/ Casaque rose & toquet vert/ C’est la jument de son papa/ Qui l’a baptisée Saskia’ chantaient les bonnes camarades en tournant autour de l’infortunée. Et le sang des Pizarre ne peut rien sur les foules. Que peut le sang des courageux Pizarre sur la méchanceté des petites filles? Souffrir & se taire.– 14. Tu avais une vraie figure de Saskia, ma pauvre enfant, tu en avais aussi,- qui sait – la destinée. Tu n’as pas épousé un peintre hollandais du 17e. Je vous laisse rêver sur ce rapprochement. – 15. Voici comment une jeune fille élevée dans les plus purs principes de la bonne éducation chrétienne vers 1850 devint, grâce à un prénom chevalin, intellectuelle, républicaine & même davantage.»
CAT. BONET. Op. cit. P. 82. No 273. Ed. originale tirée à 396 exemplaires. Un des 40 ex. numérotés (no 29) accompagné d’un dessin original à la plume de M.J. représentant ‘la pauvre Saskia’ & envoi autographe à Claude Pascal, 1942.»
D’UNE L. A KAHNWEILER. Corr. II, 216. 12 oct. 1923. «Si tu as le dern. no d’Europe, lis un conte de moi appelé ‘le Nom’, c’est très joli: un critique déclare qu’il y a ‘vu des noms russes comme dans Carco, alors il n’a pas lu’ […] ces gens-là sont affreux, & ils éclairent les lecteurs.»
LES OEUVRES BURLESQUES & MYSTIQUES DE FRERE MATOREL MORT AU COUVENT DE BARCELONE
A KAHNWEILER. 43. 28 avr. 1910. Corr. I. «[…] j’ai mis sur pied trois vol. de p. qui vous agréeront peut-être un jour. Le prem. s’appelle ‘Poèmes burlesques’, il contient des parodies, des inventions burlesques, des jeux de musique verbale, des chansons, & obtiendra le rire qu’il désire faire naître. Le second s’appelle ‘Poèmes d’Orient & de Bretagne’; il est plein d’intimité & de confessions quotidiennes. Son charme est dans sa grâce & sa tristesse; c’est le - côté verlainien du pauvre Lélian que je suis. […]. Le 3e s’appelle ‘Le livre des Enigmes’. C’est une série de p. persans très colorés qui sont faits pour faire croire à mon génie, si je puis dire.»
---. 63. 5 oct. 1911. «Je ne saurais trop insister sur ce point, mon cher ami, que tout le sel du livre est dans le contraste qui existe entre le burlesque & le mystique, & c’est l’essentiel.»
ANDREU. «M.J. premiers poèmes.» Points & Contrepoint. 110 (mars-avr. 1974): 41-42. «Max, dans le prospectus de son livre, avait osé risquer le mot ‘véritables poèmes en prose’, mais en 1912, & plus tard aussi, personne ne s’en aperçut. Il est vrai qu’outre un tirage très limité – la prem. éd. ordinaire date de 1936 - le caractère étrange de l’œuvre ne permettait guère, sous ses mille coquetteries, obscurités, aveux & détours, d’en saisir vite l’importance & la signification. – Il fallut attendre 1917, l’ébranlement de la guerre, le cubisme & le coup de clairon du CD pour savoir que le p. en prose jacobien était né. Et pourtant, conçu dès 1904-1905, il était né dans l’obscurité cinq ans auparavant.»
---. 41. «Il semble – de même qu’on n’en avait pas bien mesuré l’importance spirituelle avant les travaux de R.P. Blanchet – que la place qu’occupent les OB dans la poésie de M.J., n’ait pas été jusqu’à maintenant, en dehors, en 1924, d’une remarque très profonde & vite oubliée de Frédéric Lefèvre, exactement perçue. Nous nous trouvons, en fait, surtout dans la ‘deuxième partie’ – la ‘troisième partie’ faisant, pour la prem. fois, comme l’a montrée le P. Blanchet, le récit de l’Apparition & relevant d’abord de la mystique, comme le pensait M.J. – en présence du prem. recueil de p. en prose de M.J.»
BONNEFOY, CLAUDE. La Poésie fr. Seuil, 1975. «Son prem. recueil, les OB parut seulement en 1912.»
CADOU. «L’œuvre de M.J.» Cahs. du Nord. No. spéc.181-82. «M.J. se mire dans la glace à trois faces (classicisme, romantisme symbolisme) du Frère Matorel […]. ‘Les chants vraiment nationaux’ qui figurent en tête des ‘Pièces Burlesques’ ne nous permettent pas encore de deviner en Matorel ce singulier personnage qui devait porter la machine infernale sous le vieux break du passé. La parodie est encore trop proche de la vérité. Moquer Botrel ou Déroulède est à la portée de n’importe quel élève de rhétorique, mais parodier toute une école, dresser un ‘A la manière de’ avant la lettre de toute une école & cela sans qu’on puisse désigner du doigt tel out tel maître, c’est autrement fortiche, aurait dit Max. […]. 181. Loin de vouloir se jouer de son lecteur, M.J., dans les OB, s’attache, non point tant à parodier qu’à démontrer les ressorts du ‘bel art’. Matorel, premier état de M.J., découvrant la Littérature, met à jour l’élément grotesque des écoles [...].»
GUIETTE. Op. cit. 122. «En 1911encore, M. Kahnweiler demanda à Max un autre ms. Max rassembla une foule de p. de tout ordre & de tout genre, & dans lesquels il déclare aujourd’hui voir le germe de toute sa production poétique. – Les OB parut le 20 avr.1912. Ill. de gravures sur bois par A. Derain. – ‘Matorel, sorte d’Hamlet du Faubourg Saint-Antoine, qui fut commis dans une fabrique de meubles, boul. Voltaire, puis porta l’uniforme du métropolitain. ‘[…]. Poèmes de formes variées. Caricatures, d’ailleurs charmantes, de romances sentimentales & patriotiques. Qui-proquos, équivoques, parodies des modes litt., symbolisme même, etc. ; ’Matorel dira ce qu’il sent, ce qu’il voit à travers les charmants nuages de sa fantaisie.’ –123. Ces poèmes furent composés à Paris, 7, rue Ravignan & à Quimper (Finistère), de l’année 1906 à l’année 1912. […]. Les p. en prose […] datent d’avant 1910. Ils prouvent bien que Max a inventé le genre, avant Reverdy & Cocteau. On voudrait bien s’en souvenir lorsqu’on lira la préf. du CD. Max dit: ‘Mes p. en prose étaient, grâce à des amis de Picasso, connus de la jeunesse espagnole (notamment de M. de la Serna), avant même la parution des OB, qui datent de 1911.»
PERARD. 30. [Ouvrage] ‘connu des jeunes d’alors, réservoir où tout le monde a puisé sans dire merci.’ «est un livre-clef, comme SM, roman (1911) & SJ drame céleste(1914),car Matorel est le double de M.J. ‘Tout le sel du recueil est dans le contraste entre le burlesque du commencement & le mystique de la fin, le métaphysique étant en milieu.’ Les pièces burlesques, trois fois plus nombreuses que les mystiques, parodient & caricaturent les rengaines de l’époque. C’est la série des ‘Chants vraiment nationaux’: complaintes (l’une sentimentale, l’autre électorale’), romance, chansons des rues, grand récitatif dramatique pour salons, pièce ‘pour les enfants & pour les raffinés’. Puis ce sont des jeux de musique verbale, des recherches de rimes & de rythmes.»
PLANTIER. MJ. 33. «Il y avait dans SM un chap. Intitulé: ‘Chap. des remords.’ (48-52), où le sens de la culpabilité annonçait l’appel au ‘sacrifice’ & au ‘renoncement’ (79). Dans les OB le sens du péché s’accentue. Il s’accompagne d’un désir de résistance, pour mériter l’accueil dans la communauté: ‘Mon âme se provoque à la lutte! Nageons à grand renfort de muscles, on nous accueillera sur la rive de l’Eglise’ (257). Les accents de Verlaine soutiennent une sorte de plaidoyer, de supplication, comme si le poète en appelait les jugements portés sur lui par ceux qui le connaissent: ‘Ah! si l’on savait pourtant/ Combien tendre & repentant/ M’a fait la mauvaise fortune.’ (251). Les rapports entre l’homme & sa conscience sont organisés sous le signe de la discorde. Bourreau de soi-même, il ‘martyrise’ son âme en la prostituant: Ah! Pourquoi? Pourquoi…’(260). Plus de dieux & de ciels dans ces p. en prose de la 2e partie, mais l’apparition du mal personnifié par Belzébuth, ou par la mort.»
THESE DE SAINT-THOMAS. 85. «Pour présenter les OB, le poète se sert du procédé de l’autocritique. Les p. sont accompagnés d’un commentaire moqueur qui méprise, badine & tourne en dérision les prétentions du ‘petit fou’ qui se dit ‘littérateur’. […]. 87. Les p. de ce recueil sont le résultat d’un effort constant […]. Il représente le terme d’une recherche soutenue, pour atteindre à un nouveau mode de connaissance poétique. De crainte que cet effort ne soit ridiculisé par les autres, amis ou ennemis, M.J. sera le prem. à se moquer de son recueil de poèmes.»
LES PENITENTS EN MAILLOTS ROSES in BALLADES
CLAUDE ROY. Préf. Ballades. 9-10. «Mais la dissonance est son lieu, la rupture de ton sa constance, & son repos le mouvement perpétuel. Avant d’intituler un recueil de 1925 PMR, M.J. essaye des titres en zigzag d’antithèses, où l’étincelle passe violemment du ‘sublime; au ‘burlesque’: ‘Le confessionnal hanté’, ‘Le Clown à l’autel’,’ L’Evêque à la Foire’. […]. La brisure dans la poésie de M.J., c’est comme le choix de la souffrance dans la conduite du masochiste; une assurance sur le risque, une précaution, une ‘mithridatisation de la mort’ certaine.»
ENVOI A JOSEPH PERARD. «Vous m’appelez ‘maître’, O folie! Lisez ce livre, & dans le quadrille d’arlequin de son tissu, vous qui savez lire, vous ne lirez que doutes & faiblesses.» Op. cit. 39 ; Bibliographie de M.J. 135.
PR, 279. «La PMR est […] complexe: la nature du recueil à l’instar de son titre, est, […] double car il rassemble poème profane & p. religieux. Il est parfois impossible […] d’attribuer certains p. au genre profane ou au genre religieux.»
PETITE ASTROLOGIE
MAX JACOB. PETITE ASTROLOGIE.Présentée par Marcel Béalu. Le Bibliophile Rémois, 1989. 5-6. «M.J. est né à Quimper le 12 juill 1876 & non le 11, comme l’ont écrit plusieurs de ses biographes. Il est de la 3e décade du Cancer qui donne: passivité, bonté, quelquefois mensonge & sensualité. Le mensonge du lunaire qui confond la réalité & le rêve. Mais lisons la description de ce signe, en complément à celle que le poète lui-même en donne plus loin, dans le petit livre sus-mentionné [MA]: ‘Goût de l’occulte. Gai, aimable, poli jusqu’au sacrifice. Chatouilleux & agressif. Aime à conter des choses étonnantes. Heureux dans sa misère; victoires obscures. Susceptibilité maladive. Toujours une certaine amertume dans les paroles. Sarcasme. Se tait par orgueil. Menteur par orgueil. Vantard. Horreur des phrases. Ils sont brefs. L’écoulement (signe de l’eau) se manifeste dans la conduite générale de la vie; on laisse échapper les chances. Le goût du neuf, de l’imprévu.’ – Je m’arrête à ces citations, n’ayant pas l’intention de dresser à mon tour l’horoscope de M.J.»
LE PHANEROGAME
ANDREU. «M.J. romancier.» RLM no spéc. 2. 23. «[…] il avait publié une œuvre de prime jeunesse, Le P, dont Aragon écrivait dans SIC qu’elle le faisait penser à La Bruyère. – 24. La construction des romans de M.J. reste classique & il me semblerait plus juste de dire qu’ils sont expressionnistes.» [Rés. par M.G.] G. Bounoure remarque en 1923 que son ami n’écrit pas des ‘romans naturalistes’, parle du ’réalisme joli, narquois, malin’. «Ne cerne-t-on pas là, avec Bounoure, la réalité de plus près, plutôt que de se contenter d’une appréciation brillante? Dans cette analyse très fine de l’art du romancier, Bounoure souligne fortement que dans les nouvelles & les romans de son ami, sous cent masques divers, […] on ne trouve que M.J. – Réf. De l’article de G.B. «M.J. romancier.» Intentions 18 (sept.-oct. 1923): 4-21. – «Le P est à la page de 1905 où il fut écrit: c’est mon prem. ouvrage & le meilleur peut-être puisqu’il me montre entier dans cette gaîté de la prem. jeunesse qui est l’âge d’or de l’art […].» (Corr. I, 171 à R. Manuel, 18 avr. 1918).
A PAUL BONET. Cat. P.78, no. 263. Op. cit. «Si vous aimez les idées vous en aurez à toutes les pages. Je crois qu’il y en a trop & de trop folles. C’est ce qui nuit à ce livre. On n’aime pas les idées & surtout pas celles qui n’ont pas le bon sens fr.»
DENOEL, J. «Note Liminaire» au Roi de Béotie, Gallimard, 1971, P. X. «Sa méthode de travail, M.J. l’expliquait lui-même à propos du P. «…je fus un soir au cirque Bostock & j’y vis un acrobate […] Place Clichy, qui, parvenu au sommet de la voûte & d’une corde se suspendait par les dents parallèlement au plafond. ‘Ah! me dis-je, voilà ce qu’il faut faire avec son cerveau.’ Alors commence pour moi une étrange vie! Je partais de la rue Ravignan tous les matins au jour, j’allais à pied jusqu à la place de la Nation, de là jusqu’à la cascade du Bois de Boulogne & je rentrais pour me coucher, ivre de jeûne, de méditations & de fatigue. Voici quels étaient mes exercices: il s’agissait de trouver une idée sur chaque carte postale vue dans l’une ou l’autre boutique. Si je ne trouvais pas l’idée, il fallait que je restasse immobile jusqu’à ce que l’idée vînt. J’emplissais ainsi lentement de pauvres carnets d’un sou avec un pauvre crayon… »
CABANNE. Le Siècle de Picasso. Op. cit. 325. «Quand le P de M.J. paraît, Pablo a la surprise de s’y découvrir dans une série de cartes postales, ‘les yeux au ciel’, entre Rimbaud, Lamartine & Rodin.»
CAT. MJ & P, 167, n. 112. «Le livre est dédié ‘au poète André Salmon en souvenir de la rue Ravignan’. Avec la gravure de Picasso.»
DV, 53. Nlle éd. 88. Envoi. ‘A M. B. en témoignage du temps des acrobaties & pour l’encourager à en essayer quelques-unes comme gymnastique (évidemment)’ ; Bibliographie de M.J. 136; M.J. dans ses livres. 22, no 30.
FOLLAIN, J. «Entre le badinage & la gravité douloureuse.» Monde 22 mars 1969. «Lorsque j’étais jeune homme, j’allais à pied sur un boulevard extérieur, d’un réverbère à l’autre, lentement, m’imposant la découverte d’une image nouvelle entre deux réverbères.»
GARREAU, op. cit. 98-99. M.J. PROPHETIQUE, IL ANNONCE LA GUERRE. «En note au chap. IV du P, M.J. indique: ‘Ecrit entre 1903 & 1907’, datant quelques réflexions sur la guerre qui vient. De même le CD a pu paraître prophétique en un ou deux passages. Max, qui avait des ambitions de voyant, n’a pas manqué de s’en vanter.»
«LE GEANT DU SOLEIL» QUI DEVIENDRA LE PHANEROGAME.
Guiette. 66-67. ‘J’entrepris un second conte que j’appelai Le Géant du Soleil. J’allai le proposer à la même maison. On me renvoya comme un mendiant auquel on dit: ‘On vous a déjà donné.’ Cependant mon camarade me signala l’existence d’une librairie nouvellement installée […]; la Librairie Générale, rue Dante, qui publiait Les Lectures de la semaine.[…]. Le lendemain je recevais un pneumatique qui me remplit de joie. Non seulement le conte était jugé merveilleux, mais on m’offrait de signer un contrat pour en faire un livre, […]. Le conte, Le Géant du Soleil parut en 1904 dans les Lectures de la Semaine. […]. J’écrivis le livre, mais quand je revins à Paris [de Quimper], la librairie était fermée & M. Bonnier, de l’Institut, daigna sourire de mon contrat.»
---. 132. «1917, année du CD. Je recommençai, l’année suivante, à éditer moi-même. Je pris le livre d’enfants, Le Géant du Soleil, qui n’avait jamais paru en volume, & je le saupoudrai de toutes les pensées paradoxales & de toutes les fantaisies dont mes carnets d’un sou s’étaient remplis, depuis bien des années, pendant mes promenades à pied du Bois de Boulogne à la place de la Nation & pendant mes journées. J’avais eu, en effet, des années de gymnastique intellectuelle, m’imposant de trouver une idée d’un réverbère à un autre, & de rester immobile au pied d’un réverbère jusqu’à ce que j’aie trouvé.’ [Voir l’article de Follain]. – Le Géant du Soleil ainsi refait devint le P (1918), ‘un roman humoristique & philosophique dans le genre de Carlyle.’ «Un livre que l’on a beaucoup pillé & que l’on s’efforce, bien entendu, de cacher à ceux qui l’ignorent »
---. 133. «Peut-être ce livre trop riche, où se manifeste petit à petit une logique nlle, est-il aujourd’hui plus accessible que lorsqu’il parut: les reflets qu’on en a trouvé partout, ont entraîné l’œil à en supporter l’éclat. Et ainsi, dit Max, les imitateurs & les emprunteurs peu scrupuleux ont servi celui qu’ils croyaient dépouiller. – Mais le gros succès n’est pas encore venu à cette œuvre étrange. La poésie authentique, la parodie & la science humoristique, toute cette ironie qui fait penser à Jarry & au Docteur Faustroll, se mêlent à un symbolisme d’une lecture un peu difficile. Le public ne se prête pas volontiers à des jeux aussi ardus. – Le P mériterait une exégèse. […]. Le P procède-t-il de sa science ou de sa fantaisie? [M.G. ou des deux à la fois?]. Max a tant lu & tant inventé! »
HENRY, H. «L’absence de Locronan dans l’œuvre de M.J.» Cah. Ir. 16:2 (avr.-juin 1969):107. «[…] le plus énigmatique de ses livres, écrit dès 1910 & publié seulement en 1918 – dans lesquels les savants Psittacus & Tropgrandglaïeul (sic!), échangeant des torrents de banalités dont la prolixité évoque tantôt Rabelais & tantôt préfigure les collages surréalistes & Ionesco – citent pour sa beauté l’église de Locronan.»
PALACIO. ‘Liminaire.’ RLM MJ 2. P. 4. «Ce no. spéc. explore seulement le caractère très partiel de l’univers romanesque jacobien. Palacio retient «d’ores & déjà la possibilité de consacrer à l’œuvre de fiction, & à des genres totalement négligés comme le roman dialogue (voir le P), la lettre imaginaire (voir CN) & les mémoires des autres ( voir C) […] un fascicule ultérieur de la présente série.»
---. «Le sang & la crucifixion.» Op. cit. 594. «Lorsqu’en janv. 1917 J. Doucet lui propose d’acheter ses ms., Max lui fait une sorte de présentation de son œuvre dans laquelle la notion de labeur poétique apparaît au premier rang de ses préoccupations. (Cf. Pelletier. Monde. «Le ms. du CD.») Parlant du P, il écrit : «C’est mon premier ouvrage, il date de 1905 & a coûté des années de travail. […]. Entre M.J. & ses livres, il y a un rapport quasiment organique. P. 595. Pour lui, ses ‘livres’ sont véritablement les ‘arbres du sang’, & il se confond avec eux, au point de pouvoir écrire à un de ses correspondants: «Car c’est m’aimer moi-même que d’aimer mes vers.» Note 12. L. inéd. (dest. non identifié), 14 oct. 1933. Coll. pers.
PERARD. 11. M.J. lui écrit le 27 fév. 1927: ‘Mes livres sont une expérience, chacun d’un genre différent où je m’essaie: j’y apporte quelquefois du nouveau, on s’en aperçoit assez pour me voler & se taire.’Ailleurs: ‘Ce que j’ai fait ne me plaît plus, je m’ennuie à répéter la même chose.’ - 55. «Le P, écrit entre 1904 & 1907, ‘mis debout’ en 1910, publié seulement en 1918, montre l’auteur dans la gaieté de la prime jeunesse ‘qui est l’âge d’or de l’art.’ Notre exemplaire porte cette dédicace: «Les trottoirs de la Place de la Nation à la Cascade du Bois de Boulogne & les souliers défaits d’un poète qui n’avait pas de pardessus! Le voici avec un pauvre carnet & des trapèzes volants pleins la cervelle. Journées d’ivresse, vous êtes les seules belles de ma vie.»’ L’avis important’ de 1918 annonce le portr. d’après nature du dilettantisme des années 1900-1905. Il a beau ajouter: ‘Nulle part ce livre ne relate les opinions de son auteur. On appréciera celles de ses héros.‘ C’est aussi le portr. d’un jeune dilettante qui ressemble fort à l’auteur. Ce premier roman, plein d’humour & d’idées, dans le genre de Carlyle, presque tout entier en dialogues, se compose de paradoxes sur le droit & sur mille détails du commencement du siècle. Rétrospectif & aussi prophétique (la guerre), comme dans le CD) – Vers 1940, M.J. écrivait: ‘J’ai lu le P avec plaisir; ça ressemble à un tableau de Modigliani: des cous trop longs & beaucoup d’esprit, un vrai grain de folie sérieuse. Ça ne me déplaît pas. C’est écrit pour les amateurs d’idées - & il n’y a pas d’amateurs d’idées.’ [Cité: Cadou. Esth. 73].
---. 70. «Quelle fantaisie, par ex., dans le P !L’Américain volant tombe surHonfleur. L’Académie dépêche MM.Tropgrandglaïeul, Haineabord, Psittacus: avec eux le P. Dans l’express, ils parlent de la matière, de l’intelligence aspect de la matière, du génie excès de matière, du plaisir, des femmes, des 12 espèces d’adultères simples. A Lisieux (14 heures d’arrêt), le perroquet récite l’article Lisieux du Dictionnaire, le Yankee le baillonne. Au contrôle, n’ayant pas de billet, il s’envole. Honfleur, la fête (chap. du chat pitre): grande cavalcade en 2 parties: celle du Bottin des départements & celle du Bottin de Paris avec 35 chars: Fracasse & Rodomont annoncent. Le soir, dans une baraque foraine, scène héroï-comique: le dompteur & sa fiancée apprennent de leur ‘mère’ qu’ils sont frère & sœur, les pistolets parlent, le dompteur s’enfuit. Sur la place illuminée, inauguration du P. Nos savants haranguent la foule: science & religion. Ils voient dans le héros du jour un fumiste & un assassin. Lui résigné dit: ‘Je suis Louis XVII’, & chante: Bâtard d’un pape & d’une impératrice…’ Morceau d’ensemble final & chœur: ‘Cette soupape de sous-pape…’ La nuit, au commissariat (‘les colles des codes ou le maître des colles’), on tire au clair le crime: les pistoles n’étaient pas chargés, ‘erreur judiciaire’. Apparaît un prétendu mort, duel avec le dompteur, & l’aviateur est conduit au violon avec les autres. On l’enferme à l’Asile des Dégénérés Supérieurs, c’est-à-dire des gens intelligents, consciencieux, tempérants, pieux, artistes, originaux, etc. qu’il ne faut pas confondre avec les Dégénérés Inférieurs, idiots, crétins, aliénés, hydrophobes. […]. 71. L’homme-oiseau, vivant au milieu des fantoches & d’une foule inconsciente, s’envole, laissant tomber des pages sur la prière. Par l’art de l’ironiste tous ses paradoxes, […] font éclater la vérité. […].»
PFAU, 93. [Trad. M.G.]. En contraste avec les autres romans & les lettres imaginaires, montrant un certain réalisme, au moins dans quelques détails, bien que M.J. critique sévèrement le réalisme dans ses lettres & son Art poétique, mais le P c’est de la fantaisie pure, avec quelques détails allégoriques.
---. Les idées de Hainabord révèlent l’oppression du prolétariat par la bourgeoisie, comme si les ouvriers étaient des diables. Tropgranglaïeul va même plus loin quand il développe cette attitude. – 90. Il déclare: ‘La guerre mène à l’harmonie, tandis que la paix au désordre, etc.’ – 103. C’est une parodie, avant la lettre de l’idéologie fasciste.
---. 104. L’exagération fantastique de la plaisanterie macabre deviendra 40 ans plus tard une réalité horrible.
ROUSSELOT. «Extr. d’une contribution à une esth. De M.J.» Créer no spéc. 35. Il admire La Bruyère au point qu’il dit «En prose [j’ai] essayé de faire du La Bruyère.»
RIVAGE
«CE LIVRE EST DEDIE A L’EXCELLENT ROMANCIER RENE LAPORTE mon ami en l’honneur de son mariage. 7 mai 1931. Max Jacob, futur chevalier de la Légion.» Hommage à M.J. au Musée de Montmartre. 48, no 198 ; Bibliographie de M.J., 137.
PR, 584. «R laisse entendre parfois un accent plus heureux, pour chanter les bienfaits de la messe. ‘A moi présent, Lui présent vient d’ailleurs/ Me coupe en deux d’une douceur de mer/ étale ce corps d’Adam pourri, l’aère.’ (R, 189).»
LE ROI DE BEOTIE
"A TOI QUI QUE TU SOIS qui achètes mes livres, songe que d'un auteur c'est la clef qu'on te livre" - écrit M.J. en tête de l'éd. de 1921 à la N.R.F. Bibliographie de M.J., 137.
BERTRAND, GERALD. L'Illustration de la poésie à l' époque du cubisme. Klincksieck, 1971. 77. LE REALISME & LE REEL. "Les poètes savent gré aux peintres d'avoir affirmé, & de quelle péremptoire façon, que la réalité artistique est à l'opposé du réalisme. M.J. écrit à Kahnweiler: 'Tu as parfaitement compris l'objet de mes recherches. Création de personnages réels & non réalistes. Cette idée est formidablement cubistique...' Corr. II, cité par E.M. Garvey, op. cit. 48. 79. M.J. opposait les personnages réels aux personnages réalistes."
BULL. CRITIQUE DU LIVRE FR. No. 3/7 (mai 1972): 579. " Nous ne cessons de découvrir M.J. Nous connaissons le poète du CD, le romancier du TB, & dans certaines lettres de fiction, le conteur plein d'humour féroce, de truculence alliée à une satire de la petite bourgeoisie avec une certaine sensibilité narquoise, apparaît ici. - Les 'Nuits d'hôpital’ sont d'un autre ton: la pitié, la révolte & même l'horreur s'y mettent nu."
CASSOU. "M.J. & la liberté." Op. cit. 463. CONFESSION BRULANTE.- NUITS D'HOPITAL. "Cet esprit merveilleusement inhumain ne se maintient pas toujours dans son insoutenable comédie: il se retrempe, par éclairs, en une sorte de confession brûlante & de brève & transparent apocalypse où passent des souvenirs de misère & d'hôpital & où l'homme, rejetant, un à un, tous ses masques, tente de retrouver sa véritable essence. Tragique retour qui ne donne que plus de prix aux fantasmagories par lesquelles un poète solitaire délivre son génie."
CONNAISSANCE DES HOMMES (1972). "Le RB que le docteur Szigeti tient, non sans raison, pour un des meilleurs recueils du poète, contient 3 textes depuis longtemps introuvables. La préf. récente - 1971 - de J. Denoël éclaire (des pages inattendues fascinantes, noires parfois, complètement dégagées du Côte) ‘écrivain farfelu' qui chez Max se substitue le plus souvent au jongleur d'images "que nous découvrons dans ce livre."
DEDICACE AU RB à l’ex. no XCIV à la BMQ: «Quand jétais roi de Béotie.» A Roland-Manuel. «Quand j’étais roi de Béotie/ J’avais des sujets des soldats – Offenbach -… depuis que j’habite à St.-B. dans un monastère je n’ai plus rien que la foi. Ceci explique le titre. Max Jacob, 14 sept. 1922.»
DERN. NOUVELLES D'ALSACE 4 mars 1972. "Le vol. RB qu'il faut lire absolument. A notre époque de littérature trop intellectuelle, voici un maître conteur. Un style bondissant. Une invention qui a la fièvre de la liberté. Chaque récit, parfois très court est un roman en soi. [...]. M.J. est le 'prestidigitateur du quotidien,' selon J. Denoël qui préface le volume."
DEVISE DU RB:«Toujours mieux écrire.»
DV, 282.Nov. 1942. «Livre rempli d’émotions, de folies & d’exactitudes humaines. Pourquoi? Parce que je me suis donné la peine d’écrire en bon style d’entrailles & d’écrire toujours.»
GARREAU. Op. cit. 112. «Un soir, le 27 janv. 1920, allant à la 2e représentation du ’Tricorne’ de Manuel de Falla à l’Opéra, en grand arroi, habit noir, chapeau haut de forme & monocle, il est renversé Place Pigalle par un taxi. Il est envoyé à l’hôpital Lariboisière. Expérience très utile, alors qu’il commençait à se croire membre de la haute société, ayant droit à tous les égards. Le voici traité comme un misérable parmi d’autres dans cette triste centrale de maladies qu’est un vieil hôpital parisien.»
HENRY, H. «Le Roi de Bétie de M.J.» Europe. (Mai-juin 1972): 249. ARRIVER AU REEL PAR DES MOYENS NON REALISTES. «Tant de diversité dans la composition & l’écriture ‘arriver au réel par des moyens non réalistes.’ ‘Beaucoup de contes du RB n’ont pas d’autre but’, disait-il encore à Jean Cocteau.»
LJF, 243.19 sept. 1935. FIEVRE. «Profitons de la fièvre pour écrire des poèmes & gardons-la toujours de quel nom qu’on le nomme.»
LLG, 93.13 mars 1942. [Le RB]«date d’une époque de grand travail de style, je crois. A part les ‘Nuits d’hôpital’ griffonnées dans la fièvre & pas retouchées à cause du respect que j’ai pour l’inspiration […]. –163. 21 juill. 1943. J’aime aussi le RB, livre méconnu qui contient beaucoup de bonnes choses.»
LLP, 14. De l’hôpital Lariboisière, 14 fév. 1920. «Je suis entouré […] de braves pauvres qui m’aiment parce que j’écoute leurs rêvasseries. - 16. 22 fév. 1920. «Malheur aux pauvres! Quand il s’agit de les faire tuer c’est vite fait, mais pour les sauver y a plus personne. Ce que c’est que la maladie pour eux: les rebouffades du petit personnel, le mépris complet du grand & pas un ami dans la salle.»
LMM, 138. 22 nov. 1943. «Il m’est arrivé assez souvent d’écrire d’une manière rimbaldienne soit parce que je cherchais dans mon inconscient (j’ai été le prem. à la faire: 1898 ou 99) comme dans ‘Nuits, d’hôpital & l’Aurore’ pour donner l’impression de la fièvre & du lit […].»
LETTRE A FRANCIS-GERARD ROSENTHAL. «Ce livre est à cheval sur toutes les phases de ma vie.» PJ.
LRV, 90-91, 13 sept. 1939. M.J. SUR SON ACCIDENT & RB. «En 1927, je me rendais à la représentation du Tricorne dont les décors ont été le triomphe de Picasso, j’ai été heurté par un chauffeur ivre, j’ai glissé sous la voiture & j’ai eu simplement la clavicule brisée. [M.J. se trompe, c’était en 1920]. Il n’y avait place Pigalle ni agent à 8 h 30 du soir, ni pharmacie ouverte. Je n’ai pas prononcé les paroles qu’on me prête. A 10 h. du soir j’ai été transporté à l’Hôpital Lariboisière; on m’a laissé seul sur un asphalte ouvert partout. Et à minuit seulement une dame infirmière s’est avisée de me donner un bain: l’eau ayant coulé froide j’ai attrapé une fluxion de poitrine. J’ai raconté tout cela dans le RB.»
LUA, 47, [Fin 1924 ou janv. 1925]. FIEVRE & VISIONS. «[…] la fièvre installe des visions assez intéressantes: une hyène à la porte du monastère quand j’y passe. Ce qui est curieux c’est qu’elle a été dessinée par Cocteau dans cet album merveilleux qui vient de paraître & ’que je ne connaissais pas’. C’est ainsi que j’ai trouvé dans le théâtre de Cervantès la description d’un démon qui est décrit dans Matorel.»
PERARD, op. cit. 63. «Max conte une immense misère sans aucune miséricorde. Un soir d’hiver, place Pigalle, il est renversé par une voiture folle. A l’hôpital Lariboisiére, on le laisse seul, demi nu, sur une chaise de fer, dans un préau. Le lendemain les médecins se demandent comment les roues d’une voiture ont pu déterminer une congestion pulmonaire. Il signale, ‘dans l’admirable service des hôpitaux, cette imperfection: des négligences dangereuses à l’arrivée des malades. ‘Ce n’est pas sa cause qu’il défend, ‘c’est celle des pauvres & au nom de Notre Seigneur Jésus-Chist: la soc. entière sur une chaise de fer dans un préau en plein hiver.’ Il signale les nuits sans un verre d’eau, sans remèdes, sans piqûres, parce que l’eau, les remèdes, les ampoules, ‘tout est sous clef, & la clef est loin, & la dame qui a la clef ne viendra qu’à son tour.’ Il signale ‘le mal du siècle, le mal des siècles […], l’ignorance de soi-même & des autres, la seule qui compte’, & par corollaire l’ignorance de Dieu.»
PFAU. «Le Portr. de l’artiste… » Op. cit. 24. LA FIEVRE DANS ‘NUITS D’HOPITAL & L’AURORE’. «où nous retrouvons la reproduction des fantaisies enfantées par la fièvre dans son imagination à la suite d’un accident d’automobile en 1919 [c’était en 1920. M.G.]. – A vrai dire ces fantaisies doivent être comprises moins comme des rêves dans le sens freudien de ‘production déréistiques’ que comme quelque chose de différent car elles se rapportent au contraire directement à la réalité, en l’occurrence aux problèmes des économiquement faibles & des humiliés. – Une évocation analogue se trouve déjà dans l’une des anecdotes du TB, l’histoire d’un médecin devenu fou qui doit être interné dans un asile d’aliénés, qui échappe cependant tout d’abord à son gardien ivrogne le fait même interner lui-même dans l’asile en question. L’intention de faire ressortir par comparaison avec le monde des malades ce qu’ily a d’insensé dans le monde des bien-portants apparaît clairement.»
PIA, PASCAL. «Etudes Jacobiennes.» Carrefour 1018 (1964): 20. FIEVRE, SOMMEIL, POISONS PEUVENT NOUS SORTIR DE NOTRE MONDE. P.P. cite d’une l. de M.J. à un jeune ami: ‘Connais-tu ces jouets choinois où une petite boîte est dans une boîte plus grande, & celle-ci dans une autre, à l’infini? C’est l’image des mondes. Ils s’emboîtent les uns dans les autres, sans que nos sens, à l’ordinaire, aient la capacité de les apercevoir. Je dis à l’ordinaire, car nos sens peuvent être augmentés (ou diminués) de telle sorte que nous parvenons à sortir de notre monde (la fièvre, le sommeil, les poisons peuvent nous sortir de notre monde).»
VM, 134. «En avril & mai Max se repose sur la Côte, à Saint-Maxime. Il écrit un livre ‘sans aucune préoccupation ‘d’isme’, sur les jours qu’il vient de passer à l’hôpital. Le titre en sera ‘Nuits d’Hôpital & l’Aurore’. Au fur & à mesure qu’il avance dans son travail, M. voit qu’il y a plus de nuit que d’aurore & il écrit à R. Manuel qu’il croit qu’il y aura ‘à peine une aube’. – 145. «Max raconte en 12 récits ses nuits & journées d’angoisse & de souffrances, l’année d’avant à Lariboisière. Il y a là quelques-unes des pages les plus plus belles & les plus écrites de M.J. En nov. 1942, il écrira à Béalu: «J’ai eu entre les mains une tapée de livres de moi, or, les ayant parcourus, je ne les trouve pas si mal que je croyais. Notamment Le RB, livre rempli d’émotions, de folies & d’exactitudes humaines. Pourquoi? Parce que je me suis donné la peine d’écrire en bon style d’entrailles & d’écrire toujours.»
SACRIFICE IMPERIAL
A BONET. PJ, 509. 2 fév. 1944. «Je suis tout à fait content que tu aies le SI, qui est un de mes moins médiocres recueils.»
DV, 55. Nlle éd. 88. «Je te félicite de posséder ce livre qui est certainement mon seul recueil bon. Conserve-le pour qu’après ma mort on sache ce que j’aurais pu ou dû ‘être’ ; Bibliographie de M.J., 137.»
PJ, 509. A P. Bonet. «Je suis tout à fait content que tu aies le SI, qui est un de mes moins médiocres recueils. Mais je n’ai absolument rien à dire sur la conception de ce livre. Il avait été convenu qu’on l’éditerait à 30 exemplaires & que j’en aurai 10. Ces 10 ex. ornés d’un dessin & d’un poème se venderaient chacun mille francs. Malheureusement j’ai été volé dans cette affaire, non par les braves & excellents Emile-Paul, mais par un homme qui s’occupait à cette époque de mes intérêts. […].»
PR, 579. «Le prem. poème du SI aspire à quitter la terre pour le seul repos qui soit: ‘Je craque de discordes militaires avec moi-même/ je me suis comme une pulie, une voiture de dilemmes/ & je ne pourrais dormir que dans vos évidences (SI, 151).»
---. 584. «FE & SI privilégient la plainte; l’amour s’y fait entendre avec des accents angoissés, hantés par le péché détruisant le droit d’aimer.»
SAINT MATOREL
LE BURLESQUE & LA RELIGION, L’OCCULTE, ZOHAR.
ANDREU. MJ. 38. «Le lendemain de l’apparition, Max reçut la visite du marchand de tableaux & éd. d’art, H. Kahnweiler, qui lui demanda de lui donner rapidement un livre dont Picasso devrait faire les ill. Ce fut SM, qui parut en fév.1911, & Max put écrire - selon une voie qui lui était toute particulière & dont tous les chrétiens,depuis le livre de Job, connaissent la faiblesse, mais à laquelle il tenait beacoup – que les avantages matériels vont de pair avec les spirituels & que ‘le pain quotidien dont il est question dans le Pater n’est pas un vain mot’.»
AUCLAIR. Pour en revenir à M.J. SJ. 69. «[…] il semble bien que M.J. ait voulu représenter les 4 visages de l’homme, les 4 Tempéraments dont l’unon définitive rétablira l’homme en plénitude, ainsi qu’était le Fils de l’Homme, debout au milieu des 4 Animaux, qui sont aussi les 4 Eléments constitutifs de la Création.-Saint Matorel -l’on pourrait dire saint M.J. – va donc venir parmi les 4 princes pour les mener à Jérusalem. Mais n’entreront dans la Cité de la Paix que les pacifiqes, & nul sang ne devra être versé que le sang du sacrifice. S.M. sera l’agneau de l’Autel. Ainsi, le drame se situe dans le plan de la co-rédemption, auquel les meilleurs sont invités à participer dans le consentement au martyre.»
BERTRAND, GERARD. SM & Le SJ: L’ILLUSTRATION DE LA POESIE A L’EPOQUE DU CUBISME 1909-1914. Klincksieck, 1971. 90. «Le peintre doit pouvoir vagabonder dans le texte comme dans un rêve familier. Faute de quoi, l’entreprise est vouée à l’échec! Derain en avait parfaitement conscience, & son refus a une valeur exemplaire. – [Derain ne cachait pas son admiration pour le livre, mais s’avouait désorienté par la richesse du propos & la multiplicité des significations]. (Voir Cabanne, op. cit.). – 90. Picasso n’eut pas les mêmes scrupules. Il est vrai qu’une longue amitié le liait à M.J.- […]. Aussitôt l’accord conclu, le peintre part à Cadaquès; pendant l’été 1910, il y grave les planches du SM. M.J., lui au même moment, est à Quimper. – 91. Aucun contact entre le peintre & le poète, aucune collaboration. [Quand même] on lui demande même de rédiger le bulletin d’annonces de l’ouvrage & de vanter les qualités de gravure qu’il n’a pas encore vues! […]. M.J. exige que le travail de Picasso lui soit montré: […] ‘je suis curieux de savoir ce qu’Homunculus a inspiré à Faust. Homunculus, c’est Matorel.’ […]. Si l’on espère trouver dans SM une tentative comparable à celle de Derain dans L’Enchanteur ou à celle de Dufy dans le Bestiaire pour capter le sens profond d’un texte, & pour faire dialoguer la lettre & l’image, la déception sera cruelle. Picasso ne s’en tient qu’à l’anecdotique, ne sollicite le texte qu’avec l’espoir d’y découvrir l’occasion de traiter ses thèmes favoris du moment, portr. en pied, nature morte, femme dans une chaise-longue. Mais si l’on accepte maintenant de juger ces mêmes gravures sur leurs seules qualités plastiques, on pourra sans restriction aucune céder à l’attrait de leur beauté singulière, où s’allient délicatesse de l’exécution & sûreté du geste. 92. […] l’illustrateur s’est montré singulièrement désinvolte dans sa tâche & lecteur pressé.»
---. 93. «La trame du SM est fort simple, si le mélange des genres, la variété du style ont de quoi dérouter au premier abord. Le poète lui-même l’a résumé fort bien dans la prière d’insérer: ‘M.J. a choisi son héros dans les quartiers pauvres de Paris; au milieu d’un petit monde qu’il peint avec amour, il a créé une sorte de Hamlet qui mourra dans un monastère frappé de la grâce divine, non sans avoir converti un de ses anciens compagnons de lutte. Tous deux revivent aux cieux avec un décor dont l’apparente fantaisie s’appuie sur les plus antiques traditions religieuses.’- Précisons qu’une fois arrivé dans les régions célestes, Matorel se voit de nouveau exposé à toutes sortes de tentations, mais qu’il en triomphe aisément & qu’il est canonisé.»
---. 93. «La structure du livre obéit donc à cette conception chère à M.J. d’un univers hiérarchisé; son héros emprunte la voie mystique, s’élevant depuis les dégradantes réalités terrestres jusqu’aux purificatrices régions célestes. Picasso ne le suit pas dans son odyssée spirituelle, & entend bien garder les pieds sur terre. Parleront seuls à l’imagination du peintre les épisodes les plus prosaïques de la vie terrestre de Victor Matorel. – […] les gravures de Picasso restent fidèles au répertoire thématique du Cubisme, à son parti pris de ‘réalisme’, à sa prédilection pour les sujets simples & les réalités quotidiennes.»
----. 93. «Parmi l’humanité cocasse & vile que côtoie sur cette terre le futur saint avant de recevoir la grâce, une figure se détache par la justesse de sa descripton psychologique. Il s’agit de Mlle Léonie, le grand amour de Victor Matorel. Picasso fut tout de suite séduit par le personnage. Cela nous vaut la prem. eau-forte, chef-d’œuvre de délicatesse & de drôlerie, la plus belle planche de tout le recueil. - 94. Toute la cocasserie de la figure réside justement dans la suggestion toujours renouvelée d’un défi aux lois de la pesanteur. – 95. Cette gravure, si riche en trouvailles d’ordre plastique, est également une réussite au point de vue de l’illustration. Le lecteur reconnaît d’emblée la silhouette de la jeune maîtresse de V. Matorel. Pourtant pas plus que M.J. qui préfère imposer la présence de son personnage par l’authenticité des propos qu’il lui prête plutôt que d’en faire une description physique, Picasso ne consent dans son portr. de Mlle Léonie à figurer des détails réalistes ou descriptifs. Il vise la ressemblance recurant uniquement à des analogies de rythmes & de structure entre un certain type de discours & certains modes d’articulation caractéristique de la phase analytique du Cubisme. 96. L’harmonie ainsi obtenue entre la gravure & le texte est saisissante. – Mlle Léonie se livre tout entière dans la conversation – qui sonne étonnament juste (les talents de dialoguiste de M.J.ne sont plus à vanter}. Cette petite personne écervelée, cette midinette, ‘bonne fille’ que les circonstances – plus que sa volonté ou sa soif de plaisir – font passer d’homme en homme, se met aussitôt à vivre dans l’imagination du lecteur. Ses propos sont extrêmement décousus, le fils du discours & des idées souvent capricieux, avec des rapprochements inattendus frisant parfois le coq-à-l’âne. […]. Cette discontinuité & ces incohérences du discours, ces associations d’idées saugrenues, toute cette poésie émouvante & cocasse d’un langage saisi au vol, il n’y avait que l’écriture cubiste qui pût les transmuer en réalités plastiques. Tout autre schéma représentatif traditionnel eût été incapable d’épouser avec un tel bonheur le rythme saccadé de la parole, sa vivacité, ses pirouettes. Ne peut-on pas admettre aussi que la juxtaposition des diverses parties d’une figure représentée sous des angles diff. relève du même genre de facéties que le coq-à-l’âne, déclenche un effet comique comparable, ou du moins d’une nature voisine ? – 97. [Résumé. M.G.]. Picasso a eu pour Mlle Léonie un véritable’coup de cœur’ ‘comment expliquer autrement qu’il ait jugé bon de consacrer une nouvelle eau-forte, la 3e du recueil: Mlle Léonie dans une chaise-longue, à ce personnage attachant certes, mais malgré tout secondaire? Il s’en souviendra longemps encore, comme en témoigne une importante toile exécutée à Paris pendant l’hiver 1910-11 & intitulée précisément: Mlle Léonie. […]. Nous tenons peut-être là un exemple unique dans l’œuvre de Picasso de réincarnation successive d’un personnage romanesque.»
---. ---. 97. « Les 2e & 3e planches de SM, qui ne manquent pas d’intérêt sur le plan plastique, justifient toutes les réserves sur le plan de l’ill. L’une & l’autre ont été exécutées avec le plus grand soin, nécessitant parfois plusieurs états. – La planche II: la Table est une nature morte très typique de la période analytique; les formes ouvertes y sont prépondérantes, surtout dans la moitié inférieure de la composition […]. Mais pourqui une nature morte à cet endroit précis du livre? - 98. […] le texte n’a servi que de prétexte, que Picasso avec une superbe désinvolture, n’y a vu qu’une occasion inespérée de traiter sans aucune contrainte un thème qui lui tenait particulièrement au cœur? »
---. 99. «La dern. planche est consacrée au couvent des Lazaristes de Barcelone où Matorel se retire pour expier ses péchés & où viendra le rejoindre son ancien compagnon de ‘débauche’ Emile Cordier. Il est fort probable que Picasso, dans ce remarquable paysage au graphisme aigu, aît concrétisé des souvenirs personnels. Le texte l’y invitait.»
---.---. 109-10. CONCLUSION. «En acceptant d’illustrer l’ouvrage de M.J., Picasso sacrifiait au devoir de l’amitié, cela n’est pas douteux. Le moins que l’on puisse dire est qu’il ne se sentait guère attiré par les poétiques extravagances de son ami. Et pourtant le miracle s’est produit. Son portr. au burin de Mlle Léonie est un chef-d’œuvre qui nous conduit tout droit à l’essence même de la poétique jacobienne; comme le poète, le peintre a vulu ‘ne retrouver la réalité qu’au travers du style’ pour ‘la retrouver plus vraie’. (Cité de M.J.: Bulletin de subscription de SM, op. cit. 2) ; comme le poète, il a proclamé avec force la primauté de l’intelligence sur le sensible, mais c’est par la seule puissance de la ligne qu’il a réussi la gageure d’exprimer sa vision ironique du monde. Cependant, qui ne conviendrait qu’il se trouvait alors en possession d’un outil irremplaçable, certes forgé en d’autres circonstances & pour d’autres fins, mais sans lequel un tel bonheur d’expression eût été impossible - & qui est précisément l’écriture cubiste ? »
BONET. Cat. Op. cit. No. 259. COMMENT SM FUT-IL ECRIT? A la page de garde de SM, 1943. «La caractéristique de ce jour & de cette nuit de sept. 1909 fut un bavardage solitaire tout nouveau pour moi: on me parlait, je répondais. Comme la litt. ne perd jamais ses droits, j’écrivis ce que j’entendais, ce que je répondais. Et aussi ce que je voyais sans penser à écrire un livre […]. Mon prem. éditeur sérieux se présenta le jour suivant: mon ami Kahnweiler […]. «Je voudrais éditer des livres illustrés par mes peintres! » [ …]. J’écrivis en quelques jours le présent Matorel en mettant un cadre aux notes que je prenais de mes conversations avec les anges. Voilà pour SM. On me demande l’année suivante (je crois) la suite & je réunis les poèmes que j’écrivais depuis des années.»
CABANNE. Le Siècle de Picasso. 236-37. «SM de M.J., ill. d’eaux-fortes de Picasso, paraît en fév. 1911. Le poète, qui a reçu l’illumination de la grâce, s’est converti au cath.; cet ouvrage est le prem. d’une tétralogie consacrée à ses apparitions. Pressenti par Kahnweiler pour en faire l’ill., Derain qui ne prend pas au sérieux la conversion de Max, s’est récusé; Pablo en revanche accepte [...]. (Voir Bertrand selon qui Derain refuse parce qu’il n’a pas compris l’oeuvre). […] Max est abasourdi par les constructions illisibles que son imagination a dictées à Pablo alors en pleine période hermétique. Sa Mlle Léonie, véritable théorème géometrique, le laissa sans voix. Mais non sans esprit. Et dans l’exemplaire qu’il adresse au peintre il écrit cette dédicace: «A Picasso pour ce que je sais qu’il sait/ pour ce qu’il sait que je sais» ; Bibliographie de M.J., 137. [Pour la dédicace].
---. 427. «C ‘est pour faire plaisir à M.J. qu’il avait réalisé, avant la guerre, des eaux-fortes destinées à l’éd. de luxe de SM & du SJ, mais leur illisibilité avait,tout autant que leur gratuité plastique, décontenancé le poète.»
CADOU. Cahs. du Nord. No spéc.179. «Que s’était-il passé? Entre Le Roi Kaboul & SM il y avait eu Dieu, le 22 sept. 1909.»
CLARY, JEAN. «La vocation manquée de M.J.» Op. cit. 71. Il dédicaça SM en ces termes à Clary: «Le premier de mes livres & presque le plus sincère » & il ajouta de vive voix: ‘c’est peut-être de tous mes ouvrages le plus ‘direct & le plus juste.’ «Je dois avouer que je ne me suis jamais exactement rendu compte de ce qu’il y avait dans ce livre de particulièrement ‘direct & juste’» ; Bibliographie de M.J., 137.
DECAUDIN. «Trois poètes.» Op. cit. 228. «André Blanchet a établi dans son éd. de la DT (32)combien cette oeuvre de la conversion est en relation étroite avec les poèmes de SM. & les OB. Tous les traits de la foi de M.J. s’y font jour: la dualité pathétique de la nature humaine qui grève l’hypocrisie chacun de non actes, les degrés de la sincérité, la mystique de la vision & du contact direct avec Dieu, l’élévation & la dérision, l’ostentation & l’humilité – tout cela dans une bigarrure de tons rarement absente de son œuvre spirituelle.»
DION, HENRI. C’était il y a 30 ans. 28. «[…] le Matorel de M.J., dont il a osé faire un saint […].» [Il s’est souvent appelé Saint Jacob en parlant de lui-même].
DV, 54. Nlle éd. 88. M.J. dans ses livres. 12 no 7. Envoi à M.B. «Etat mystique d’un garçon auteur vers 1909, 10, 11, 12. Intelligence non encore formée mais fraîcheur perdue depuis » ; Bibliographie de M.J., 137.
GUIETTE, 118. «H. Kahnweiler, l’acheteur des tableaux cubistes, eut l’idée de faire à bon marché des livres de luxe, qui deviendraient de luxe par le seul fait de leur illustrateur. Il les tirait à très bon compte chez un petit imprimeur de quartier, Paul Birault, dont G. Apollinaire a évoqué dans son Flâneur des deux rives la figure spirituelle & la maison ‘au bout de la rue de Douai.’ Il voulut avoir, pour accompagner dignement des ill. de Picasso & de Derain, des textes des poètes les plus en vogue dans les mêmes milieux. Le prem. vol. de la coll., ce fut Apollinaire qui l’écrivit L’Enchanteur pourrisant, les bois étant d’A. Derain. […]. 119. H. Kahnweiler demanda à Max s’il n’avait pas quelque chose. – 120. Les poèmes de SM baignent dans l’atmosphère du symbole & de l’Apparition, au milieu des souvenirs de la Kabbale, de démons & d’anges. […]. 121. A côté des plongées en plein ciel, il y a des allusions à la vie matérielle, des scènes satiriques, des anecdotes burlesques, des ‘instantanés’. Dès la publ. de ce livre, Max semble avoir fait le tour de soi-même. (Cf. le Père Blanchet). – Acrobatie, bouffonnerie, opéra-comique, énigme, fatrasie, érudition (pour Max, érudition signifie surtout ésotérisme, astrologie, etc.) & religion nourrissent l’œuvre. Le poète découvre d’un seul coup tous ses registres: depuis le réalisme, qu’il disait documentaire, jusqu’aux Symboliques, du burlesque jusqu’à la mystique, du calembour jusqu’à l’extase. ‘La dern. partie de cet ouvrage, ‘ dit Max , ‘semble écrite par un illuminé.’ ’Ce prem. des Matorel’, ajoute-t-il, ‘est ce que j’ai écrit le meilleur avec le CD. – 120. SM est un roman à la trame assez lâche, qui vaut surtout par les admirables morceaux qui y sont enchâssés & par la continuité du plan religieux. ‘Remarquez’, dit l’auteur, ‘à propos des notes que vous allez lire, comment l’Idée rel. ce que nous appelons la ‘psychose mystique’ est liée dans ce cerveau malade à l’Idée de Remords.’ – ‘J’ai connu’, dit Matorel, ‘l’amour avec une douce horreur. Dois-je avouer que j’ai été sodomite, sans joie, il est vrai, mais avec ardeur? Mais vous, pardonnez-moi, mon Dieu, si vous êtes en moi comme vous êtes autour de moi, car vous savez mon innocence.‘ [Voir l’analyse de l’homosexualité de M.J. dans Peyre. M.J. quotidien]. »
GARREAU, op. cit. 99. «Max écrira à Tristan Tzara, le 26 fév. 1916: ‘Quand j’ai écrit SM, qui est un chef-d’œuvre (je le jure) de mysticité, de douleur, de réalisme minutieux & sans aucune affectation, j’étais le petit rigolo le plus danseur de la terre.’ C’est alors qu’il aurait commencé à porter monocle & à jouer à l’homme du monde en tenue de soirée.»
GUIETTE, 119. «C’était,» dit Max, ‘une grande époque de ma vie, l’époque de mon apparition qui devait la bouleverser. Je vivais dans un nuage & dans un état véritablement mystique. Je me faisais l’effet d’être un très grand génie, comme Goethe ou Beethoven. […]. Qand on est dans des états pareils, on écrit beaucoup. Il n’y eut plus qu’à relier légèrement les p. en prose, les visions apocalyptiques & les impressions fausses pour constituer un livre, ce fut SM. M. Kahnweiler acheta en toute propriété le ms. pour 150 frcs. Encore même exigea-t-il que je lui donne un grand paravent à 4 faces entièrement peint par Picasso.’ Le livre parut […] en 1911 à la galerie Simon, […] avec des eaux-fortes de Picasso.»
HERTZ, HENRI. Disque vert no spéc. 22. «Avec M.J. en compagnie de la renommée.» Il faudrait que l’on réédite SM & SJ & que les lecteurs dont le nombre va grossir, aient toujours ces 2 livres avec le LC, à portée. Ce sont les livres-clés, les livres garants du long labeur complexe de ce tempérament, garants des triomphantes ressources accumulées, par avance, en lui. Soit posées sur les lignes, soit glissées entre les lignes, on les découvrira toujours délicieusement. »
LANOE, JULIEN. C’était il y a 30 ans. 45. «L’esprit de Dickens & de Dostoïevski habite M.J. Il a toujours été en communion avec les déshérités, les bouffons, les offensés, les contrefaits, les mauvais sujets. De SM à Morven le Gaélique & aux Méd. rel., cette pitié s’exprime en raccourcis poignants à propos des domestiques dans les féroces Tableaux de la Bourgeoisie; à propos des marins pêcheurs de Douarnenez, des ivrognes du dimanche soir, de tous ses frères les hommes dont la condition humble & fragile attire sans cesse la pointe de son attention. – 46. De tout son œuvre s’élève, comme la rumeur de la mer, la plainte, plus pitoyable que ridicule, des pauvres hères pour qui Max crie miséricorde, moins avec des mots qu’avec cet accent meurtri qui est la marque de son génie.»
LEIRIS, M. «Saint Matorel romancier & moraliste.» Cahs. Litt. 7:2 (11-24 oct. 1968): 28. (Publié la prem. fois en 1945 in Cahs. d’Art. «Saint Matorel martyr» & repris in Brisées. MF, 1966. «Dans le domaine du roman & de ses à-côtés, ce que la litt. universelle doit à M.J. n’est pas moins important que ce dont elle lui est redevable quant à la poésie.»
LE QUINTREC. «Le centenaire de M.J.» Op. cit. 620. «La contorsion, c’est sa gymnastique quotidienne; l’ironie c’est sa nature; l’imagination (avec lui toujours au pouvoir), c’est son luxe.»
LRV, 61, 21 août 1936. «Dame! évidemment! le pauvre Matorel est de son temps & du mien. Je veux dire que je ne m’y prendrai plus à 60 ans comme je le fis à 30 avec la sauvagerie de la jeunesse & la gaucherie du néophyte qui a beaucoup trop à dire pour le dire bien. Je ne serai plus capable de faire aussi mal, HELAS! oui hélas! J’en mettrais moins, je le mettrais mieux peut-être. Tout compte fait, il est une matrice où ceux qui le connaissent ont coupé des troncs d’arbres, & dont ils ont sorti leurs racines. Si tu connassais mieux les jeunes, tu serais aveuglé d’évidence. Ceci est la seule valeur si on n’est pas sensible à la fraîcheur d’âme que j’y trouve, moi, le papa indulgent.»
PERARD. 55. «SM, écrit presque entièrement en 1910, publié en 1911, raconte quelques-unes des aventures terrestres & célestes de ce Hamlet du Faubourg Saint-Antoine, de ce lymphatique employé au Métropolitain. Sa maîtresse, la volage Léonie, le trouve (p. 56) savant. Son ami & son double, le beau Cordier, homme à femmes, débrouillard, le juge fou […]. Victor Matorel, c’est M.J.: employé poète, mime comique & aussi l’homme qui doute de lui, de son talent, le cœur inquiet qui cherche Dieu. - Comme l’auteur, on peut voir en ce livre, entièrement nouv., sans modèle d’une grande fraîcheur, supérieur aux OB & au SJ. »
«Or», écrit M.J. dans SM, «nous sommes dans nos œuvres comme Jéhovah dans les siennes.» Ed. Kahnweiler, 10.
PFAU. «Le portr. de l’artiste en dévôt.» cite de SM , 88. «Les élèves parlent comme leurs maîtres & les écrasent justement avec les pensées que leurs maîtres ont reconnu fausses.»
PLANTIER. L’HUMOUR & LE DIABLE. «M.J. & le Prince des ténèbres.» Op. cit. 9. «[…] toute étude sur l’oeuvre de M.J. est incomplète, s’il y manque une touche d’humour, une pointe d’ironie. […].10. Et que penser de l’étonnement prodigieux de Matorel devant un diable qui ‘connaît Willy, le pernod sucre & les yeux pochés… & le Moulin Rouge?’ (SM, 18). Ne nous y trompons pas, l’humour de M.J. est peut-être un moyen plus efficace de nous troubler, que les descriptions du feu & du supplice. […]. Il ne sous-estime jamais l’adversaire, tout au plus se permet-il quelques pétillements d’ironie ou d’humour.»
---. RLM MJ, no spéc. 1. 59. Plantier signale «que le thème des enfers est traité de façon burlesque dans SM.»
PLANTIER. L’Univers poétique de M.J. 406. «L’œuvre de M.J. révèle une structure manichéenne dont nous avons pu noter la dominante dans le cycle SM. (VI, DT, & en partie, dans FE, dans R, & dans le SI).»
SAINT-THOMAS. 80. «Un intéressant détail qui rattache la lecture du Zohar, doctrine ésotérique des Israélites, à la composition du SM est le suivant: presque tous les noms des personnages du SM se retrouvent dans la trad. du Zohar en fr. de Jean Pauly. – Parmi les noms des personnes tenant les souscriptions à l’éd. de 1906, le nom de ‘Victor’ apparaît à la p. 556, le nom de ‘Cordier’ à la p. 739, le nom de ‘Léon’ (Mlle Léonie) & le nom ‘Emile’ dans la préf. A cet endroit aussi se trouve le nom ‘Matorel’, qui, combiné avec le nom ‘Max’, pourrait avoir inspiré le nom de ‘Matorel’. Conclusion du Chap. IV. 93. La rencontre avec le Zohar a entraîné une double conséquence dans l’œuvre de M.J. Elle a contribué à fonder son concept de l’univers total à la fois métaphysique & poétique. Elle fut aussi l’occasion du réveil… de la stimulation du sens religieux chez le poète. Resté confus pendant un certain temps, le sentiment religieux chez M.J., s’exprime finalement par un engagement dans la vie chrétienne. A la lumière de cette rencontre, on voit que la série de Matorel est plus qu’une exploration dans un monde d’illogisme & de fantaisie gratuite. Elle est surtout une recherche intense pour trouver une nlle expression de la poésie. (p. 94) On remarque le lien toujours étroit entre les concepts poétiques & les concepts religieux: la confusion entre ces deux domaines se révèle surtout vers la fin des OB.»
---.81. «Dans le SM, M.J. lui-même se présente sous deux aspects: l’employé-poète & le mime comique. Cependant, l’œuvre laisse entrevoir l’homme tourmenté, tantôt par l’incertitude à l’égard de son talent de poète, tantôt par de graves problèmes relatifs aux croyances religieuses. 82-83. L’écrivain trace un portr. très exact de lui-même: Matorel possède des dons exceptionnels d’acteur. Cette parodie de lui-même est évidente dans le SM. 84.De temps à autre, dans le récit, un dialogue s’engage où l’auteur s’adresse à son héros comme à lui-même devant le miroir.»
---. 144-45. «Dans SM […] la façon comique de parler des choses sérieuses se révèle à chaque page. En général, c’est la manière légère, fantaisiste souvent surprenante, de traiter de sujets religieux qui constitue le burlesque chez M.J. – L’ironie a donc, chez M.J. un double emploi: elle est l’arme contre l‘adversaire, elle est défense qui masque le plus profond de son être.»
---. 260. «Il est incontestable que l’œuvre fantaisiste du poète est moins l’expression des sentiments personnels & profonds du poète, que le reflet de son intérêt pour le symbolisme religieux. (Cf. le Père Blanchet, intr. de DT) aussi cf. Plantier). 261. Le SM & le SJ sont marqués par le nouvel esprit. La fantaisie de la prem. dépasse celle de L’Enchanteur pourrissant, tandisque la 2e rivalise de près avec les Mamelles de Tirésias dans son surréalisme. – Selon la conclusion de Saint-Thomas le mélange du thème religieux & du comique […] dans ses prem œuvres est plutôt le résultat de la recherche litt. que de l’expression d’un sentiment profond. [Rés. M.G.]. L’expression profonde de la Révélation n’a pas trouvé sa place dans son œuvre fantaisiste.»
---. 279. CONCLUSION. [Rés. M.G.]. M.J. veut créer quelque chose de nouveau. Le nouveau sera l’inattendu: il surprendra & amusera. M.J. veut relier la poésie à la réalité: pour lui, la poésie & l’art se rattachent à la vie. (Les aspects sociaux de la vie deviennent les thèmes du comique jacobien dans les romans satiriques. La bourgeoisie, en particulier la bourgeoisie provinciale est visée par sa satire).
---. 279. Saint-Thomas a discerné dans le comique une progression chronologique, voire logique. Elle s’est efforcée d’en saisir & d’en dégager le sens, en tenant compte du movement poétique de l’époque & de l’évolution personnelle du poète. – Les œuvres fantaisistes sur lesquelles la plupart des critiques glissent rapidement, présentent une certaine difficulté à la compréhension… pour le lecteur non-initié, elles apparaissent très obscures. Saint-Thomas pense avoir jeté quelques lumière sur la fantaisie jacobienne en mettant en relief les liens qui la rattachent aux anciennes trad. religieuses, aux recherches litt. du poète & au mouvement de l’Esprit Nouv. 280. M.J. veut créer quelque chose de nouveau. Le nouv. sera l’inattendu: il surprendra & amusera. M.J. veut relier la poésie à la réalité: pour lui la poésie & l’art se rattachent à la vie. [Rés. M.G.].
LE SIEGE DE JERUSALEM
AUCLAIR, RAOUL. Pour en revenir à M.J. 67. ‘Qu’est-ce donc que la vie, sinon le siège que les hommes mettent sans cesse devant Jérusalem, citadelle de la Perfection, de la Paix, du Bonheur réel.’ «Cette phrase de M.J. qu’un Ange prononce dans le Prologue du SJ en condense tout l’argument. – Faut-il donc s’attendre à quelque drame édifiant, d’une haute tenue & d’une stricte rigueur théologique? Ce serait mal connaître M.J. Tout pénétré qu’il soit de la réalité de la sainte Cité, tout assuré de la nécessité pour l’homme d’y tendre & de l’atteindre, M.J., poète & bouffon, va s’engager sur le chemin de la conquète en faisant des cabriolets. Et, certes, emporté par sa nature, grimaçant, criant & gesticulant, il peut paraître oublier parfois le but qu’il s’est assigné, qu’il a choisi librement, & vers lequel pourtant il ne cesse point de progresser. Après tout, il n’est pas défendu d’aller au Paradis marchant sur les mains. – 70. ESPRIT DE L’ENFANT. Et, sans doute, au Tribunal, sera-ce le poète qui sera jugé & absous parce qu’il avait conservé l’esprit d’enfance, qui est cruauté, égoïsme, & gourmandise, & luxure, & mensonge, & toutes sortes de vilains défauts, mais tout cela noyé dans un grand bain d’innocence. – CRITIQUE DU SJ. Il [le drame] est mélange du meilleur & du pire. Plus souvent du pire. Il y a de la logomachie dans cette prose, de la vulgarité, de la trivialité, & soudain, un jaillissement de candeur, une éclosion d’étoiles, une musique & un frôlement de l’aile de l’ange.»
---. 68. «Il touchait de tout, ayant le goût du bizarre, le sens du secret & l’attirance du mystère; se penchait sur ‘l’astrologie & l’alchimie, la Kabbale & la métaphysique hermétique; il y croyait; il en alimentait son œuvre qui en recevait ces clartés étranges; phosphorescences nocturnes, en vérité, bien plus qu’authentiques lumières. – Enfin, il était mystique, un clown mystique, le ‘pénitent en maillot rose.’- Toutes ces qualités qui ne vont point sans de grandes ombres, tous ces défauts qui font le charme de M.J., on les retrouve à l’état brut dans le SJ. […]. Et c’est, tout à coup, Jérusalem. Ou plutôt, ce sont les armées de la terre devant la Jérusalem du ciel, symbolisée par une Ville fermée, dressée, là, sur la mer, face au camp des assaillants qui se disputent, s’ennuient & se soûlent depuis 12 ans, ayant à peu près oublié le dessein qui les avait conduits à ce rivage. Ceci, sans doute, pour nous montrer que les hommes, qui ne devraient point avoir de souci plus constant que d’entrer dans le royaume, ce royaume au-dedans d’eux-mêmes, saisis par leurs passions, trompés par toutes sortes d’illusions, demeurent à leurs lisières, vivant l’ombre de leur vie au lieu d’en pénétrer la lumière. – P. 69. 4 camps, les 4 armées de 4 princes investissent la Cité aux 4 murs: le Carré mystique de Jérusalem.»
---. 69-70. LE DRAME DEVIENT COMEDIE. «Voilà bien, n’est-ce pas, un grand sujet, le plus grand sujet, celui qui fonde la destination de l’homme & du monde. Eh bien, ce grandiose dessein, allez donc le discerner à présent dans la pièce qui le voulut illustrer! Le drame devient comédie; il devient farce […]. Comment donc entendre sagement des paroles de sagesse quand le sage prend l’habit du bouffon, & saintement des paroles de sainteté quand le saint plane, sous le chapiteau, la tête en bas, au trapèze volant? »
BERTRAND. ILL. DU SJ PAR PICASSO. 99-100. Derain refuse l’ill. pour les mêmes raisons que celle du SM. «De tous les ouvrages de M.J., le SJ se révèle comme l’un des plus déconcertants; on commence seulement aujourd’hui, après les patients travaux du Père Blanchet, à en entrevoir toutes les implications mystico-symboliques. Le poète a donné à son propos la forme dramatique. Quelques 70 personnages de tous les temps & de tous les pays évoluent autour de Matorel dans une atmosphère d’apocalypse & s’affrontent pour la conquête de Jérusalem, c.à.d. du paradis. Par son insistance à mêler le sacré & le profane, le fantastique & le quotidien, ce drame n’est pas sans rappeler le théâtre & l’art visionnaire du moyen âge.»
---. 100. «Evidemment la perspective de se colleter avec un pareil texte était de nature à décourager la bonne volonté de l’illustrateur éventuel! On pensa donc à nouveau à Picasso qu’on savait d’un caractèree à ne pas se laisser longtemps s’embarrasser par les obscurités du discours poétique. […]. Picasso s’acquitta de sa tâche dans le courant de l’année 1913 & le livre parut avec 3 eaux-fortes en hors-texte, d’un format plus modeste que les précédentes. – L’arbitraire des sujets, 2 nus & 1 nature morte en dit long sur le parti adopté par le peintre illustrateur. Toute suggestion litt. a délibérément été écartée. Niant l’existence du texte, le peintre demande que l’on considère ses gravures comme des créations tout à fait indépendantes, accidentellement réunies dans un même volume. […]. Conscient de son incapacité à recevoir de la parole poétique l’étincelle créative, il préfère rejeter tous les faux-semblants & faire œuvre parallèle.»
---. 100-01. Le SJ force l’attention à un double point de vue. D’abord par la qualité de ses gravures, qui sont parmi les plus accomplies de toute l’œuvre graphique de Picasso. Ensuite par un curieux phénomène d’interférence du texte & de l’image qui peut parfois pousser certains lecteurs-spectateurs à mal interpréter la gravure illustrative & à y découvrir des analogies avec l’ambiance générale du poème – analogies de toute évidence étrangères au projet de l’artiste. – 101. Le prem. hors-texte est un admirable portr. de Femmes nue. […]. Mais si cette planche a demandé des soins attentifs, c’est en grande partie parce que Picasso y expérimentait les ressources de l’eau-forte pour atteindre à de surprenants effets de clair-obscur.»
---. 192. «Le second hors-texte est bien propre à intriguer le lecteur. A peine commence-t-on de lire les péripéties d’une Fête de Nuit au camp d’Andrinope (Acte II), à laquelle prennent part évêques, cardinaux, femmes & hommes du 16e s. & qui va bientêt tourner à l’orgie, que l’on se heurte à… une Nature morte au Crâne! Et comme si la surprise causée par le caractère ne suffisait pas, il faut encore que la stylisation & la composition de cette gravure à la pointe sèche soient assez insolites pour faciliter les méprises & les interprétations erronées! »
BONET. Cat. Op. cit. No. 261. P. 75. L. 17 [janv.] 1943. «L’idée centrale de ce livre est qu’on ne meurt pas complètement: la vie continue! Ce n’est plus une vie terrestre, voilà tout. La matière n’est plus la même mais la vie pourrait bien être la même. Or qu’est-ce que la vie sinon le ‘Siège’ que les hommes mettent sans cesse devant Jérusalem, citadelle de la Perfection, de la Paix & du bonheur réel.’- Les personnages représentent toute l’humanité possible; il n’y a que 12 signes du Zodiaque c.à.d. 12 types possibles d’homme & aussi les 7 planètes. – Ces types sont entourés d’attributs que j’ai trouvés ‘nouveaux’ dans la litt., décoratifs & pittoresques. L’ensemble flotte dans un océan de mystère que j’aimais beaucoup à cette époque. Je l’ai parcouru avec plaisir – avec le regret de n’avoir pas la patience de ‘faire du style’, ni le goût, ni peut-être le savoir.»
GUIETTE, 124. ‘C’est’ dit M.J., ‘un livre beaucoup plus artificiel que le SM. & que les OB. Je ne l’ai jamais beaucoup aimé. Des amis m’en ont dit récemment tant de bien qu’il est peut-être meilleur que je ne crois.’ –«La signification que l’auteur donne à ce ‘drame à la mode de Shakepeare’, est toute ésotérique. Après la mort, la vie continue. (’Le ciel est rempli du reflet de la terre’). Si cette vie n’est plus matérielle elle ne peut s’imaginer que sous les formes que nous avons apprises sur terre. Elle est toute tournée vers le Siège de Jérusalem, ville du bonheur réel. Max y versait une bonne part de ses connaissances astrologiques.- 125. Saint Matorel s’est évadé de la vie quotidienne. Dans l’atmosphère mytique où il nous apparaît, les rayons se réfractent étrangement. Les paroles se prolongent sous de mystérieuses ténèbres, elles éveillent des échos dont on ne peut dire s’ils viennent du ciel ou de l’enfer. Les dialogues ont des résonances d’apocalypse. Le mouvement de l’action prend le relief lourd des cauchemars. Les symboles s’enlacent & se fuient. Le poète qui manie des lumières diverses, ne craint pas le jeu des interférences. Les grandes idées chrétiennes se mêlent aux subtilités des sciences. Saint Matorel, ‘confesseur & infidèle’, est tour à tour ou tout ensemble, un saint & une sorte inquiétante d’ange magicien. […]. Dès les SM, Max avait appris à compter avec le diable comme avec les anges. Ce sont les deux (126) armées éternellement en présence, autour de nous & au dedans de nous.»
HUMEAU, EDMOND. VISION COSMIQUE. C’était il y a 30 ans. 40-41. «Dailleurs, le théâtre que les 3 actes du SJ nous apportent, ne tient-il pas ‘la clé du festin’ qui nous attend tous au dernier acte? Je ne sais pas si le cinématographe, qui pourtant enchantait M.J., produira jamais une vision analogue, c.à.d. cosmique, du SJ, mais j’en garde l’espérance.»
PERARD. 9. «Le poète a écrit sur notre exemplaire du SJ : ‘Je me croyais un génie comme Beethoven, l’orgueil & la sexualité m’ont perdu.’Orgueilleux, il était par bouffées […]; mais l’humilité est la clef de son caractère: il se voyait & se sentait tel qu’il était, souillé, misérable, fragile, à tous les instants de sa vie, par suite du péché. […]. ‘La sexualité’ de son double, Victor Matorel, & son aspiration à la pureté; à la libération: ‘Seigneur, faites-moi mourir que je ne pèche plus’.»
PLANTIER. MJ. 31. «La doctrine du double, si chère à M.J., est un moyen commode pour voiler la vérité de la confidence. C’est par elle que s’exprime le choix douloureux du poète: Matorel & Cordier offrent chacun une solution. Le prem. place le salut dans la prière & supplie son ami d’abandonner l’explication des symboles (SM, 86-87); le second s’appuie sur la connaissance: ‘Il faut étudier pour triompher… ‘ La longue promenade dans l’église, au cours de laquelle Cordier montre à Matorel tous les symboles, apparaît comme une ill. des années passées par M.J. dans les recherches livresques pour trouver la clé du monde. A la prière, fondée sur l’amour, s’oppose le syncrétisme de la Gnose, tel qu’il se déploie à la fin du livre: confusion immense de tous les dieux & de toutes les religions.»
---. 37. Plantier voit dans le SJ «un drame symbolique & initiatique marqué par le syncrétisme de la Gnose. Drame iniciatique écrit par un poète moderne qui se moque de la vraisemblance & qui transpose dans une geste son conflit intime. – Il ne s’agit pas, en effet, de rechercher l’union en Dieu, but que s’est fixé le mystique, mais de subir une dern. épreuve avant de connaître les secrets de l’univers. C’est la suite de SM & des OB. En voyageant dans les ciels, Matorel rencontre des élus du paradis gradués & différents. Ces élus ignorent le ciel supérieur à celui où ils se trouvent ‘comme un rentier jouit de sa fortune faite.’ Au contraire, Matorel, ‘inassouvi d’un azur plus délicat’ recherche ce qui peut le conduire toujours au-delà. Pour prix de ses victoires il reçoit le ‘libre arbitre dans le choix de ses imperfections.’ 38. Matorel définit clairement la torture de la fausse humilité. Or le désespoir jacobien prend sa source dans une volonté d’abaissement, dans le mépris de soi qui va aux limites de la destruction & qui met en question la croyance en la grâce. 39. Mais l’on peut se demander si Matorel n’est pas en train de se faire Dieu: ‘Je me sens grandir’, s’écrie-t-il (p. 113). ‘Devenir’ Dieu par les moyens de la connaissance symbolique & magique: telle est la tentative. Matorel rejoint, nous semble-t-il, cet autre pèlerin de l’absolu qui s’appelle Faust.»
---. 41. M.J. LE PELERIN DE L’ABSOLU. LE PRINCE ECORCE DOUBLE DE MATOREL DE M.J. SCIENCES OCCULTES. «On croit entendre M.J., lorsque le Prince Ecorce déclare qu’il ‘veut les secrets’, qu’il veut la ville ‘pour s’y purifier toute sa vie’. Le double de Matorel poursuit donc sa quête de l’Absolu. 47. Le Siège de Jérusalem est la passion de Matorel: Matorel pèlerin de l’absolu, Matorel supplicié par la violence & la guerre. […]. Il reste que dans les années qui vont de 1910 au baptême & au-delà même de ce baptême, c’est bien en adepte des sciences occultes, en pèlerin de l’absolu que M.J. développe sa vie intime & qu’il tente d’organiser son univers religieux, dans un effort constant pour concilier la lumière révélée sur le mur de la Rue Ravignan & toutes les symboliques humaines.»
---. «La mythologie dans l’œuvre poétique de M.J». RLM no spéc. 1. 79. «Manière habituelle dans le SJ de confondre toutes les cultures & toutes les mythologies.»
SAINT-THOMAS. 73. ‘L’ensemble flotte dans un océan de mystère que j’aimais beaucoup à cette époque’ écrivit-il en lieu de dédicace à un exemplaire du SJ. («M.J. commenté par lui-même»par Lannes. Art (31 janv. 1945) : 3. «C’est un océan de symboles d’esprits, de conceptions théologiques, de sens cachés.»
TABLEAU DE LA BOURGEOISIE
PJ, 234-35. L. à Mendès France. St.-B. 5 déc. 1924. «On me dit que le Tab.B est ce que j’ai fait de mieux: il m’a coûté un an de travail & 50 ans d’expérience, plus pas mal d’angoisses sinon de larmes.»
TARTUFE. LA DEFENSE DE TARTUFE
L’AME HUMAINE – IMAGE OBSCURCIE DE DIEU. DT, 29. «Rappelons la doctrine du Zohar: l’âme humaine, ‘étincelle’ divine tombée dans la pelure du corps, n’est plus qu’une image obscurcie de Dieu: l’homme est devenu semblable aux bêtes. Qui veut refaire le chemin inverse & remonter vers Dieu devra donc se délester de la ‘lourdeur’ physique& du même coup de la ‘bêtise’ […].»
---. 129. «Alors! pourquoi? pourquoi cette faveur/ Si tu connais ma vie & toute sa noirceur? si tu connais mes fautes & toutes mes faiblesses?/ Qu’y a-t-il donc en moi, mon Dieu, qui t’intéresse? »
‘L’APPARITION’, 62. «Avec une sobriété grave […] Max réutilise des ‘notes’ prises dans les jours qui, suivirent l’apparition. Mais l’auteur entend surtout raconter la période confuse qui va de l’apparition au baptême.»
ATTAL, J.-P. Op. cit. 193. «La DT parut en 1919. M.J. avait alors 43 ans. […] le 22 sept. [ ?] 1909, il avait vu le Christ sur le mur de son misérable appentis du 7 de la rue Ravignan. […]. Une seconde apparition eut lieu le 16 déc. 1914, au cinématographe. […]. Enfin, c’est le 18 fév. 1915 que M.J. fut baptisé. […]. Il «relate ses apparitions, cette conversion, & ce baptême d’une manière à la fois réaliste & poétique, sérieuse & burlesque. Le titre d’abord prévu était Le Christ à Montparnasse. – 194. «Composé […] de p. en prose, en vers, de pages de journal, d’examens de conscience, de prières & de méditations. Cependant, une lecture plus attentive, en même temps qu’elle découvre à l’ouvrage le sens d’un plaidoyer […] pour sa sincérité, en révèle sa solide unité où se confondent les préoccupations mystiques aussi bien qu’esthétiques de M.J. […]. Le P. Blanchet dans son intr., place la DT au coeur de l’œuvre de M.J., & sa conversion au cœur de sa vie. – 195. La DT se laisse lire[…] de deux façons: d’abord comme la relation de cette expérience spirituelle archétypale: la rencontre du ‘seul avec le Seul’ du ‘Gabriel de son être’, la vision que M.J. a eu de son double céleste. […]. 196. Ensuite comme un seul & long poème moderne. […]. Mais ces 2 façons de lire doivent être simultanées afin de donner à une lecture unique le sens de la perspective & de la profondeur.»
AUTOPORTR. Garreau, op. cit. 121. «Ne pas perdre de vue mon état de gnôme aux ongles rongés, au gros nez, gros pieds […].»
A BONET. Cat. p. 79. «Vous me demandez comment j’ai écrit ce livre? il est toujours difficile de répondre à ces questions là. Il y est question de mon miracle! miracle très réel! apparition foudroyante d’un ange que je crus longemps être Dieu lui-même. A dater de ce jour de 1909, ma tête fourmilla de tant d’idées, de phrases & de tentations, qu’il me fallut bien prendre la plume. D’ailleurs, depuis l’âge de 7 ou 8 ans, je n’ai guère cessé de griffonner de la prose, des vers & des dessins. Je me souviens de mes poèmes d’enfant & de m’être caché sous une table à grand tapis parce qu’on avait ouvert mon pupitre & mon cahier de vers. Je n’eus jamais l’idée qu’on pût être ‘homme de lettres’ mais je n’avais pas davantage l’idée qu’on pût vivre sans griffonner. Quand je connus Ch.L. Philippe, vers 1901, il me demanda mes manuscrits. Je refusai de les montrer. Il insista & finit par vouloir les emporter pour la revue La Plume. Alors, une phrase sortit de moi qui m’étonne encore aujourd’hui & qui venait, certes, du ciel plus que de moi: ‘Pas encore!’ Etrange phrase dans ma bouche. – Lors de mon apparition, ma vie changea. […]. Le lendemain, je reçus la visite de Kahnweiler, le marchand de tableaux cubistes; il m’annonçait un rayon d’éditions & de librairie. Apollinaire m’y précédait. Il me demanda d’être le second. J’écrivais SM depuis la veille, je continuai, terminai. Peut-être que la DT est la suite de ce cher Matorel plus que les vol. qui prétendaient à l’être. C ‘est tout ? C’est tout.» Max Jacob, 1943.
---. No. 259. LE JOUR DE LA REVELATION. «La caractéristique de ce jour & de cette nuit de sept. 1909 fut un bavardage solitaire tout nouveau pour moi: on me parlait, je répondais. Comme la litt. ne perd jamais ses droits, j’écrivis ce que j’entendais. Et aussi ce que je voyais sans penser à écrire un livre. [SM]. Dieu s’occupe de la vie de ceux qui se donnent à Lui. Le matin de l’apparition fut comme tous les autres matins à part ceci: je reçus la visite d’un ouvrier: ‘Je suis envoyé par le propriétaire! Il trouve que vous ne voyez pas clair dans cette chambre! Je vais percer le toit !’ Un autre ouvrier arrive aussi: ‘le propriétaire pense que vous ne pouvez pas ouvrir votre fenêtre à cause des chats, je viens vous mettre un carreau mobile! J’habitais un rez de chaussée une espèce de cave qui dès lors s’éclaira. Symboles?! oui! Dieu s’occupait de moi: mon prem. éditeur séreux se présenta le jour suivant: mon ami Kahnweiler, marchand de tableaux de Picasso, Derain, Van Dongen, Wlaminck & peut-être Matisse. ( ?) Je voudrais éditer des livres illustrés par mes peintres! […]. Jécrivis en quelques jours le présent Matorel en mettant un cadre aux notes que je prenais de mes conversations avec les anges.»
---. Même l.de 1943. «Je vous ai souvent écrit de cette apparition divine qui est à l’origine & la cause de ma conversion à la rel.cath. Pourquoi spécialement la rel. cath. & non une piété juive selon ma race? 1. parce que le personnage qui me visita comme je l’ai raconté dans la DT me sembla être le Christ lui-même & si les personnes compétentes en ces matières mystiques m’ont détrompé, m’affirmant que le Seigneur n’a jamais été vu de personne depuis son Ascension, du moins le dit personnage me parut nettement christique. 2. parce que j’ai été élevé de telle sorte que la rel. juive ne m’a jamais été une rel., alors que ma Bretagne natale m’offrait à tous instants l’idée que la seule rel. était la cath. D’ailleurs je n’ai pas résonné! un élan m’a porté vers le Christ.»
---. Cat. No. 258. L. 15 janv. 1944 à Bonet. «Je suis un pécheur! Je voudrais ne pas l’être. Je voudrais que les autres soient moins pécheurs que moi. Je suis peut-être un Tartufe, peut-ètre moins que je ne le crois… ou plus.»
BEDESCHI, ANDREA. «LE CHRIST A MONTPARNASSE DE M..J.: UN DOSSIER POUR QUEL OUVRAGE ? » Francofonia 19:36 (Primavera 1999): 3-23. Dans cet article Bedeschi examine le dossier ‘Le Christ à Montparnasse’ qui se trouve à la BLJD. C’était le titre de la DT jusqu’aux prem. épreuves, sur lesquelles il est remplacé par ‘Monsieur Tartuffe’, pour devenir ‘La Défense de Tartuffe.’ Le deuxième ‘f’ sera éliminé sur les secondes épreuves. Après avoir soigneusement examiné le dossier dans tous ses détails, sa conclusion sera que l’activité à laquelle se consacre M.J. « produit en lui un état émotionnel intense basé sur l’émergence de son propre passé. C’est ainsi que se dessine une envie de ‘travailler’, de ‘recevoir’ son vécu, pour lui donner une forme. Or ce désir se concrétise déjà dans le dossier tel qu’il est conçu pour le mécène [Doucet]. Mais n’est –il pas encore plus satisfait par la Défense avec l’exposition que Jacob y propose de lui-même & de son existence dans la perspective de sa conversion ? Un aspect de la Défense, en outre, paraît ici de grande envergure. Les larmes que Jacob affirme avoir quelquefois envie de verser, son Tartufe saura s’en charger, mais en comptant enfin sur un bon résultat, auquel ses larmes elles-mêmes, plus ou moins ressenties, seront appelées à contribuer: la Défense permettra aux désirs du poète de se concrétiser en configurant une dimension heureuse où l’arrivée du Christ à Montparnasse ne sera pas vaine.» P. 19.
BLANCHET. Notes. 277. ‘L’Ange est furieux de me voir si bête.’ «Dieu est au centre de nous; encore faut-il que nous descendions au fond de nous, pour l’y trouver. Or, un ‘mur de béton’, élevé par le péché, nous sépare de nous-mêmes & de Dieu, nous maintenant au niveau animal, périphérique. Percer ce mur, ce sera redevenir l’Homme parfait (l’Adam primitif, le Christ), & passer de l’animalité à l’humanité, de la bêtise à l’intelligence.» – [Cf. aussi: l’eau symbolise la matière, le sang l’esprit. Après l’apparition: ‘Je prie Dieu qu’il enlève l’eau que j’ai dans l’esprit.’ (SM, Chap. III. 25)].
BLANCHET EXAMINE L’ACCUSATION DE ‘TARTUFERIE’, de duplicité qui poursuivit M.J. au-delà du baptême, jusq’à St.-B., jusqu’à sa mort, qui fut l’un des tourments de sa vie.
BOUNOURE, G. «M.J. romancier.» Intentions 2:18 (sept.-oct. 1923): 11. «Toute vie d’homme n’est qu’hypocrisie: la sincérité du poète est dans sa quête & sa recherche & la finesse très aïgue dont il éprouve l’insincérité de sa conscience.»
LA CHAIR TOMBEE PAR TERRE. DT, 30. «Le déshabillage par le foudre? Une trad., enseigne le Zohar, nous apprend que lorsque le Saint, béni soit-il, s’est manifesté au mont Sinaï, tous les êtres d’en haut & d’en bas furent ébranlés; & les âmes des Israélites se séparèrent de leur corps.» (Zohar II. 83Z).
COLLABORATION DU CŒUR & DE LA TETE. DT, 56. «Une pensée ne vaut qu’avec la collaboration du cœur & de la tête » L. 28 sept. 1932. 46, n. 63. Prem. éd.
COLLIER. DRAWINGS & POEMS. Lotus Press, 1951. Préf. I. «DT, a prose & verse account of his conversion. […]. In 1921, to the astonishment of his friends, he retired to the Benedictine Monastery at St.-B., near Orléans, where for 7 yrs he lived in monastic solitude in constant prayer & study, reserving his caustic humour for the books he sent to Paris for publication. ‘Le Vieil Adam’, however, was not dead. In 1928 Jacob returned to the Capital, where he played the dandy, renewing his old friendships […] until the summer of 1936 found him, stricken with remorse, on his knees before the altar in the Basilica of St.-B. It was there, working, praying, haunted by his fear of Hell, numbed by the deportation & death of his family & relatives, that the Gestapo came to arrest him in the Feb. of 1944. – P.II. It was by his poetry that M.J. made his greatest contribution to the literary revolution of the first 20 yrs of this century. His verse is the work of an alchemist, a strange blend of burlesque, sarcastic humour, verbal pyrotechnics & a profound devotion to the Faith. […]. His genius […] which was to Fr. poetry what that of Picasso has been to pictorial art.»
COMPORTEMENT – IDEAL. DT, 65. Le titre exprime l’écart entre son comportement & l’idéal qu’il professe. «L’habit de Tartuffe, dont Molière a affublé le chrétien, lui colle à la peau. ‘Je ne suis pas un Tartuffe, je suis M. Tartuffe.’ (Cité in VM, 8). Bête par ses instincts, ange par le désir. (Filibuth, 17-18). – DT, 66. Il se contente de s’y exposer – vices & appels divins – aussi nu qu’il le peut. Aux hommes, à Dieu surtout de le juger.»
COMPRENDRE. DT, 43. «[…] le mot ‘comprendre’ (ou ‘incompris’) revient 6 fois [in ‘Signification’]. […]. Vaut-il mieux comprendre que prier ou prier que comprendre? […]. Le moine se demande si la ‘science’ ou ‘intelligence’ des symboles ‘ne vaut pas auprès de Dieu la prière.’ Une voix lui crie: ‘Comprends’, mais une autre: ‘Ferme ta cervelle pour ouvrir ton cœur, on ne sauve son âme que par la prière.»
DT, 229. «Sensuel, gourmand, susceptible, orgueilleux, joyeux à l’excès, triste sans raison. Avide, sinon avare; égotiste sinon égoïste, maussade, méprisant, envieux, capricieux, bavard, , blessant, dur, méchant, flegmatique, insensible, prétentieux, mesquin, outrancier, rancunier.»
DV, 54. Bibliographie de M.J., 132.Envoi. «Il n’a pas besoin [DT] d’être défendu, car personne ne l’attaque, tout le monde, Dieu merci, l’approuve.»
L’EAU-MATIERE DANS L’ESPRIT. SM. Chap. III. 25. Confession de Matorel. «Je prie Dieu qu’il enlève l’eau que j’ai dans l’esprit, car l’eau donne un esprit rigoureux & simpliste, des manières brutales, des paroles inconsidérées, des pertes de nos forces, de nos conquêtes & de notre temps, & l’eau rend voyageur & nuageux.»
L’ENFANT PRODIGUE. DT, 225. « …c’est toute ma vie qui est celle de l’Enfant Prodigue & chaque jour de ma vie est la vie entière de l’Enfant Prodigue, puisque chaque soir, je reviens à Dieu mon Père après avoir dissipé mon bien chaque jour.»
EXHORTATION. DT, 46-48. «M.J. fut-il parfaitement rassuré par ce concordisme théosofico-chrétien?» Blanchet compare un vers des OB: ‘Trop bête’ à ‘Exhortation’. Ces derniers mots: ‘L’ange est furieux de me voir si bête.’ Laisse percer une déception. […]. Son intelligence n’a pas été exhaussée jusqu’à la sphère des secrets célestes.»
FOWLIE, WALLACE. Op. cit. 189. «His revelation was as significant as Le Mémorial of Pascal, his account of his experience. ( Personal account).»
---. 191. «BEING A CHRISTIAN for Jacob, did not necessarily mean being virtuous. It meant primarily having faith & being baptized. The life of a Christian is a long struggle with oneself. – 193. M.J. looked upon himself as guilty. Every Christian is a dual personality. Every Christian is a Tartufe, a religious hypocrite, to some extent.»
---. 193. COMBINES BURLESQUE & MYSTICAL ELEMENTS: ‘Entrevue’ «describes a vision. The elements apocalyptic (the horse dominating the sea) & familiar (a poet at the piano). It is a picture that is drawn, a Marc Chagall assemblage of objects that do not usualy go together & that appear in unusual places. At the bottom of the picture, in miniature, the poet: a slave on his knees, whose expression is so changed that he does not recognize his own face. – 3rd poem (p. 194) not a visit but a vision: a horse, a woman haloed, a poet at the piano, & distant fires. Here the protagonist is a slave on his knees, straining for some understanding of the vision, for some understanding of who he is. – The theme is the problem of understanding the incomprehensible. Here the poet is the naive Breton seated in the midst of the flags of the world. He is in the act of reading, but he must interrupt his reading if he wishes to receive another visit from God. On the angel’s sleeve he sees three Hebrew letters he cannot read, & he wonders whether the Holy spirit will give him the gift of language. The poem ends abruptly with the angel impatient at seeing him so stupid. – ‘Exhortation’ is an answer to ‘Signification’. Man in his natural state is ignorant & closed off from the ultimate mysteries, but promise is made to him that progress can come about that the Holy Spirit can infuse understanding. The gift of tongues once came to the Apostles. – The unusual religious experience of the poet is thus related in 5 poems where he plays five slightly different roles. He is first the occupant of the Montmartre room, No 7 rue Ravignan, who returns from the library & sees, without preparation, without solicitation, the figure of Christ on the wall. He is the one chosen by God for a revelation, & he is stunned & shocked by this occurance.»
---. 193. «THE POET IS A TERRIFIED MONK praying before a stained-glass window of Saint-Eustache. The poet explains his belief in symbolism. The picture of Christ on his knees or on the cross explains the meaning of the Body of Christ. (194). The wound in the side of the body explains the Heart of God (as he had been in the first 2 poems ), he speaks by signs & objects & events. The ‘moine peureux’ wonders whether he should try to understand or simply try to pray. The question of prayer & study is central in the 4th piece which is on ‘meanings’. Without the immediacy of revelation & visitation, what is the poet’s conduct to be? How can he understand the symbolism of objects & events? »
---. 193-95. ‘REVELATION.’ «The action moves swiftly, from the moment of the poet’s return from the B.N. to the apparition on the red tapestry of the wall. In a second he was stripped by lightning. In the brief dialogue with the angel which follows, the poet is treated as the innocent. He has been transported & he understands.»
---. 193-95. «THE CASUALNESS & FAMILIARITY OF CHRIST’S APPARITION to M.J. is stressed. Even the address is given, & the significant detail that the zinc roof had been opened to admit more light. The dialogue between the Lord & the poet is totally simple. The cross most come into the room. It is there for the poet to look upon. – 194. The revelation becomes a visit when Max is sleeping on a mattress supported by four bricks. The Lord knocks at this door. His cross has to be brought in through the window, because it is too large for the door. The poet promises his visitor to contemplate the cross for the rest of his life.»
---. 195. «THESE POEMS TRANSCRIBE A VERY PERSONAL EXPERIENCE & announce a poetic method. M.J. felt in his room the supernatural presence of God. As a poet he will have to project this experience by means of color & form & reminscences. After being invaded by a Presence, he will become the prey of images. He will never dissociate poetic creation from divine revelation. The passivity he knew at the moment of revelation, he will continue to know at the moment of poetic creation. In the choice he has between the head & the heart, he chooses the heart. The apparition of God to Abraham, to Moses, & to other Old Testament figures, often took place in familiar settings. The apparitions of M.J. in a Montmartre cinema & in his room on the rue Ravigan could be interpreted as belonging to a Judaic tradition.»
GRENIER. «Cet homme était Protée.» Monde, no. spéc.1976. Dans une l. il écrit: «Tous les artistes ont toujours été les comédiens d’eux-mêmes, & il est impossible de rien extérioriser sans cela.»
LMM, 103. 29 oct. 1941. «[…] moi, le plus grand Tartufe qu’il y ait jamais eu sur la terre, un Tartufe sincère, mais Tartufe? »
LRV, 24. L. Roscoff (Finistere) chez la princesse Ghika, Clos Marie. 8 août 1924. «La DT fut un livre sincère & c’est son pauvre mérite. Il y a par-ci par- là dans mes 25 autres vol. quelques pages gentilles: tout cela valait-il les peines d’une vie de pauvreté & de souffrances aiguës?»
LOCKERBIE. Op. cit. 156-57. «The contrast, indeed, between the very secular nature of the Parisian poems & the rest of the vol. [speaking of DT] is so marked that Jacob tried to rationalise it in a preliminry note to the opening section: ‘Le poète cache sous l’expression de la joie le désespoir de n’en avoir pas trouvé la réalité.’ Yet this seems a contrived explanation, which does not reflect in any sense the real tenor of the early poems. To find a more convincing reason for the juxtaposition within the vol. of two apparently very different kinds of inspiration – apart from the drastically simple one of the conveniences of publication – one has to look for another form of continuity. – It can be found in the fact that, although the mood of the poems in which Jacob recounts his discovery of Christ is naturally very different from that of the secular pieces, the variation in the tone of the writing is not always so marked. His conversion was distinguished by the unpropitious circumstances in which it took place. Christ first appeared to him on the wall of his dingy lodgings in the Rue Ravignan, and for the 2nd time in the cheap seats of a Paris cinema. The banality of the context thus offers a striking contrast with the shattering nature of the experience – even more so than was the case with Verlaine in his prison cell. And while Jacob usually leans towards pointing the contrast, & in this respect is in direct descent from much traditional Christian meditation, including Verlaine, he also on occasion stresses the ordinariness of the context & captures the experience in a uniquely low key.»
LA LUMIERE QUE L’OUVRIER ZINGUEUR APPORTAIT A MAX ETAIT NATURELLE & SURNATURELLE. DT, 41. «Dès lors, la fumée rouge, les maisons enflammées, les incendies pourraient bien être, ‘entrevue’ par la vitre du plafond, la rambleur rosâtre du ciel parisien.»
---. 117. «OBEIR, MOI ! quand j’ai passé ma vie à désobéir à tous & à tout: je ne puis obéir qu’à mon goût sinon qu’à mes goûts. […] 118. Oserais-je demander au Père F… en quel mois il est né, pour faire son horoscope; j’imagine la scène…On verra. […]. Me laissera-t-on faire l’art que je veux? »
PERARD. 34. «Max monte au ciel, cela s’appelle ‘Entrevue’. Dans ‘Signification’, il apparaît comme un déchiffreur de symboles […].»
PIA, PASCAL cite le Père Blanchet: «Son système consiste à plaider coupable. Vous avez raison: je suis M. Tartufe. Tout Chrétien est M. Tartufe. Le chrétien est double. Entre son comportement, quel qu’il soit, & l’idéal qu’il professe, un écart, toujours subsistera, qu’il vous est aisé de dénoncer.» «Etudes Jacobiennes.» Carrefour 1018 (1964): 20.
PLANTIER. MJ. 47. «[…] dans les années qui vont de 1910 au baptême, & au-delà même de ce baptême, c’est bien en adepte des sciences occultes, en pélerin de l’absolu que M.J. développe sa vie intime & qu’il tente d’organiser son univers religieux, dans un effort constant pour concilier la lumière révélée sur le mur de la Rue Ravignan & toutes les symboliques humaines.- 58. Son désespoir s’explique par cette distance toujours visible entre ce qu’il est & ce quil voudrait être – 90. M.J. a précisé qu’il n’avait pas pris d’éther ni de boisson. L’usage de l’éther aurait commencé en 1910.- 145. Ajoutons que le poète a mis lui-même des années à admettre que le baptême ne l’avait pas transformé & qu’il était encore aux prises avec les mêmes tentations.»
SALMON. Disque Vert no. spéc. 11. «L’Homme.» «Tu as écrit le plus beau, le plus pur des livres que peut dicter l’Ange à un converti du 20e s.; à un converti de la Rue Ravignan & de l’Ecole de la rue Ravignan, comme ils disent! Or ce livre, le plus beau, le plus pur, tu n’as pas manqué à l’appeler DT. Sans doute pour qu’ils puissent s‘écrier: ’Ah! Ah! vous voyez bien !’»
SCHNEIDER, MORGENROTH JUDITH. «La DT an indication of M.J.’s poetic evolution.» 72, n. 7. Spelling: «The question is not resolved by the difference between Jacob’s spelling of ‘Tartufe’ (with one f) & Molière’s spelling of ‘Tartuffe’ (with double ff) for Littré gives the orthograph ‘Tartufe’ for the name of Molière’s personage, as well as for the 2nd meaning cited : ’(avec un f minuscule) faux dévot, hypocrite, coquin se servant du manteau de la religion.’ Blanchet (DT, 64) notes that J. did not adopt the orthograph of one f until the second proofs.»
---. 72. «After the Cornet’s brilliant formulation & ill. of the theory of the poem object, the dedication of Jacob’s next work incites surprise. The DT (1919) opens with a return to the idea of the poet’s parallel stylistic & spiritual progression: ‘Les étapes de ce livre, marquées par des œuvres poétiques, peut-être, conduisent l’auteur au catholicisme, du libertinage, dont le mysticisme ne l’avait pas guéri à la prem. Révélation.’ (p.73). Is the reader to take this declaration seriously ? Anyone familiar with the Matorel myth would incline toward scepticism. Certainly, Jacob encouraged doubt by placing the word ‘peut-être’ in an ambivalent position, so that it implies either the literary inadequacy of the poems or the doubtfulness of the author’s conversion. The title, of course, provokes questions. Is the text a defense of Molière’s character? Or does it invent a new personage named Tartufe? Or is ‘Tartufe’ simply an epithet for Jacob himself ? Whatever the case, the ‘defense’of a hypocrite appears problematic.»
---. 72-73. «The DT is a hybrid work defying classification by genre & creating a tension between fiction & autobiography. It claims to sketch the life of the author Tartufe (alternately called ‘le poète’, ‘le Juif converti’, ‘le libertin’). […]. Although the events of this narration & of Jacob’s own existence are similar, several obvious discrepancies weaken the status of the Defense as confession. On the one hand, the poetry […] reflects the 4 chronological stages of the poet’s spiritual evolution. […]. But an examination of the ms. shows that the order of the poems represents an arrangement decided at the time of publication not in accord with the chronology of composition.»
---. 73. «Viewed in the perspective of Jacob’s total writing & experiences, however, the Defense becomes significant both as a poetic manifesto & as a confession.»
---. 120. «Confession was the mode chosen by M.J. to transcend duality, & the mirrors in which he sought his undivided image were prayer & poetry.»
VM, 123. « …je suis un martyr de moi-même, je ne suis pas un Tartuffe, je suis M. Tartuffe. – Moi aussi, répondîmes-nous. – Alors votre vie doit être atroce, mon pauvre monsieur, vous faites votre purgatoire sur terre & Molière, le superficiel Molière vous y aide… - Le sermon était achevé: Tartuffe chanta le credo avec une convicton simple & ardente.» [Ecrit en 1926]; voir le texte intégral in «Illisible.» LNF, 199-204.
---. 130. «Dans Le Phanérogame, […] M.Tropgrandglaïeul, dissertant sur la nature du mensonge, invoquait Tartufe: «En fait, il y a peu de mensonges & Tartufe était à peu près aussi pieux qu’il disait l’être. On peut être pieux & aimer Elvire ou l’argent d’Orgon. L’amour mystique & l’autre voisinent. Quant à l’argent notre pauvre diable n’en avait guère. Je lui accorderai volontiers les circonstances atténuantes. Il a été tenté comme tous les saints du Paradis. Tartufe doit être au Paradis & Louis XIV qui le fit arrêter n’y est peut-être pas.»
WARNOD, JEANINE. Le Bateau-Lavoir. Op. cit. 107-08. «Après une journée de paisible travail à la Bibl. Nationale, […], je rentrais chez moi. […]. Il y avait sur mon mur un hôte […]. Un ineffable bien-être descendit sur moi. Je restai immobile sans comprendre. En une minute je vivais un siècle. Il me sembla que tout m’était révélé. J’eus instantanément la notion que je n’avais été qu’un animal timide. Un homme libre. Instantanément aussi, dès que mes yeux eurent rencontré l’Etre Ineffable, je me sentis déshabillé de ma chair humaine & deux mots seulement m’emplissaient: mourir, naître.»
LE TERRAIN BOUCHABALLE
A BONET. Cat. no. 258. «’Bouchaballe’ est un livre ennuyeux! Je l’ai conçu à une époque où je croyais devoir écrire un long roman. Ecolier! esprit d’écolier! il fallait faire un roman. D’ailleurs j’avais ma ville dans la peau, ça devait sortir mais je ne savais pas faire un roman. Je l’ai commencé en 1900 & repris & fini en 20 ou 23… Il s’agissait de peindre une ville. Comment veux tu qu’il n’y ait pas de couchages dans une ville. Ce n’est pas de ma faute, c’est la faute des hommes qu’il faut peindre tels qu’ils sont & non tels qu’ils devraient être. Tu es scandalisé des rapports de Pancrasse & de Mme Edmée. Que diras-tu de Filibuth. Ça ne m’empêche pas de prêcher le bien! C’est en voyant l’horreur du mal qu’on aime la vertu. Le seul mérite de Bouchaballe est que c’est ‘écrit’ & bien écrit.»
A DOUCET. CORR. I, 148. 30 mars 1917. «[…] je suis dedans [allusion à Cinématoma] […] si je ne devais en sortir pour la foire aux bulletins de souscriptions & m’occuper d’un livre auquel je ne touche plus depuis 3 ans & auquel j’ai travaillé 10 ans.[Le TB] La litt. est comme les femmes: on en souffre & on y retourne, & plus elles battent, plus on les aime. En somme, il n’y a pas d’homme qui ait été battu & la litt. n’a jamais tué personne, mais elle en a rendu malades plusieurs.»
LMJ, 91. 25 fév. 1924. «Le système Cervantes est dangereux parce qu’on risque d’être démodé si on présente en 1945 ce qui fut conçu en 24. L’insuccès profond de Bouchaballe vient de ce que je publiai en 21 ce qui avait été conçu en 03.»
A JACQUES DYSSORD. St.-B. 25 déc. 1923. PJ, 202-03. «[…] les revues cath. ont jeté l’anathème sur Bouchaballe. On en a écrit secrètemen à Mr. le curé, qui m’a fait connaître la chose.»
A KAHNWEILER. Corr. I. 74. Quimper. S.d [1912]. «Je travaille à force! Je cisèle un vieux roman sur Quimper qui doit être le plus beau livre du 20e s., quelque chose de mieux que l’hydroaéroplane, le cinéma, photos en couleurs, & l’éclairage au mercure.»
A MICHEL LEIRIS. Corr. II. 173. 22 juin 1923. «J’ai eu honte, des années & des années, de ce livre que je regardais comme très mal; aujourd’hui je t’avoue que c’est le seul de mes livres dont je sois fier, & ceci encore contre l’opinion de mes amis!! André Masson m’accuse de ‘faire des types’ […] un jour viendra où on me remerciera d’avoir rompu avec toute ma litt. à l’avant-garde qui est le passé alors que l’humanité est une source d’éternel futur » ; LMLE.
---. IBID. 173. NOUVEAUX PROCEDES DU DIALOGUE. «Je venais de refaire le 2e t. pour y appliquer mes nouveaux procédés de dialogue. Un connaisseur pourra vérifier que toute la ‘Dame aux sept maris’ a des dialogues d’une certaine force supérieure à tous ceux du reste.»
A RADIGUET. L. inéd. s.d. [1923]. Keith Goesch. Raymond Radiguet. Paris/Genève: La Palatine, 1955. «As-tu vraiment aimé ce Bouchaballe (j’ai idée que Bouchaballe est un… ou mon chef-d’œuvre. Je pense ainsi & le dis simplement). Il a été assez mal coupé. Il s’agissait d’une mode, d’une étoffe avec digressions; ils n’ont pris que les digressions & tout d’un coup montré un bout de la trame; on ne comprend plus.»
LA BIBLIOTHEQUE DE QUIMPER porte en exergue: «Livre à ne pas faire connaître à Quimper, Max.»
BLANCHE, J.-E. Disque vert no spéc. 32-33. «Le multiple génie de M.J.» «En lisant certains passages de TB, où M.J. semble se moquer de la composition, mais, croyons-nous, maître d’une esthétique très réfléchie, déroule un film tel qu’il l’a tourné; coupant de-ci, de-là, recollant, rajustant à peine, trop confiant dans l’intelligence du spectateur auquel il s’adresse – nous nous croyons assis dans le parc de Vichy, près des sources: lieux où, peut-être, nous entendîmes le plus de conversations hachées (burlesques, plates, folles mystérieusees), dans tous les dialectes des provinces de France. 32. ’Un dimanche à Gyuichen’ chap.1 de TB, débute ainsi: ‘Quand M. Simonnot plaida près de la ville pour sa découverte d’anthracite, Guichen se mirait dans les flots turbulents du Jet & de la Tille, se carrait dans ses collines. […]. Dans les trois p.suivantes, le lecteur effaré, & qui se demande ‘pourquoi […] nous raconte-t-on que M. Grouillard joue de l’accordéon chez sa mère ? arrête son regard sur les noms de Mlle Rose Gaufre, de M. Lecourbe, maire; de Guillaume-Henri Pancrasse, […] lorsque Louise Cadénat se mixtionnait avec des saltimbanques… », & M.J. semble pêle-mêle nous jeter sous les yeux M. Goin, […], M. Carent, un M. Hélary, une Mme de Revasy & ses demoiselles. Durant 319 pages de ces 2 vol. de Bouchaballe, ces petits personnages, ces ‘fantoches’ & bien d’autres (gémit le lecteur éberlué!) vont bavarder sans répit, se mouvoir sur place en 11 denses tableaux, ou fort longs chapitres, & ne nous diront que ‘des choses sans intérêt’, pour moi, public, qui cherche dans un roman des images condensées, organisées, touchantes & pathétiques de la vie. Quel tohu-bohu! - Pour d’autres qui prêtent une oreille curieuse & sympathique à tous les bruits de la terre, M.J., poète & notateur des mille accents de la voix humaine, semble en rendre comme nul autre, la qualité. Sans se cacher. Toujours présent, là, derrière le phonographe […]. - 32. Le TB, le plus long de ses poémes épiques en prose, destiné – dira-t-on – au guignol. […]. La variété de son génie seule déconcerte. On le classerait […] entre Montaigne, Heine, Homère & Paul de Kock.»
BOUNOURE. «M.J. romancier.» Intentions 18 (sept.-oct. 1923): 4. «Ce qui nous plaît dans le TB, dans F, c’est que d’un bout à l’autre nous y entendons la voix de M.J. Renonçant à la convention qui fait du romancier le spectateur & l’historien de son sujet & de ses personnages, lui parle son roman, il est le comédien: il le joue par l’artifice d’une sorte de ventriloquie spirituelle. 6-7.- La gentille humilité, l’aisance, la grâce sauvent tout chez M.J .; ces rares vertus lui font peindre la laideur, la sottise, la bassesse & le vice sans qu’il tombe dans le lourd ennui, le dénigrement pessimiste. – 8. M.J. fait à lui seul tout le conseil municipal de Guichen, y compris l’opposition, & les hoberaux & les boutiquiers & le proviseur & l’homme-serpent […].- L’aveugle du TB à qui rien n’échappe. – 18. Trouver le ton de la conversation & y rester, voilà l’ajustement qui donne le naturel.– Changements brusques, nets, carrés: des personnages nouveaux s’avançent tout à coup, comme chassant les précédents & s’emparent violemment à notre œil. Vitesse & saccade qui donnent une étrange impression d’intensité dans le superficiel, l’impression d’un comique & féroce nullité de la vie humaine. – 18. Paradoxe du Comédien. Il s’ensuit que le roman de M.J. sera tout en dialogues, en monologues ou en lettres, en conversations ou débats d’assemblée.»
---. MONDE 22 mars 1969. «Une complainte mystique.» ‘Une ventriloquie géniale.’ «Mais d’abord, ce qui était ‘descendu dans sa tête’, […] le goût du caricatural, & le sens de la mimique. Il savait lire sans faute & imiter à merveille ces systèmes de signes que sont les êtres. Il avait la clef des comportements de tous ces bipèdes autour de lui: il les imitait avec un tel art que le triomphe de la parodie faisait oublier la cruauté de la peinture. ‘L’abeille qui parle dans ma tête’, (selon son mot) avait un dard très acéré, mais ce qu’il éprouvait surtout, c’était une sorte de griserie, comme si le jeu qu’elle jouait était l’envahissement d’un autre, un chef-d’oeuvre de décentrement. Max avait reçu le don d’un histrionisme fondamental, par lequel il s’appropriait la parole vivante de tous ces sujets du roi de Béotie qu’il rencontrait dans la rue, & rendait leur parole plus vivante encore par sa ventriloquie géniale.»
LE BOURGEOIS EN FACE DU PAUVRE. «Bureau de Beinfaisance» in TB (98). ‘[…] il a le cœur si tendre qu’il ne voit les pauvres qu’une fois par mois & avec dégoût.’
BULL. CRIT. DU LIVRE 317 (mai 1972): 579. «Plein d’humour féroce, de truculence alliée à une satire de la petite bourgeosie avec une certaine sensibilité narquoise apparaît ici.»
COCTEAU. Disque vert no spéc. 30. «C’est cette ronde surnaturelle qui fait du TB un poème épique, une légèreté profonde, un mouvement fou sur place; le mouvement des atomes qui composent un objet quelconque, au lieu du mouvement lourd des voyages.» Poésie critique. 119.
DV. 53-54 ; nlle éd. 88. «A Marcel Béalu ce roman médité avant 1900, commencé après, fini & édité en 1921, sans lui offrir l’exemple d’une si ridicule paresse ou patience – ou impuissance… ». «C‘est l’histoire du théâtre de Quimper», ajoute-t-il ailleurs, «tous les héros sont les amis de ma jeunesse. C’est un livre très ennuyeux, mais documentaire: une ville du Finistère en 1880 & 1900 » ; M.J. dans ses livres. 36, no. 78 ; Bibliographie de Max Jacob. 138 ; Max Jacob no 3 (1980): 17.
GARNIER. EUROPE no. spéc. 39. «Les personnages qui les animent sont des provinciaux de chair, de sang, d’esprit. Quimper, sa vie natale, a mis pendant des années sous les yeux de M.J., des ‘types shakespeariens’. Il les a fixés. […]. Le roman sera édité en 2 vol. chez Emile-Paul Frères, en 1923. La pièce [du même titre] sera souvent remaniée. […]. De ces études de mœurs, ne restera, sous forme dialoguée, qu’un Matorel en province. Plaquette éditée en 1921 [par Vogel].» [La comédie perdue a été retrouvée & publiée chez Rougerie, présentée par Roger Secrétain en 1982].
HAN, JEAN-PIERRE. NL 25 (nov. 1982). «Intrigues, pour ne pas dire magouilles, au conseil municipal d’une ville de province (on aura reconnu Quimper, la ville natale de M.J.) à la suite du legs d’un terrain sur lequel le maire veut faire construire un théâtre, un conseiller municipal un asile de vieillards, un autre conseiller exploiter la houille qu’on vient de découvrir, tel est le thème assez savoureux – & qui pourrait être toujours d’actualité que développe la pièce. Il sert surtout de prétexte à M.J. pour nous peindre la vie – prise de folie, car les intrigues s’enchaînent les unes aux autres; ainsi le maire tente de placer son neveu, architecte, mais surtout ami d’un ministre qui viendrait pour l’inauguration du bâtiment…, etc. – d’une ville de province du début du siècle. Sorte de chronique ironique, sans complaisance de la burgeoisie d’alors. Les choses ont-elle profondément changé? »
HENRIOT, EMILE. De l’Académie Fr. Historia 268 (mars 1969): 97. «Tant mieux pour lui si je me trompe, si Filibuth est sans longueurs & le TB toujours amusant! En dépit de passages brillants & de cocasseries locales, dans le picaresque & le saugrenu, le prosateur offre moins d’intérêt que le poète, à placer dans la filiation directe de Laforgue & de T. Corbière, avec moins de culture philosophique que le prem. & d’amère vigueur que le second.»
HELLENS, FRANZ. Disque vert no. spéc. 45. F.H. rapproche Mémoires d’un touriste de Stendhal au TB de M J. «Jacob comme Stendhal s’est attaqué à l’esprit de province, voire de village […]. Tous deux ont taillé à vif, & tous deux en se jouant. Quand Jacob écrit: ‘La moitié du monde méprise l’autre & recherche son estime’, ou: ‘on ne s’évade jamais de son milieu, non plus que de sa destinée’, je ressens un plaisir qui ne m’est pas inconnu. […]. Stendhal, qui redoute & abhorre la bêtise […] nous donne le conseil de la regarder de près pour en rire & finalement y prendre de l’intérêt. N’est-ce pas ainsi que fait Jacob? Et, cette bêtise (p. 46) qui nous paraît d’abord si méprisable finit par ne plus l’être du tout, puisque nous nous sommes amusés. Bien plus, nous y découvrons peu à peu un ordre naturel inattendu, une sorte de déterminisme supérieur, qui nous la font admettre sans répugnance, & respecter en quelque sorte. Il y a des insectes qui […] ont l’air de tourner en tous sens, comme des idiots. Fabre nous explique leur activité & nous fait admirer l’instinct qui les conduit. C’est ainsi que Jacob, comme Stendhal nous font admirer la bêtise. Et pourquoi? Parce que l’un & l’autre n’ont pas craint de s’y mêler, & de prêter aux plus stupides le meilleur de leur parfum. – Tous deux enfin ont saisi de secrets rapports qui unissent les hommes, les paysages & les objets. Les anciens mettaient l’harmonie au seul compte du bien & du beau; notre siècle a découvert le rôle des dissonnances; Stendhal l’avait prévu.»
HENRY, H. Europe no spéc. «Bio-Bibliographie de M.J.», 113. «Le maire de Quimper démissionne à propos de la véritable affaire qui inspira le TB. Elections municipales où Max trouve ‘très Tolstoï’de bavarder avec des ouvriers socialistes.»
---. PEINTURE GROTESQUE & NOIRE DE L’IDEAL BURGEOIS. Ibid. «M.J. & la Bretagne.» 9. «Max était devenu totalement parisien & que ces multiples ‘tableau de la Bourgeoisie’que sont le TB, le RB, le C, ‘Pèlerinage, nage!’ ou ‘La Gourmandise’ seraient une aussi valable peinture, grotesque & noire, de l’idéal bourgeois, en d’autres lieux.»
---. «M.J. & QUIMPER.» Op. cit. 136. «[…] je tiens Bouchaballe pour le foyer de l’œuvre romanesque de Max & ce foyer est un reflet de Quimper. Reflet transposé sans doute, mais de très près. H. Hertz qui connaît bien Max, le définit excellement comme un ‘funambule au ras du sol ». Son inspiration se nourrit de détails vrais & y revient sans cesse.»
HERTZ, HENRI. «Avec M.J., en compagnie de la renommée.» Disque vert no spéc. 22. «Le TB conserve une excitation passionnée, un soulèvement interne, une allègresse féérique & démoniaque qui en font, si l’on peut dire, une esplanade de ballet. L’intelligence s’y ébroue, s’y nargue, s’y sophistique, jusqu’à être ivre d’une ivresse diabolique, devant la bêtise des hommes. Comme le démon de M.J. y débrouille le chanvre des caractères & les file, malignement sur le rouet qu’il a pris aux fées.»
LANNES, ROGER. «M.J.» Art op. cit. 3. «Peintre extraordinairement sardonique de la petite société provinciale fr. dans ses romans, inventeur prestigieux d’anecdotes, de portraits & d’incidents, il fit de ses poèmes un amoncellement de vocables, de tours & de détours de langage, les obligeant ainsi à détenir le plus possible de vie & de fécondité dans le temps même où il en espérait le salut sur le plan de renoncement & de la solitude.»
LEJ. Préf. 8. «Comme je le raccompagnais peu après - il avait en mains le prem. t. de son roman le TB, que je venais d’acquérir, & s’arrêtait à chaque page, pour y lire à haute voix, & à l’ahurissement des passants, une phrase suivie de ‘Oh! comme j’écrivais bien…’ que lui fournissait l’occasion de précieuses révélations sur son art […].»
---.QUIMPER, VILLE INTESTINALE. 41. s.d. [1935]. «[…] j’aime à me trouver dans cette ville intestinale. J’entends parler du percepteur, de la cuisinière, etc… c’est ce que j’aime le plus au monde.»
LJRB, 147 (II) 14 mai 1915. «Mais mon roman! […] mon roman! quelle souffrance! » 149. 28 sept. 1913. Le TB m’est apparu telqu’en lui-même: une oeuvre boîteuse indigne de la lumière de la rampe.» 29 sept. 1914. 143. «Je croyais Bouchaballe perdu par la poste & je m’en réjouissais.» 151. 12 avr. 1914. C.p. «[…] j’ai besoin de refaire ce livre entièrement.»
---. 145. LJRB I. [1913]. BOUCHABALLE REFUSE. «Elle [ta lettre] est arrivée au moment que j’apprenais le mépris du Mercure pour un roman que j’ai écrit toute ma vie. On m’accuse d’ingéniosité, de manque d’intrigue (un roman dont j’ai fit une pièce!) on maltraite mon style (ayez donc travaillé le style quinze années). C’est un chagrin… ».
LUA, 20. St.-B. 28 oct. 1923. «Mme Rachilde a mis la pointe dans la cible quand elle a écrit que je résumais des caractères dans les propos. – 21. Le Terrain est une oeuvre de jeunesse retouchée pendant 20 années.»
LETTRE INED. A J. PAULHAN. VM, 134-35. «Il a supplié M. Gallimard de lui rendre son ms. pour qu’il puisse y donner ses derniers soins & qu’il n’a aucune nouvelle de lui. «Je souffre comme la mère privée du nourrisson.»
PERARD, 57. «Le TB, conçu en 1903, publié en 1923, retouché pendant 20 ans, est l’hist. du théâtre de Quimper en 2 t. (253 & 319 p.), en 11 tableaux ou chap. Un terrain a été légué par le sieur Bouchaballe à la municipalité de Guichen; celle-ci a gagné tous les procès de succession & n’attend que la signature du conseil d’Etat. Les aventures du terrrain & celles des Guichantois s’entrelacent, les ressorts de la ville se découvrent. Tous les héros ont été les amis de l’auteur.»
PFAU, 71. Le TB & Le P ne font pas allusions aux conflits & problèmes personnels de M.J. bien qu’il s’agisse dans le TB de sa ville natale.[Rés. M.G.].
---. 70-75. [Rés. M.G.]. Thomas Lecourbe shows an ambivalent attitude towards the socially weak ones. He is a striking example of bourgeois hypocrisy.
---. 188. [Rés. M.G.]. Q. & its bourgeois are Jacob’s inexhaustible topic, so much so that the inhabitants of Quimper, the righteous, narrow-minded bourgeois pop up irrepressibly in his later write up: «La Gourmandise», CN, TB.
PIA, PASCAL. «Etudes jacobiennes.» Carrefour 1018 (1964): 20. «]…] il s’agit moins d’un roman que d’une galerie de portraits dont la plupart sont des portraits-charge. Le terrain est un verger qu’André Bouchaballe, marchand de liège, a légué à Guichen, sa ville natale, & sur l’utilisation duquel les notables se trouvent divisés. Le maire voudrait y faire bâtir un théâtre. Le chanoine ne veut pas que Guichen ait un théâtre. Une des clauses du testament interdit toute construction qui ne serait pas confiée à un architecte guichentois. Trois architectes seulement peuvent se prévaloir d’être nés à Guichen, mais l’un d’eux est acquis au chanoine, un autre, qui se pique de géologie, soutient que le sous-sol du terrain est riche en charbon qu’il faut exploiter. De savantes manoeuvres évincent le seul architecte disposé à construire un théâtre. Pour conclure, le Conseil d’état prononce l’annulation du legs.» – Selon P.P «Il n’était pas Balzac, ni même un demi-Balzac. Ce n’est pas un romancier. Il bavarde & n’avance pas. Son récit s’étire, s’embrouille. On dirait que les personnages en sont liés non avec de solides câbles comme les héros de feuilleton, mais avec du bolduc ou de la filasse. Ils fichent le camp à travers les mailles du filet. Mieux vaut, à coup sûr, les gens que fait parler C & ceux dont M.J. a ouvert les lettres dans le CN.»
POREL, JACQUES. «Le rire de M.J.». Disque Vert, op. cit. 35. «Tout, depuis le choix des exemples jusqu’à l’accentuation excessive par laquelle il soulignait ou répétait sa phrase, tout devenait comique & profond. Il parvenait à l’éloge par la dérision.»
SECRETAIN, R. PRESENTE LE TERRAIN BOUCHABALLE, comédie en 3 actes. Op. cit. 14. «Face à l’ensemble de son œuvre, à ce qu’on connaît d‘une foisonnante corr., où s’éparpillaient ses amitiés & ses cogitations, à ce qu’on sait de lui après tant de gloses & d’hommages, éparpillés eux aussi, la difficulté est toujours grande de le saisir dans une analyse exhaustive & dans une classification sécurisante.»
VM, 158. «Max a dit à Gabory que pour peindre Guillaume Pancrasse, il s’était inspiré du caractère d’Apollinaire.»
L’UNITE DE VIE & DE L’OEUVRE
A ROUSSELOT. ROEPING, no spéc. 118. 2 juin 1942. CAMELEON. «Voilà! Tu es prévenu de mon moi physique par le portr. de Roger [Toulouse]. Quant au moral, je suis caméléon.»
BELAVAL. C’était il y a 30 ans. 17. UNITE DE L’ŒUVRE & DE L’HOMME. «Pour M.J., il y a trop de témoins à se souvenir de ses anecdotes. Le personnage pittoresque cache le peintre. Quand sa légende – il s’agit toujours de légende – se sera substituée aux commérages, quand le visage, transformé, ne fera plus qu’un avec l’oeuvre, comme cela est arrivé pour un Voltaire ou un Rousseau, alors on sera sûr que le poète assassiné aura traversé la zone d’ombre.»
HUMEAU, E. «Notes biogr. sur R. Guiette.» N.R.F. 290 (fév. 1977): 101. «Humeau cite Guiette qui écrit [à propos de M.J.] que ‘Protéiforme & toujours le même au milieu de tous. Qui ignore sa conversation ne peut se faire une idée, même approximative, de la vérité de l’unité de toute son oeuvre.»
INTERVIEW DE R. TOULUSE par CLAUDE MORGAN. Créer. No spéc. 18. «Son élan créateur s’accompagnait de rires, de sourires, d’interrogations, de persuasion, d’introspection, d’une érudition prodigieuse, d’une connaissance très profonde de la thora. Il se projetait également en tant que chrétien. Et même en tant que Breton. C’était tout un amalgame. Une série d’engagements dans des directions qui pouvaient sembler opposées mais qui, en réalité, convergeaient pour former sa propre personnalité. Tous ces éléments qui semblaient se contrarier, lui, les transmuait, un peu comme l’alchimiste qui fabrique de l’or à partir de tels ou tels éléments qui sont indispensables. Qu’un seul d’entre eux manque, la transmutation ne se fait plus. Max avait besoin de cette multiplicité dans l’expression pour créer le p. comme l’alchimiste crée l’or. […]. Ce qu’il ne faut jamais oublier, c’est le fait que son engagement total portait ses sentiments à leur paroxysme. Il était souvent en transes & jusqu’à visualiser ses pensées, visions dont on a tellement & tellement mal parlé.»
MANOLL, M. «L’Aventure poétique… » Op. cit. 9. «Disons toutefois que nous avons souvent l’impression, en consultant les diff. études parues sur son oeuvre, de nous brouiller les idées, au lieu de les éclaircir. La personnalité du poète, telle que l’on a tentée de la définir, nous apparaît aussi floue & aussi peu ressemblante que possible. Chacun se perd à travers ses contradictions, ses mutations, sa virtuosité verbale, sa gravité burlesque. – En vérité, celui qui se qualifiait lui-même de ‘caméléon’ est difficilement saisissable, dès l’instant où l’on ne cherche pas à établir un parallèle entre la figure & l’oeuvre, qui se complètent & s’éclairent réciproquement. M.J. est, avant tout un poète, ne l’oublions pas, c’est-à-dire un créateur de mythes, un inventeur d’images & de rêves, un perturbateur qui fausse les données communément admises.»
OXENHANDLER, UNION WITH THE MYSTICAL BODY OF CHRIST. «Concealed emotions in M.J.’s poetry.» Op. cit. 56. «There is a reconciliation & a going beyond the finite limits of his own ego. He attains this by an appropriately Christian means. He evokes one of the strangest of Christian doctrines – that of the Mystical Body – the belief that all Christians participate in a mystical union that makes them members of the body of Christ.»
PERARD, 11-12. UNITE, MASQUES, DOUBLES, EXAMINER L’ŒUVRE ENTIERE. «Un exégète anglais, S.J. Collier, écrit que ‘ses poèmes, ses romans & ses lettres constituent une seule & même confession, celle qui commence avec le CD & se termine avec les Méd. rel.’ Oui, l’œuvre entière est une confession qui commence non pas avec le CD, mais avec SM, le prem. des doubles, des masques de l’auteur. Pourquoi des doubles, des masques? Pour deux raisons. D’abord, le poète est partagé entre le besoin de tout dire & la peur d’être moqué: il recourt au sosie. Ensuite, sa Poétique, son Esth. exige la distance entre l’auteur & l’œuvre, entre l’oeuvre & l’amateur; c’est la théorie classique: éloignement de l’oeuvre pour en augmenter le prestige. Ne séparons donc pas, mais distinguons pour unir.»
PEYRE. Op. cit. 54-55. H. Sauguet: «Cette unité, c’est sa personnalité. Cet homme pouvait être à la fois poète, peintre, astrologue, un conteur éblouissant, homme d’une grande pitié & en même temps presque luciférien dans certaines de ses plaisanteries. […] je considère que c’est un des écrivains les plus considérables de son époque. Avec cette apparence de légèreté, il est allé très loin dans les portr. comme dans l’incursion pyschologique & humaine.»
---. 43-44. R. Secrétain: «il était multiple en son unité. Cette unité s’est opéréé surtout sur le plan spirituel. Tout est original chez lui: sa vie, ses origines, la multiplicité de ses dons, le caractère contradictoire de ce qi se passe en lui, les sollicitations antagoniques, puisqu’il avait toujours un ange sur une épaule & un démon sur l’autre. […]. Son esth. consciente & volontaire était une rupture avec la litt. solenelle. A cet égard, M.J. était un révolutionnaire & un iconoclaste. Il désacadémisait tout: la litt. & la vie.»
---. 100. R,. Toulouse: «Il définit la poésie comme ‘un rêve inventé’.»
PLANTIER. «La joie de M.J.» Rfl, no spéc.5. «LA VIE DE M.J. EST UNE CONQUETE DE LA JOIE, DANS LES DISCORDES INTIMES comme dans la peur, dans le malheur même, car il a saisi de toutes ses forces toutes les puissances de la vie.»
---. L’Univers poetique de M.J. 406. «Du monde en morceaux du CD, du monde en guerre des VI, M.J. passe au vécu de la rencontre dans les DP & dans L’Homme de cristal, rencontre déjà commencée dans FE & DT. Similitude & analogie accomplissent l’accord jusqu’à l’identité.» 407. La poésie pour M.J. est une «mobilisation de toutes les forces & de tous les instants qui s’appelle la recherche du bonheur. Alors l’œuvre redeviendra ce qu’elle n’a jamais cessé d’être pour nous, & passionnément, un visage.»
SAINT-THOMAS. ŒUVRE & VIE DE M.J. SONT INSEPARABLES. Conclusion de sa thèse. 282. «Car sa vie & son oeuvre sont indissociables. Son œuvre […] révèle sa vie, & par son contenu, & par sa forme. Elles sont inséparables pour une autre raison: cette ouvre est une confession, sous des formes diverses; voilées, bien sûr, mais d’une étonnante franchise. Depuis ses années de misère à Paris au tournant du siècle, jusqu’à ses derniers jours, sa vie se déploie, multiforme, dans son oeuvre.»
VISIONS INFERNALES
ENVOI A F. LEFEVRE «ce livre en bibliophile à un bibliophle. Ce livre saignant à un ami qui a reçu d’autres cnfidences.»
DV, 55. «Je n’aime de poésie religieuse que celle qui oublie & fait oublier toute littérature » ; nlle éd. 88 ; MJ dans ses livres, 38 no 89 ; Biblio. de M.J. 139.
PR, 298. «A J. Denoël, Jacob écrivait cette restriction importante: ‘C’est une espèce de CD, mais très sage & dont l’unique sujet est le diable sous toutes les formes possibles.’ (PJ, 113). – 301. «Au fond ce qu’a voulu réaliser Jacob c’est une récupération religieuse de l’esth. révolutionnaire, non seulement la sienne mais celle que les Surréalistes sont en train d’élaborer contre la morale & la rel. cath. & qu’ils doivent à Rimbaud. Jacob le sait ou le pressent, & dans ce recueil des VI, plus encore que dans le CD qui lui doit pourtant déjà, il recourt à une poétique dont on ne peut nier les affinités avec l’auteur des Illuminations. 304. Les VI se situent dans un univers chrétien accepté, chéri. […] il s’agit de rallier à la religion salvatrice les malheureux qui se damnent, de les avertir afin qu’ils rejoignent la maison de Dieu; l’intention apostolique soutient le recueil.»
---. 279. «En 1924 paraissent les VI, 74 p. en prose, 74 p. religieux. Sur ceux-là nulle hésitation n’est possible; le titre à lui seul empêche de les lire autrement que des dénonciations de l’enfer, thème essentiel à la prédication chrétienne! »
---. 561. «Nous rejoignons totalement les conclusions de l’analyse minutieuse effectuée par J. de Palacio» – écrit Christine Andreucci - «dans son travail de reconstitution de ce qui aurait dû être l’ultime recueil religieux de M.J., d’une part lorsqu’il considère que les trois plaquettes successives de ‘FE, SI & R sont autant de jalons dans une production incessante, cohérente & globale, qui dut assez vite pressentir son unité sous son titre définitif’, d’autre part, lorsque reconstituant ce recueil supposé, il souligne ‘l’unité de la production jacobienne, la continuité d’une inspiration religieuse échelonnée sur quelque quinze années’.» (J. de Palacio. «Prolégomènes aux Actualités éternelles.» RLM no spéc. 3. 113-38). [Les Actualités éternelles ont été publiées dans une éd. prés. par Didier Gompel-Netter & annotée par Marcelle Gautrot. Eds. de la Différence, 1996].
VISIONS DES SOUFFRANCES & DE LA MORT DE JESUS FILS DE DIEU
PR, 246 & PJ, 291-92. «L’album que je vais publier n’est ni de l’art ni de la prière & pourtant peut-être ceci & cela […]. J’habitais à l’hôtel dans une campagne charmante & je réservais mes matinées à mes devoirs religieux. Mes devoirs religieux sont souvent des dessins & de la peinture: pas plus que les dévotions des chrétiens les plus intellectuels, les miennes ne se passent d’images pour s’adresser à Dieu.»
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